publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 11 oct 2005Lecture 3 min

Y a-t-il des indications de resynchronisation sans QRS large ?

J.-C. DAUBERT, CHU de Rennes

Si l’on se réfère aux recommandations actuellement publiées (European Society of Cardiology 2005), la resynchronisation cardiaque par stimulation atriobiventriculaire n’est validée que chez les patients répondant aux critères suivants :
• insuffisance cardiaque modérée à sévère (classe NYHA III-IV),
• traitement médical optimal : trithérapie associant, sauf contre-indication ou intolérance, IEC ou sartan, bêtabloquant et antialdostérone,
• dysfonction systolique VG, indiquée par une FEVG < 35 % et un diamètre télédiastolique > 55 mm,
• rythme sinusal et QRS larges >120 ms.

Ce critère de désynchronisation électrique (QRS > 120 ms) était le critère d’inclusion utilisé dans l’étude COMPANION (COmparison of Medical therapy, PAciNg, and defibrillatION in Chronic Heart Failure). Depuis, ont été publiés les résultats positifs de COMPANION, première étude de morbi-mortalité au suivi malheureusement limité (durée médiane de 14 mois). Les résultats de l’étude européenne CARE-HF (CArdiac REsynchronisation in Heart Failure), présentés en hotline à l’ACC en mars 2005, avec un suivi moyen beaucoup plus long (29 mois) lui confère un poids plus conséquent. Cette étude a démontré une amélioration du pronostic, il n’y a plus d’obstacle à reclasser cette indication en niveau I-A. Les experts proposent donc cette resynchronisation biventriculaire (ESC 2005) afin de : • améliorer les symptômes (recommandation classe I, niveau A), • diminuer les hospitalisations (recommandation classe I, niveau A), • diminuer la mortalité (recommandation classe I, niveau B). En revanche, il n’existe aucune recommandation actuelle pour les autres catégories d’insuffisants cardiaques, potentiellement désynchronisés : • patients en rythme sinusal avec QRS « fins » (< 120 ms), • patients peu symptomatiques, et a fortiori asymptomatiques (classe NYHA I-II), • patients déjà stimulés en mode conventionnel ou avec indication classique de stimulation permanente, • patients avec fibrillation atriale, • patients à fonction ventriculaire gauche systolique préservée… Aucune recommandation n’a fait l’objet d’étude contrôlée évaluant le bénéfice clinique de la resynchronisation à moyen ou long terme. Les seules données disponibles proviennent de petites études d’observation aux résultats parfois encourageants, mais qui demeurent très insuffisants pour fonder des recommandations scientifiques.   La durée du QRS reste le seul critère validé d’évaluation de l’asynchronisme Ce critère a été critiqué mais il ne peut aujourd’hui encore en être autrement car les études contrôlées qui ont fondé l’intérêt clinique de ce traitement, étaient toutes basées sur ce critère (MUSTIC, PATH-CHF, MIRACLE, MIRACLE-ICD, CONTAK-CD, COMPANION). On peut toutefois objecter que ce que l’on souhaite corriger en priorité par la resynchronisation n’est pas le trouble de l’activation électrique, mais une anomalie mécanique, de coordination de la contraction et de la relaxation des parois ventriculaires. On sait, de plus, que la corrélation est médiocre entre durée de QRS et asynchronisme mécanique interventriculaire ou intra-VG. Cela vaut en particulier pour les QRS peu élargis (120-150 ms) et, plus encore, pour les QRS dits « fins » (< 120 ms). Dans cette dernière situation, il n’est pas rare de détecter par imagerie fonctionnelle des asynchronismes intra-VG significatifs qui pourraient éventuellement être corrigés par resynchronisation électrique, mais cela a-t-il une pertinence clinique ? Nul ne peut actuellement le dire. La corrélation est meilleure pour les QRS très larges (> 150 ms) qui coexistent habituellement avec une désynchronisation mécanique significative. Mais, même en appliquant ce critère ECG restrictif, le succès clinique reste inconstant. Dans l’expérience rennaise initiale (1994-2000), le taux de répondeurs n’a été que de 73 %. Il est vrai que le critère de jugement était exigent mais réaliste, impliquant qu’à 6 mois le patient soit vivant, qu’il n’ait pas été réhospitalisé et qu’il reste fonctionnellement amélioré. Le taux élevé de non-répondeurs (27 %) traduit-il une sélection imparfaite des patients ou une mauvaise délivrance de la thérapie (position des sondes ventriculaires ; réglage du stimulateur…) ? Probablement les deux, et nos efforts pour réduire ce taux d’échecs inacceptable, doivent porter dans ces deux directions. Pour ce qui concerne la sélection des patients, il semble logique d’évoluer vers des critères électromécaniques, voire mécaniques purs, pour évaluer la désynchronisation cardiaque. Il faut cependant définir auparavant: • les méthodes d’imagerie appropriées, • les critères de désynchronisation les plus pertinents, en particulier en termes de reproductibilité, • les valeurs seuils pour chacun des critères retenus ; puis évaluer leur valeur prédictive sur la réponse clinique à moyen terme par des études contrôlées, en ne se limitant pas à des critères secondaires de remodelage ventriculaire.   En pratique Nous progressons rapidement dans l’identification de critères de substitution, mais il est encore trop tôt pour affirmer qu’il existe des « indications de resynchronisation en dehors d’un QRS large ». Alors, attendons et voyons !

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

Vidéo sur le même thème