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Vasculaire

Publié le 15 mar 2018Lecture 11 min

Désobstruction endovasculaire des occlusions artérielles aiguës, sub-aiguës et chroniques - La thrombectomie mécanique par le système ROTAREX®

Dionyssios PONGAS, Jean-Marc PERNES, pôle cardiovasculaire interventionnel 92, Hôpital Privé Antony

Par définition, une occlusion artérielle est considérée comme chronique lorsque l’on estime son ancienneté supérieure à 3 mois ; elle est dite « aiguë » si elle date de moins de 14 jours et « sub-aiguë » entre ces 2 bornes (entre 15 jours et 3 mois). Lorsque l’indication clinique de revascularisation est retenue, la prise en charge contemporaine privilégie les stratégies endovasculaires au détriment de la chirurgie traditionnelle. Devant une occlusion artérielle aiguë ou sub-aiguë, le but de la prise en charge endovasculaire est d’ouvrir le vaisseau, d’éliminer le thrombus tout en évitant l’embolisation distale, et de « fixer » par stenting la lésion obstructive athéromateuse sous-jacente, habituelle en présence d’une thrombose in situ.

La problématique Ce mécanisme physiopathologique est de loin le plus fréquent (90 % contre 10 % pour l’origine embolique). Mais la resténose intrastent – et la ré-occlusion qui la complète – demeure le talon d’Achille de la revascularisation endovasculaire par angioplastie stenting et s’avère directement liée à la longueur des endoprothèses implantées. La thrombectomie mécanique apparaît comme une technique susceptible de diminuer le taux d’implantation d’endoprothèses. Fondamentalement destinée au traitement des occlusions aiguës et sub-aiguës, son rationnel est de pallier les limites d’efficacité des moyens plus conventionnels d’élimination et/ou d’extraction du thrombus (thrombolyse in situ, thromboaspiration manuelle par succion). La thrombectomie peut être pharmacomécanique, associant au sein d’un même cathéter (système AngioJet™, Boston Scientific) l’infusion de molécules fibrinolytiques et, via un générateur, l’injection à très haute vitesse (400 km/h) de jets de sérum salé créant, par effet Venturi, une dépression permettant l’aspiration du matériel thrombotique fragmenté. Elle peut être aussi exclusivement mécanique, en utilisant un procédé rotationnel tel que le cathéter développé par Straub Medical, le ROTAREX®, qui va être étudié dans cet article. Ce dispositif représente une option thérapeutique permettant de recanaliser rapidement des lésions aiguës et sub-aiguës présentant une charge thrombotique importante. Il peut aussi être utilisé dans certaines occlusions chroniques. Principe de fonctionnement du cathéter ROTAREX® (straub medical) Le système ROTAREX® (figures 1 et 2) est composé d’un moteur, d’un cathéter qui sera monté sur un guide 0,018’’ en position intraluminale (la position intraluminale du guide peut éventuellement être confirmée par une injection à l’aide d’un ballon coaxial) et d’une poche reliée au cathéter. Le cathéter du ROTAREX® associe d’une part une « tête » rotative (40 000 à 60 000 tpm) et, d’autre part, une hélice sur toute sa longueur elle-même connectée au moteur par couplage magnétique. La « tête » rotative va réaliser une athérectomie sans endommager la paroi vasculaire et va permettre une fragmentation du matériel athérothrombotique. Figure 1. L’ensemble ROTAREX®. A : fixation du cathéter sur la poignée motorisée (flèche bleue) ; B : boîtier d’activation (flèche bleue), poignée reliée à la poche extérieure ; C : schéma de l’extrémité proximale du cathéter. Figure 2. Extrémité proximale (intravasculaire) du ROTAREX®. A : zone d’athérectomie (flèche bleue) et zone de fenêtre de fragmentation et macération (flèche rouge) ; B : vis sans fin permettant le transport des débris ; C : extrémité distale du cathéter ; D : vis d’Archimède. Par la suite, la rotation rapide de l’hélice le long du cathéter qui fonctionne selon le principe de la vis d’Archimède va engendrer une pression négative permanente à l’intérieur du cathéter (performance de succion de 0,66 ml/s pour le modèle 6 F et 1,5 ml/s pour le modèle 8 F) qui va aspirer le matériel athérothrombotique et le transporter vers une poche extérieure. À noter que l’occlusion doit être franchie doucement par le cathéter, associé à des petits mouvements de va-et-vient. Ces actions combinées vont permettre d’extraire le matériel occlusif thrombotique ou athérothrombotique, même assez ancien, (par exemple, situé au sein d’occlusions chroniques), sous-tendant ainsi son intérêt dans cette indication. Ainsi, il peut démasquer la lésion coupable avec la perspective d’une réduction de la longueur de la zone à traiter en se limitant à un stenting focal de la lésion coupable. B. Freitas et al.(1) ont rapporté l’expérience du ROTAREX® au sein de l’équipe de Leipzig sur une période de 8 ans (2005-2013) ; 525 patients présentant des lésions iliaques, fémorales ou poplitées aiguës ou sub-aiguës (< 3 mois) constituaient la cohorte. Le taux de succès technique défini comme la recanalisation sur toute la longueur de la lésion avec une sténose résiduelle < 50 % après passage du ROTAREX® a été de 97,7 %. Parmi ces patients, 27,2 % ont bénéficié d’une thrombectomie mécanique seule, 39,2 % d’une thrombectomie mécanique associée à une angioplastie au ballon et, enfin, 28,6 % ont eu une angioplastie avec pose de stent, qui dans la plupart des cas n’était qu’un stenting focal (21,7 %). En effet, un stenting extensif n’a été nécessaire que chez 6,9 % des patients. Le taux d’événements indésirables en intrahospitalier était de 6,9 %. Le taux de TLR était de 2,5 % et d’amputation majeure de 1,1 %. Parmi les complications, les taux d’embolies distales, de dissections et de perforations liées au matériel étaient respectivement de 5 %, 0,4 % et 1,1 %. D. Scheinert(2) rapporte les résultats globaux de l’équipe de Leipzig (incluant ceux de Freitas) sur l’emploi du ROTAREX® chez 1 200 sujets dont 678 (56 %) avaient une occlusion chronique (longueur moyenne de 12 cm). Il a rapporté le même taux de succès technique immédiat (95 %) : emploi exclusif du ROTAREX® (21 % des cas), angioplastie complémentaire au ballon (35 % des cas), et taux de stenting provisionnel (29 %), et seulement moins de 10 % de stenting étendu ; à 1 an, le TLR était à 10 %. L’un des autres avantages, mis en avant par les équipes d’outre-Rhin, particulièrement convaincus de l’intérêt de la méthode – conviction éventuellement stimulée par le remboursement du consommable (-2 000 euros) et de l’acte, valorisé par rapport à l’angioplastie avec stent… contrairement à la France –, serait la facilitation de l’efficacité des ballons actifs, par l’incorporation accrue du principe actif (paclitaxel) dans la paroi artérielle après élimination du dépôt athérothrombotique la tapissant. F. Scheer et al.(3) rapportent un taux de resténose à 6 mois de 7 % chez 29 patients traités pour une occlusion longue par l’association exclusive du ROTAREX® au ballon actif InPact™ (Medtronic). Dans quelles localisations utiliser le système ROTAREX® ? Deux modèles sont disponibles, en 6 F et 8 F, respectivement pour des vaisseaux de 3 à 5 mm et de 5 à 8 mm. Il peuvent être utilisés au niveau des artères natives (iliaques, fémorales, poplitées), avec des stents ou endoprothèses couverts et lors de pontages. Contre-indications – Impossibilité de franchir l’occlusion avec le guide ; – Position sous-intimale du guide ; – Taille du vaisseau < 3 mm ; – Artère massivement calcifiée. Conclusion L’utilisation d’un système de thrombectomie mécanique comme le ROTAREX® permet d’extraire le matériel occlusif du vaisseau sans endommager la paroi vasculaire, en diminuant le risque d’embolisation distale et en réduisant la longueur d’implantation des endoprothèses. L’apport de la thrombectomie mécanique pourrait s’avérer indiscutable : – dans les occlusions artérielles aiguës et sub-aiguës ; – dans les occlusions chroniques à condition qu’elles ne soient pas trop chroniques… en d’autres termes pas trop anciennes (< 1 an ?). L’interrogatoire, l’histoire clinique et la sensation tactile de plus ou moins grande facilité de franchissement par le guide sont des éléments décisifs à intégrer dans l’appréciation de l’ancienneté. – dans les occlusions intrastent en cas de suspicion de thrombus et cela qu’elles soient aiguës, sub-aiguës ou chroniques avec un taux de succès procédural de 96,4 % et un TLR de 12,7 % ; – sur des artères non massivement calcifiées. Il faut confirmer par des études factuelles l’efficacité des ballons actifs en complément et s’affranchir du rapport immédiat coût/efficacité (défavorable au départ mais possiblement meilleur à long terme si l’hypothèse du leave nothing behind se confirmait). Cas clinique 1 ➜ Mr G. est un homme de 52 ans qui se plaint depuis environ 6 mois d’une claudication du membre inférieur gauche, survenant pour un périmètre de marche de 300 mètres, handicapant son confort de vie (stade II de Rutherford). L’échographie-Doppler conclut à l’occlusion proximale isolée de l’artère fémorale superficielle gauche avec une réentrée au niveau du canal de Hunter et un indice de pression systolique à 0,7. Il est adressé pour une tentative de recanalisation. L’angiographie préthérapeutique, réalisée par voie fémorale droite, confirme les données de l’écho-Doppler (occlusion ostiale > 20 cm de l’AFS : TASC D) et objective un lit d’aval jambier de bonne qualité avec 3 axes perméables. Un désilet 8 F est positionné dans l’artère fémorale commune gauche, et après franchissement aisé de la bifurcation aortique, l’occlusion ancienne est franchie avec certitude en intraluminal par un ensemble guide CONNECT® FLEX de 0,018’’ (Abbott) + cathéter 4 F Berenstein (Cordis). Deux passages du ROTAREX® 8 F sont pratiqués, rétablissant le flux antérograde en moins de 10 min, au prix de l’aspiration de 100 cm3 ; la zone inférieure a été dilatée initialement au ballon nu de 5 mm, suivie d’une l’inflation prolongée (3 min) d’un ballon de 5 mm à élution médicamenteuse (paclitaxel, InPact™Medtronic) pour un résultat jugé satisfaisant. Sur toute la partie intermédiaire de l’occlusion initiale, aucun geste complémentaire n’est proposé. La persistance d’un résultat sub-optimal après angioplastie au ballon nu au niveau de l’origine de l’occlusion, justifie l’implantation d’un stent de 6 x 40 mm à élution médicamenteuse (ELUVIA™, Boston Scientific). Le résultat angiographique et hémodynamique immédiat est bon, et à 6 mois, le patient reste asymptomatique (photo 1, A à L). A : occlusion proximale fémorale superficielle gauche ; B : réentrée et sténose sous-jacente ; C et D : lit d’aval normal poplité et infrapoplité. E : recanalisation intraluminale par un guide CONNECT® FLEX 0,018’’ ; F : approche du cathéter de thrombectomie mécanique ; G et H : résultat après 2 passages. I : expansion d’un ballon actif au paclitaxel ; J : bon résultat dans la moitié inférieure de l’occlusion initiale ; K : sténose résiduelle proximale ; L : aspect poststent actif ELUVIA™. Cas clinique 2 ➜ Mr C. est un homme âgé de 71 ans, qui avait bénéficié 4 ans auparavant d’une angioplastie bilatérale de l’artère fémorale superficielle avec mise en place de stents nus. Après un long intervalle libre sans symptômes, il décrit à nouveau depuis 2 mois, une gêne à la marche survenant au bout de 200 m du côté gauche (stade Rutherford III), impactant sa qualité de vie. Le Doppler évoque une occlusion totale, « semi-récente » complète de l’AFS, débutant dès l’ostium avec une réentrée au niveau du canal de Hunter en aval des stents. Une proposition de revascularisation endovasculaire avec thrombectomie mécanique est retenue, après que l’angiographie ait confirmé le diagnostic anatomique (TASC D, avec réentrée au Hunter et lit d’aval normal). Un désilet 8 F est placé à l’entrée de l’artère fémorale gauche après cross-over aortique et la recanalisation intraluminale est obtenue par cet accès à l’aide d’un guide long 0,018’’ CONNECT® FLEX ; un cathéter 8 F ROTAREX® est alors approché au contact de l’occlusion, puis activé, avec une progression continue et progressive dans le sens antérograde, depuis l’origine jusqu’à la sortie de l’occlusion, au travers des stents. Trois passages sont nécessaires avant de rétablir un flux satisfaisant (durée totale 14 min, 250 cm3 aspirés) ; l’inflation d’un ballon 6 x 200 mm est pratiquée à plusieurs reprises en regard de l’ensemble de la zone primitivement occluse, suivie de celles, prolongées (3 min) de 2 ballons actifs au paclitaxel InPact™ (6 x 120 mm), notamment en intrastent. Le résultat est considéré comme satisfaisant, aucun matériel supplémentaire n’est implanté, et le patient est toujours asymptomatique à 8 mois (photo 2, A à L). A : oblitération ostiale de la fémorale superficielle gauche (FSG) ; B : reperméation au niveau du canal de Hunter en aval des stents ; C : passage du cathéter ROTAREX® ; D : aspect angiographique après le 1er passage. E et F : aspect angiographique après un second franchissement ; G : inflation proximale d’un ballon « actif » InPact™ ; H : résultat immédiat. I : sténose résiduelle intrastent ; J : inflation d’un ballon actif ; K et L : aspect final. Cas clinique 3 ➜ Mme L. âgée de 65 ans a eu une angioplastie de l’ostium de l’artère fémorale superficielle gauche il y a 3 ans et se plaint depuis 4 mois d’une claudication invalidante. Les explorations non invasives par écho-Doppler ont mis en évidence une occlusion ostiale de l ’artère fémorale superficielle gauche. L’intervention a été réalisée par voie fémorale droite (photo 3, A à F) après mise en place d’un désilet 6 F de 45 cm. Le franchissement intraluminal de l’occlusion est effectué avec un guide 0,18’’ CONNECT® FLEX à l’aide d’une sonde de type Berenstein 4 F (Cordis). Suite au passage du système de thrombectomie ROTAREX® (après 3 passages), il est mis en évidence non pas une hyperplasie intimale au niveau du stent de l’ostium de l’artère fémorale superficielle mais une évolutivité athéromateuse en aval avec une lésion serrée au niveau du canal de Hunter, sans doute responsable de la thrombose extensive qui a bénéficié de l’implantation de 2 stents actifs ELUVIA™ 6 x 60 mm. Photos 3. A, B, C : occlusion intrastent ostiale de l’artère fémorale superficielle gauche (flèche bleue) ; D, E, F : après thrombectomie par ROTAREX® se démasque une lésion serrée au niveau du Hunter (flèche rouge) traitée par 2 stents actifs ELUVIA™. Cas clinique 4 ➜ Mr R. est un patient âgé de 62 ans qui présente une claudication très serrée du membre inférieur gauche avec un périmètre de marche < 50 mètres sur une occlusion de l’artère fémorale superficielle gauche et de la poplitée sous-articulaire avec un seul axe de jambe (péronière). L’occlusion de la fémorale superficielle avait pu être recanalisée par un double abord antérograde et rétrograde avec la mise en place d’un stent SUPERA® (Abbott) 6 x 200 mm (photo 4, A à E). Photo 4. A, B, C, D, E : occlusion massivement calcifiée de l’artère fémorale superficielle gauche traitée par la mise en place d’un stent SUPERA®. Échec de recanalisation de l’occlusion poplitée. L’occlusion poplitée ainsi que les lésions des axes de jambe (occlusion de la tibiale antérieure, sténose serrée calcifiée du tronc tibio-péronnier) n’avaient pu être traitées. Le patient a présenté à 1 mois du geste une ré-occlusion complète de la zone recanalisée. La procédure (photo 4, F à K) a été de nouveau réalisée par un double abord (tibiale antérieure-fémorale gauche), avec recanalisation par voie rétrograde de l’occlusion à l’aide d’un guide 0,18’’ CONNECT® FLEX qui a été récupéré dans le désilet fémoral 8 F à l’aide d’un lasso. Le système de thrombectomie ROTAREX® permet de récupérer du matériel thrombotique semi-récent. Un stent de type EXPERT Pro 5 mm (Abbott Vascular) est mis en place dans le tronc tibio-péronier et la poplitée. L’inflation d’un ballon de 6 x 200 mm sur toute la longueur de l’artère fémorale superficielle permet la migration embolique dans la péronière basse grâce à une thromboaspiration manuelle par succion à l’aide d’un cathéter 4 F. F : occlusion intrastent de l’artère fémorale superficielle gauche ; G : abord rétrograde tibial antérieur ; H : après récupération du guide ayant franchi l’occlusion poplitée et fémorale par voie rétrograde, déploiement d’un stent dans l’axe poplitée-tronc tibio-péronier ; I : inflation d’un ballon sur toute la longueur de l’artère fémorale superficielle après thrombectomie par ROTAREX® ; J, K : résultat final.

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