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Thrombose

Publié le 17 avr 2007Lecture 6 min

Cœur pulmonaire chronique postembolique : qu'apporte l'échocardiographie ?

D. METZ, CHU de REIMS

La place de l'échocardiographie en USIC dans la prise en charge initiale des embolies pulmonaires (EP) aiguës est bien reconnue et de pratique régulière. Sa place est essentiellement reconnue dans le diagnostic d'un syndrome de détresse respiratoire aigu et son approche pronostique établie à partir des paramètres de tolérance hémodynamique de l'événement. Son utilisation dans le cadre de la prise en charge des cœurs pulmonaires chroniques (CPC) postemboliques est moins bien codifiée.

Les recommandations européennes pour le diagnostic des hypertensions artérielles pulmonaires (HTAP) ne situent l'approche échographique qu'au stade de dépistage de cette hypertension(1). Elles rapportent l'excellente valeur diagnostique de cet examen non invasif dans l'estimation des pressions artérielles pulmonaires (PAP) systoliques à partir des flux régurgitants tricuspidiens et pulmonaires, de même qu’est mentionnée sa capacité à effectuer ces explorations facilement au lit du patient. Aucune allusion n’est faite sur les valeurs sémiologique et pronostique de ces signes face au caractère chronique de l’HTAP.   Définition du cœur pulmonaire échographique Il n'existe pas, à l'heure actuelle, de définition consensuelle du cœur pulmonaire chronique échographique. En se référant aux études portant sur l'évaluation sémiologique dans le cadre de l’EP aiguë, on constate que 40 % des patients sans modification hémodynamique systémique sont porteurs d’au moins une anomalie échocardiographique du cœur droit, correspondant à un défect de perfusion d’au moins un tiers du parenchyme pulmonaire. Dans le cadre d'une revue de littérature(2), Goldhaber retient comme signe essentiel la dilatation du ventricule droit en télédiastole à plus de 30 mm évaluée en incidence parasternale gauche en mode TM. S'y associe une accentuation du rapport des diamètres ventriculaire droit sur ventriculaire gauche > 0,9 (0,6 pour le rapport des surfaces) estimé en incidence 4 cavités bidimensionnelles, ainsi qu'une élévation de la vélocité maximale de la fuite tricuspide > 2,6 m/s, traduisant une HTAP. Enfin, le signe de McConnell est retenu parmi les principaux items de ce tableau échographique(3). Celui-ci consiste en une hypokinésie prononcée du mur libre du ventricule droit contrastant avec une contraction normale de l'apex ventriculaire droit. Tous ces signes sont critiquables par leur valeur seuil retenue proche de la normale, notamment pour la vélocité de la fuite tricuspide chez la personne âgée, leur manque de reproductibilité, ou le manque d’efficience du signe de McConnell. En outre, aucune allusion n'est faite dans cette définition à d’autres signes tels que le mouvement paradoxal du septum traduisant la surcharge barométrique ventriculaire droite sur le ventricule gauche, le flux pulsé de la chambre de chasse ventriculaire droite, les flux de remplissage ventriculaires gauches ainsi que les mesures des surfaces ou diamètres de la cavité auriculaire droite et veine cave inférieure (figure 1). Figure 1. Patient de 60 ans, dyspnéique victime d’une EP. A. Coupe petit axe 2e EICD montrant la dilatation du ventricule droit et la disparition de la courbure septale ; B. Traduction TM en incidence parasternale grand axe avec mouvement paradoxal du SIV ; C. Fuite tricuspide en doppler couleur ; D. vélocité de cette fuite de 4,5 m/s traduisant la caractère chronique ou récidivant du CPC dans ce contexte embolique. Cœur pulmonaire : situation aiguë ou chronique ? C'est avant tout un faisceau d'arguments qui permettra de répondre à cette question pour laquelle l’échographie Doppler cardiaque apparaît très performante. Le meilleur élément discriminant reste le niveau de pression pulmonaire puisque l'on sait qu’en situation aiguë, le niveau d'élévation des pressions est lié de façon exponentielle aux défauts de perfusion, ce qui n'est pas le cas en situation chronique. Ainsi, une élévation de la vélocité maximale de la fuite tricuspide > 3,5 m/s, témoignant d'un niveau de pression ventriculaire droit systolique à plus de 60 mmHg, est très certainement l'élément le plus fiable pour retenir l'hypothèse d'un tableau chronique(5). D'autres signes viennent renforcer cette analyse, notamment l'existence d'une hypertrophie pariétale de la paroi libre ventriculaire droite > 6 mm, d'une dilatation de la veine cave inférieure à plus de 2 cm mais conservant une variation inspiratoire, ainsi qu'un graphisme particulier du flux Doppler pulsé sur la chambre de chasse ventriculaire droite associé à un temps d'accélération < 100 ms et une courbe descendante biphasique en méso- et télésystole (figure 2 et tableau). Figure 2. Graphisme du flux pulsé pulmonaire fréquemment rencontré en situation d’HTAP et de CPC chronique. Incidence de HTAP après un événement embolique À l'issue d'un premier événement thromboembolique, l'incidence d’une l'HTAP fixée dépistée en échographie-Doppler apparaît relativement rare. Si l'on retient comme valeur-seuil la notion d'une PAP systolique > 45 mmHg ou d'une PAP moyenne > 25 mmHg, Pengo dans ses travaux de 2004 note une incidence de 1 % à 6 mois, 3,1 % à 12 mois, 3,8 % à 2 ans(5). Sur une série de plus de 200 EP suivies sur plus de 10 ans, la courbe d'incidence d'une HTAP au-delà de la 2e année prend un aspect en plateau. Cet auteur retrouve comme facteur prédictif la notion d'EP préexistante, l'importance du défect de perfusion pulmonaire, le jeune âge au moment de survenue de l'épisode embolique ainsi que le caractère idiopathique de la maladie thromboembolique.   Comment prédire la persistance d'une HTAP en cas de cœur pulmonaire aigu secondaire à une EP ? Les travaux de Ribeiro(6) ont montré, chez des patients victimes d'EP sans signe d'intolérance hémodynamique clinique mais accompagnée de signes échographiques de dysfonction ventriculaire droite, que la valeur prédictive positive à court terme des signes échographiques est relativement faible. En revanche, l'absence de ces signes de dysfonction ventriculaire droite se traduisait en situation aiguë par une évolution pronostique tout à fait favorable puisque, dans sa série, la valeur prédictive négative est de 100 %. Par un monitoring échographique sur une durée d’un an, Grifoni(7) a pu montrer que la stabilité des chiffres de PAP systolique pouvait être considérée comme acquise à l'issue d'une période de 6 semaines après le diagnostic initial de l’EP. À un an, la persistance d'une HTAP après l'événement embolique initial a été corrélée à un âge > 70 ans ainsi qu'à un niveau PAP systolique > 50 mmHg observé lors de la prise en charge initiale. La valeur pronostique sur le long terme des signes de dysfonction ventriculaire droite dans le cadre du CPC postembolique reste controversée, contrairement à l’HTAP primitive où elle est le principal facteur pronostique. L'élément pronostique dominant sur le long terme devient alors la cause de la maladie thromboembolique avec un risque bien évidemment dominé par les étiologiques néoplasiques plus que l’évolution de la dysfonction du ventricule droit pour son propre compte(8,9).   Devant une HTAP, l’écho fait-il le diagnostic étiologique ? Existe-t-il des indicateurs échographiques pour séparer les étiologies thromboemboliques des autres? McConnell, en avançant cette particularité géométrique et sur le comportement de la fonction contractile du ventricule droit en situation de CPC aigu, s'était appuyé sur une analyse différentielle par rapport aux HTAP primitives(3). Dans ces dernières, l'hypokinésie de la paroi libre du ventricule droit est, en effet, moins prononcée mais touche l'apex, lequel est respecté, voire hypercontractile dans l’EP. Nous avons vu que la valeur diagnostique de ce signe était très discutée. D'autres auteurs ont tenté une approche basée sur la différence de pression pulsée selon la nature embolique ou non embolique de l’HTAP. À niveau de PAP systolique équivalent, et donc de vélocité maximale de la fuite tricuspide, la valeur de la PAP diastolique, et donc du flux d’IP, est beaucoup plus élevée dans les HTAP primitives que dans le CPC postembolique. Un rapport PAP pulsée/PAP systolique > 0,8 signe une origine embolique, dans une série de 60 patients. Conclusion   Si l'échocardiographie permet de dépister efficacement de façon non invasive une HTAP, elle différencie de façon fiable les formes aiguës et chroniques, et fournit des indices pronostiques à court terme. Toutefois, l’échocardiographie ne permet pas à elle seule de déterminer l’origine embolique des HTAP ; cette évaluation ressort de l’utilisation con-jointe de la scintigraphie pulmonaire de perfusion et de l’angioscanner.

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