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Complication

Publié le 30 nov 2014Lecture 7 min

Perforation myocardique par une sonde de stimulation ou défibrillation - Comment la gérer ?

N. LELLOUCHE, N. ELBAZ, Hôpital Henri Mondor, Créteil

La perforation myocardique par une sonde de stimulation ou de défibrillation est une complication rare. Toutefois, elle peut mettre en jeu le pronostic vital du patient et son diagnostic doit être évoqué devant des symptômes variés, allant du patient asymptomatique jusqu’à un tableau de tamponnade avec arrêt cardiorespiratoire. Son incidence est de 0,4 % à 15 % des implantations selon la manière dont le diagnostic est fait. Le taux est plus élevé en cas de recherche systématique par un scanner cardiaque. 

Le nombre de perforations varie selon la position de la sonde, plus élevé pour les sondes atriales et pour les sondes en position apicale du ventricule droit ou en position latérale de l’oreillette droite par rapport à une position septale. Des perforations sont aussi décrites avec les sondes implantées dans le sinus coronaire, par dissection et effraction de la paroi vasculaire. Un troisième facteur identifié est l’utilisation, plus importante depuis les années 2000, de sondes à fixation active par rapport aux sondes à fixation passive, mais au profit d’une diminution des déplacements de sonde. Enfin, la survenue de cette complication est en relation directe avec la technique d’implantation et l’expérience de l’implanteur. La prise en charge va dépendre du tableau clinique et de la conséquence de la perforation sur le fonctionnement de la prothèse. Présentation clinique On distingue deux formes cliniques de perforation myocardique sur sonde : • aiguë, survenant dans le mois suivant l’implantation ; • tardive, survenant au-delà d’un mois après l’implantation. Cette distinction est importante car le mécanisme et le tableau clinique sont différents. Toutefois, l’histoire naturelle de la perforation myocardique sur sonde est mal connue et il est possible qu’une minime perforation aiguë non diagnostiquée puisse évoluer et se présenter sous la forme d’une perforation chronique. Perforation aiguë Celle-ci survient en général dans les 48 heures qui suivent l’implantation de la sonde. Le tableau clinique classique est celui d’un épanchement péricardique. Il peut aller de la simple douleur péricarditique jusqu’à un tableau de tamponnade aiguë. D’autres formes de perforation aiguë ont été décrites : hémopneumothorax par perforation du myocarde puis de la cavité pleurale ; hémothorax controlatéral au site d’implantation de la prothèse, par perforation de la sonde atriale(1) ; perforation aiguë ou subaiguë avec passage de la sonde dans la graisse pleurale sans tamponnade ni pneumothorax. Perforation chronique Le mécanisme de la perforation chronique n’est pas clairement identifié : perforation aiguë passée inaperçue, pression chronique de la sonde sur la paroi myocardique, ou persistance de la force de torsion (torque) de la sonde qui poursuit lentement son trajet au-delà de l’endocarde. Le tableau clinique est tout à fait différent du tableau aigu et la présentation sur un mode péricarditique est assez rare. En effet, la perforation tardive est le plus souvent asymptomatique, de découverte fortuite sur un examen d’imagerie. Cependant, certains signes cliniques peuvent faire évoquer une perforation tardive : asthénie, douleur thoracique atypique, stimulation diaphragmatique, hoquet(2), douleur pleurale ou syncope secondaire à un dysfonctionnement de sonde. Modification des paramètres électriques Quel que soit le mode de présentation clinique, une perforation de sonde peut entraîner des modifications de ses paramètres de fonctionnement. Modification de seuil de stimulation Une élévation brutale du seuil de stimulation voire l’absence de capture doit faire évoquer une perforation de sonde, en contact avec le péricarde. Un signe plus fruste de perforation est l’élévation de seuil de stimulation en unipolaire avec une amélioration en bipolaire. Ce signe correspond à une microperforation avec une électrode distale en contact avec le péricarde alors que l’électrode proximale est en contact avec le myocarde. En pratique, s’il existe un doute pendant la procédure, il est recommandé de tester la stimulation de la sonde en mode bipolaire et unipolaire. Une chute du seuil en unipolaire sera évocatrice d’une perforation et un repositionnement de sonde s’avère nécessaire. Modification de la détection de la sonde Une diminution de la détection ou l’apparition de bruit sur une sonde doit faire évoquer une perforation de sonde.  Modification de l’impédance de sonde Lorsque la sonde perfore le myocarde, elle peut se retrouver dans le péricarde  ou une autre structure thoracique expliquant une possible élévation de l’impédance de sonde. Ainsi une impédance trop élevée (> 1 500 ohms) au moment de l’implantation peut être en rapport avec une perforation myocardique. Toutefois, des modifications du seuil de stimulation ou de détection sont souvent associées et l’impédance peut être peu modifiée. Facteurs prédictifs de perforation Plusieurs études ont évalué les facteurs prédictifs de perforation de sonde postimplantation(3,4). Certains correspondent à des caractéristiques cliniques et peropératoires et sont indépendamment associés à la survenue de perforations et d’autres seraient au contraire plutôt protecteurs vis-à-vis d’une perforation myocardique (encadré). Par ailleurs certains modèles de sondes sont associés à un risque de perforation myocardique. En particulier, la sonde de défibrillation Riata (St Jude Medical) a été associée à un surrisque de perforation (2,5 % des cas)(5), probablement secondaire à l’affinement excessif de l’électrode distale. Ces sondes ne sont plus disponibles mais à l’époque une collerette en silicone avait été placée en bout de sonde pour diminuer ce risque de perforation. Diagnostic de perforation Il convient de différencier le diagnostic de perforation en tant que tel et la conséquence potentiellement létale de la perforation qu’est la survenue d’une tamponnade. Ainsi, lorsqu’une perforation myocardique de sonde est suspectée, le premier examen à réaliser est une échocardiographie transthoracique (ETT) à la recherche d’un épanchement péricardique voire d’une tamponnade. En ce qui concerne la visualisation directe de la sonde et son éventuelle perforation les examens usuels sont : La radiographie de thorax (figure 1), examen de débrouillage qui ne permet pas de faire un diagnostic de microperforation. Figure 1. Radiographie de thorax de face (A) et de profil (B) montrant une perforation de sonde ventriculaire droite avec trajet extracardiaque (flèches rouges). L’échocardiographie peut permettre de visualiser directement la sonde et son trajet extracardiaque mais sa résolution rend difficile la reconstruction en 3 dimensions du trajet précis de la sonde et de nombreuses incidences sont nécessaires pour mieux le visualiser. L’échocardiographie 3D pourrait, dans ce cas, mieux visualiser le trajet de la sonde et diagnostiquer une perforation. Toutefois, l’échogénicité entre le métal de la sonde et le sang rend sa résolution spatiale moyenne.  Le scanner cardiaque est le meilleur examen pour diagnostiquer une perforation sur sonde et évaluer le trajet précis de la sonde perforante (figure 2), notamment grâce à la reconstruction en 3D. Par ailleurs, cet examen permet de faire le diagnostic de microperforation, parfois parfaitement asymptomatique sur le plan clinique et lors du contrôle électrique des sondes(6). Cependant, même avec des scanners multibarrettes, la présence de métal dans les sondes peut produire des artefacts et rendre l’interprétation du trajet de sonde difficile. Figure 2. Image scannographique axiale (A) et en reconstruction 3D (B) permettant de visualiser le trajet précis de la sonde perforante avec reconstruction de l’ensemble du système de stimulation, avec le stimulateur et les deux sondes. Gestion pratique de la perforation La gestion de la perforation va dépendre du tableau clinique. Les deux paramètres à prendre en compte sont la présence d’un épanchement péricardique, qui peut engager le pronostic vital, et les modifications de la fonction de la sonde qui, s’il s’agit d’une sonde ventriculaire chez un patient stimulodépendant peut aussi engager son pronostic vital. Le traitement de la tamponnade se fait le plus souvent en milieu chirurgical avec drainage péricardique, extraction de la sonde perforante et repositionnement de celle-ci, le plus souvent par voie percutanée. Ce drainage peut aussi être effectué par voie percutanée, sur table, en fonction de la tolérance du patient et de l’expérience de l’opérateur. À noter qu’il est extrêmement rare qu’une suture chirurgicale du ventricule droit (VD) soit nécessaire car le plus souvent la zone perforée se colmate spontanément du fait de pression relativement basse dans le VD et grâce aux cellules myocardiques contractiles qui ont tendance à fermer la brèche myocardique. C’est ainsi que sur une perforation sans épanchement significatif, il est tout à fait possible de retirer et repositionner la sonde par voie percutanée en salle de rythmologie, avec un back-up chirurgical. Dans la plupart des cas aucune complication péricardique n’est constatée(7). Enfin, beaucoup plus rarement, en présence d’un hémothorax, un drainage percutané est effectué. Il est à noter que s’il existe une perforation (le plus souvent minime) avec une sonde fonctionnant en mode bipolaire et sans épanchement péricardique, il est tout à fait possible d’adopter une attitude conservatrice et de ne pas réintervenir sur la sonde, en faisant entrer en compte l’âge du patient et le risque infectieux.  Conclusion La perforation myocardique est une complication rare lors de l’implantation de sonde intracardiaque (de 0,4 % jusqu’à 15 % sur des scanners systématiques), mais peut mettre en jeu le pronostic vital du patient. Le scanner est l’examen de référence pour évaluer le trajet de sonde. Le diagnostic précoce est important et le traitement repose sur un drainage péricardique, si nécessaire, et un repositionnement de la sonde, le plus souvent par voie percutanée, si celle-ci n’est plus fonctionnelle. 

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