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Études

Publié le 30 avr 2015Lecture 5 min

Chez qui et pourquoi traiter l’HTA sans inhibiteur du SRAA

É. MILLARA, Paris

Le système rénine-angiotensine (SRAA) est l’un des principaux acteurs de la régulation de la pression artérielle et de l’homéostasie du sodium. L’activation du SRAA élève la pression artérielle par des mécanismes impliquant à la fois la vasoconstriction induite par l’angiotensine II et la rétention sodée stimulée par l’aldostérone(1). Toutefois, l’activation du SRAA n’est pas constante chez les hypertendus et sa réactivité se modifie avec le vieillissement.

SRAA : moins actif après 65 ans Plusieurs études observationnelles ont rapporté une activité de la rénine plasmatique et des taux d’aldostérone diminués chez les sujets à partir de 65 ans, normotendus et hypertendus. L’une d’entre elles a identifié une réduction de 66 % du taux d’aldostérone et de 54 % de l’activité de la rénine plasmatique en position debout chez des octogénaires normotendus, par comparaison à de jeunes adultes(2) (figure 1). L’excrétion urinaire de l’aldostérone est également diminuée chez les sujets âgés(1). En conséquence, la réponse du SRAA aux stimulations par l’orthostatisme, la restriction sodée, la déplétion volumique ou à l’inhibition par une expansion volumique, est plus faible en valeur absolue que chez le sujet jeune(1). Figure 1. Activité rénine plasmatique (PRA) et taux plasmatique d’aldostérone en fonction de l’âge chez des sujets sains normotendus recevant un régime non restrictif en sel(1). PAS : plus difficile à contrôler La pression artérielle systolique (PAS) est fortement corrélée au risque et aux événements cardiovasculaires, et la pression pulsée (différence entre PA systolique et diastolique) constitue aussi un facteur de risque indépendant. Or avec l’âge, l’incidence de l’hypertension systolique augmente, pour atteindre 94 % après 50 ans, tandis que la PAD tend à diminuer régulièrement(3). Ainsi, chez la personne âgée (> 65 ans), la stratégie antihypertensive doit-elle autant que possible cibler sélectivement la PAS, tout en évitant une baisse majeure de la PAD.   Certaines hypertensions ne répondent pas à l’inhibition du SRAA Dans l’étude LIFE, 48 % des patients n’atteignaient pas le contrôle tensionnel avec une association ARAII/thiazidique(4). Les hypertensions à rénine basse représenteraient 30 % des hypertensions artérielles essentielles, et chez ces patients, un blocage du SRAA n’est pas nécessairement l’option thérapeutique la plus pertinente. Les patients ayant une déplétion sodée, recevant par exemple des diurétiques, pourraient même voir leur risque cardiovasculaire augmenté par un blocage du SRAA. Dans les hypertensions à rénine basse, les diurétiques natriurétiques et les antagonistes calciques sont les hypertenseurs les plus à même de ne pas générer d’augmentation réflexe de la rénine(3).   Diurétiques thiazidiques et antagonistes calciques : une alternative séduisante Il a en effet été observé que les hypertensions à rénine basse sont plus sensibles aux antagonistes calciques ou aux diurétiques qu’aux ARAII(3). Les sujets de race noire et les sujets âgés, parmi lesquels est rencontrée une prévalence élevée d’hypertension à rénine basse, répondent également mieux aux antagonistes calciques et aux diurétiques. Ces observations sont concordantes en Europe et aux États-Unis. Dans l’étude ALLHAT, chez les patients de race noire, la PAS diminuait de manière plus prononcée avec le diurétique qu’avec l’IEC (-7,7 vs -2,5 mmHg au cours de la 1re année). Dans une étude portant sur des patients âgés hypertendus naïfs de traitement, les diurétiques et les antagonistes calciques étaient plus efficaces sur la PAS que les IEC (-13 et -15 vs 8 et 5 mmHg, respectivement)(3). Une métaanalyse de 80 essais contrôlés et randomisés a étudié l’efficacité sur les chiffres tensionnels à 8-12 semaines de 16 molécules antihypertensives disponibles en France(5). Elle conclut que les diurétiques permettent la baisse la plus marquée de la pression artérielle systolique, notamment l’indapamide, un sulfonamide thiazide-like (-22,2 mmHg en moyenne par comparaison aux valeurs de base). La réduction de la diastolique était similaire pour toutes les classes thérapeutiques, d’environ 10 à 11 mmHg. Chez la plupart des patients, la monothérapie se révèle insuffisante, et l’association d’un antagoniste calcique et d’un diurétique est alors pertinente. L’association fixe indapamide/amlodipine a fait l’objet d’une récente étude prospective chez des patients ayant une pression artérielle supérieure à 140/90 mmHg (en moyenne 160,2/97,9) sans traitement ou sous antagoniste calcique seul(6). Après 45 jours, la PAS moyenne a baissé de 28,5 mmHg et la PAD de 15,6 mmHg et le contrôle tensionnel était obtenu chez 85 % des patients.   Bénéfice égal sur la mortalité et supérieur sur les IDM et les AVC Une métaanalyse de quatre études contrôlées et randomisées, englobant plus de 30 000 patients a évalué l’efficacité des associations antagoniste calcique/diurétique sur la pression artérielle et sur les événements cardiovasculaires à long terme(7). Elle rapporte une réduction de 17 % des infarctus du myocarde et de 23 % des AVC, significativement supérieure aux autres associations testées, et une baisse de 11 % de la mortalité globale et cardiovasculaire, similaire à celle observée avec les autres bithérapies (figure 2). Tous les diurétiques ne sont pas équivalents : alors que l’hydrochlorothiazide est associé à une surmortalité comparé au placebo, les thiazides-like (chlorthalidone et indapamide) sont associés à une réduction de la mortalité(3). À la différence de l’HCTZ, l’indapamide est associé à une réduction sélective de la PAS et de la pression pulsée ainsi qu’à une augmentation de la compliance artérielle(3). En outre, les diurétiques sont avec les antagonistes calciques les antihypertenseurs les plus favorables en termes de pression centrale aortique(8). L’amlodipine est un antagoniste calcique de 3e génération, de longue durée d’action. Son action sur la pression centrale aortique constitue la pierre angulaire de ses effets bénéfiques à long terme sur le plan des événements cardiovasculaires et de la fonction rénale(9). Figure 2. Mortalité globale (A), mortalité cardiovasculaire (B), infarctus du myocarde (C) et AVC (D) : antagoniste calcique + diurétique vs autre association(10).  En pratique   Tous les hypertendus ne répondent pas aux inhibiteurs du SRAA. Chez les patients âgés (> 65 ans), les patients de race noire, les hypertendus ayant une rénine basse ou une hypertension systolique isolée, l’association thiazide-like/amlodipine constitue une alternative efficace sur les chiffres tensionnels et sur le pronostic, listée parmi les associations préférées par les recommandations européennes en raison d’un niveau de preuve élevé issu d’essais thérapeutiques spécifiques.  

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