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Rythmologie et rythmo interventionnelle

Publié le 13 sep 2005Lecture 6 min

Un stimulateur ou un défibrillateur cardiaque contre-indiquent-ils vraiment une IRM ?

M. CHAUVIN, CHRU de Strasbourg

Si l’on demande une IRM chez un patient implanté d’un stimulateur ou d’un défibrillateur cardiaque, il est très probable qu’elle sera refusée par le radiologue car cet examen est toujours contre-indiqué chez ce type de patients. Certaines unités d’IRM rappellent d’ailleurs cette interdiction par un avertissement écrit, affiché à l’entrée de la salle d’examen. Cette attitude est en accord avec les précautions préconisées dans les manuels d’utilisation des implants qui signalent expressément les risques d’exposition aux agents physiques utilisés lors d’un examen en RMN. De fait, on retrouve dans la littérature ou dans les archives de la Food and Drug Administration des cas de décès observés pendant ou immédiatement après un examen en RMN chez des patients porteurs d’une prothèse active, sans qu’il soit néanmoins prouvé qu’il s’agit bien là des conséquences directes d’interférences.

Puisque les communautés radiologiques, cardiologiques et les constructeurs s’associent pour une telle mise en garde, pourquoi soulever aujourd’hui ce problème ? Tout simplement parce que sont publiés des travaux de plus en plus nombreux, prospectifs et émanant d’équipes internationalement reconnues comme faisant autorité en matière d’interférences électromagnétiques, qui remettent en cause ces mesures de prudence à la condition, il est vrai, de prendre certaines précautions.   Importance du problème Le problème est d’importance : ce sont plus de 30 000 nouveaux stimulateurs cardiaques et autour de 3 500 nouveaux défibrillateurs automatiques qui sont implantés chaque année en France et qui s’ajoutent à ceux qui le sont déjà. Aux États-Unis, il s’agit d’environ 370 000 implants nouveaux par an. Et ces chiffres vont croissant à la faveur des nouvelles indications d’implantations de stimulateurs cardiaques dans l’insuffisance cardiaque et celles des défibrillateurs automatiques en prophylaxie. Par ailleurs, le nombre d’examens en IRM croît également ; par conséquent la probabilité pour qu’un patient implanté d’une prothèse active relève tôt ou tard d’une indication d’IRM est grande. Une estimation rétrospective japonaise a rapporté que dans une longue série de patients implantés, 17 % étaient susceptibles de bénéficier d’une IRM. Certains auteurs nord-américains ont estimé quant à eux que 50 à 75 % de ces patients seront un jour concernés. Il existe donc bien une réelle « demande » de tenir compte des études nouvelles citées plus haut afin de revoir éventuellement le « dogme » de la contre-indication d’une IRM chez un patient implanté d’une prothèse active.   Arguments théoriques Avant d’essayer de répondre à cette interrogation, il convient de rappeler les conséquences, potentielles ou prouvées, in vitro ou in vivo, de l’action des agents physiques utilisés par l’IRM sur un système de stimulation ou de défibrillation implanté. Trois agents physiques sont susceptibles d’avoir des effets délétères : le champ magnétique statique, le champ HF pulsé et le gradient magnétique. Il est important de noter qu’il n’a encore jamais été prouvé que leurs effets aient été responsables de conséquences cliniques graves chez des patients. Le champ magnétique statique peut agir sur l’interrupteur à lames souples qui commande le mode asynchrone des stimulateurs, mode potentiellement arythmogène pour des myocardes altérés. Si plusieurs expérimentations in vitro ont bien confirmé ces effets, elles ont également démontré que les réponses de l’interrupteur sont totalement imprévisibles et variables en fonction du type de stimulateur et de sa position dans l’espace. Le défibrillateur réagit différemment à un champ magnétique statique puisque ses possibilités de traitement sont alors inhibées : il conviendrait par conséquent, au cas où une IRM serait autorisée chez un patient porteur de défibrillateur, de monitorer son ECG durant tout l’examen. Enfin, aucun argument ne permet de penser qu’un champ magnétique, même puissant, peut déplacer une sonde de stimulateur ou de défibrillateur qui n’a aucun composant ferromagnétique. Le champ HF pulsé est susceptible d’accélérer la fréquence d’une stimulation, surtout pour des stimulateurs à fréquence asservie utilisant des microcourants (ventilation minute, par exemple). C’est également le cas pour les stimulateurs double chambre, dont le canal atrial pourrait être leurré par cette fausse « tachycardie » atriale et imposer par conséquent une stimulation ventriculaire à la fréquence maximale programmée : en théorie, cette conséquence serait évitée en programmant un mode temporaire asynchrone. Il a par ailleurs été décrit expérimentalement un échauffement en bout de sonde (jusqu’à 10 – 20° C) responsable éventuellement de brûlures, et par conséquent, d’une augmentation des seuils de stimulation. Mais il est cependant très improbable que la densité d’énergie autour de l’électrode (par ailleurs refroidie in vivo par l’effet de « cooling » de la circulation sanguine) soit suffisante pour provoquer de telles conséquences tissulaires. Le gradient magnétique peut induire des courants dans une sonde de stimulateur ou de défibrillateur jouant le rôle d’antenne. Ces courants, aisément enregistrés expérimentalement, peuvent être suffisamment amples pour avoir trois ordres de conséquences : - un basculement du fonctionnement d’un stimulateur vers un mode de protection, - une inhibition de la stimulation, - une surdétection responsable d’une thérapie inappropriée pour un défibrillateur. Ces trois agents physiques utilisés lors d’un examen en RMN peuvent, bien sûr, associer leurs effets pour provoquer des effets délétères affectant le fonctionnement même des circuits ou la capacité de la pile.   État des connaissances Que deviennent ces arguments (qui plaident plutôt en faveur d’une contre-indication) à la lumière des connaissances actuelles dans ce domaine ? Il est très intéressant de souligner l’évolution des idées au sujet des interférences possibles entre prothèses actives et IRM. Il y a environ une vingtaine d’années, les risques de ces interférences ont d’abord fait l’objet d’hypothèses. Ces dernières ont justifié des recommandations, essentiellement d’ailleurs des contre-indications, bientôt étayées par quelques études in vitro puis de rares études in vivo chez l’animal. Ces risques supposés d’accidents graves d’interférences ont bien entendu freiné considérablement les études cliniques ; les publications sont restées au stade anecdotique de rapport de cas dramatiques de décès accidentels liés au non-respect des contre-indications. Depuis quelques années, on constate que cette attitude, qui visait plutôt à confirmer le dogme de la contre-indication est remise en question, très probablement devant le nombre croissant des indications d’examens en IRM chez des patients implantés de prothèses actives et dont le nombre augmente également considérablement. Des études prospectives, in vitro mais surtout in vivo chez l’homme, ont ainsi été conduites : aucune n’a montré véritablement de conséquences dangereuses des agents physiques d’un examen en IRM chez de tels patients.   Faut-il alors autoriser ces examens dans ces circonstances ? Certainement pas et pour plusieurs raisons : • rappelons qu’un examen en IRM est potentiellement dangereux puisque plusieurs accidents mortels ont déjà été rapportés ; • soulignons également que les études cliniques récentes publiées n’ont porté que sur un petit nombre de patients, ce qui n’est pas suffisant devant le nombre potentiellement important d’examens en IRM auquel il faudra s’attendre si on les autorise ; • remarquons enfin, comme le faisait Gimbel, un auteur d’une de ces études cliniques, que l’on n’a pas démontré l’innocuité d’une technique parce qu’on n’a pas réussi à en montrer les effets délétères, surtout lorsque ces études portent sur un faible nombre de patients.   En pratique   Il est probable qu’il sera possible d’effectuer des IRM chez ces patients implantés dans l’avenir grâce à une meilleure connaissance des risques réels encourus et une adaptation des prothèses à ce type d’examen (ou une adaptation du matériel d’IRM à ces prothèses !). Dans cette attente, l’exposition d’un patient implanté d’un stimulateur ou d’un défibrillateur doit rester très exceptionnelle, et indiquée si vraiment d’autres types d’imagerie ne suffisent pas à l’établissement d’un diagnostic. Dans ce cas, on devra impérativement monitorer le patient durant tout l’examen (on se souvient que le champ magnétique statique inhibera très certainement toute thérapie) : - s’il s’agit d’un stimulateur et que le patient n’est pas dépendant, on choisira la programmation OOO ou OVO ; - si le patient est dépendant d’une stimulation, on programmera un mode asynchrone.

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