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Cardiologie générale

Publié le 06 déc 2005Lecture 4 min

Pour une concertation médico-chirurgicale

F.-T. PELISSIER, Clinique protestante, Caluire

Le plaidoyer de J.-N. Fabiani en faveur de la chirurgie coronaire et basé sur l’étude de plus de 60 000 patients (Cardiologie Pratique n° 735 du 7 septembre 2005), avait fait l’objet d’un « droit de réponse » virulent de la part de M.-C. Morice dans le n° 739 du 5 octobre. Cette polémique n’est pas passée inaperçue, que ce soit à l’hôpital public ou chez les médecins libéraux. Nous publions ici la lettre de notre collègue F.-T. Pélissier, chirurgien cardiaque à Caluire, à l’attention de J.-N. Fabiani.
L’hebdomadaire du cardiologue, fidèle à sa vocation d’information et de libre expression de différents points de vue, vous donne rendez-vous pour de nouveaux débats en 2006.

Monsieur et Cher Maître, Merci pour votre intervention dans Cardiologie Pratique n°735 et télévisuelle. Par la discussion entamée sur les résultats à long terme de la chirurgie coronaire comparée à ceux des implantations de stents coronariens, vous avez mis le doigt sur un problème qui touche la grande majorité des établissements hospitaliers publics et privés en France : le statut de juge et partie des cardiologues coronarographistes et angioplasticiens. Arrêtons de nous voiler la face et comme vous le faites, posons les vraies questions : • Pourquoi n’y a-t-il pas l’ouverture d’un registre des patients dilatés avec un suivi sur plusieurs années permettant d’évaluer le coût de ces techniques vu la cumulation fréquente d’actes d’explorations et de dilatations sur plusieurs années ? • Lors des renouvellements d’autorisation de CEC, la DRASS nous demande tous les cinq ans de publier notre mortalité opératoire à 30 jours et parfois même au-delà. La mortalité en chirurgie coronaire en France est entre 1 et 2 % en moyenne et ce malgré une très nette augmentation de la moyenne d’âge des opérés ces cinq dernières années. Pourquoi la mortalité à 30 jours des implantations de stents actifs n’est-elle pas publiée ? • Pourquoi les patients ne sont pas explicitement informés sur la double antiagrégation plaquettaire qui aujourd’hui est recommandée pendant 18 mois (recul des stents actifs !), cette durée évoluant avec le temps et s’allongeant. Tous les jours, dans toutes les villes de France, des patients qui ont été dilatés et qui sont traités par CLOPIDROGEL et ASPIRINE posent des problèmes de coagulation pour des chirurgies coliques, urinaires, orthopédiques. Pourquoi ces problèmes ne sont-ils pas clairement évoqués par nos confrères ? • Pourquoi les patients ne sont-ils pas informés du risque de thrombose aiguë à distance de ces stents actifs ? Ces thromboses qui entraînent très fréquemment des accidents majeurs, voire des décès. • Pourquoi les coronarographistes angioplasticiens, dans la pratique quotidienne, ne participent pas aux discussions dont parle Madame le Docteur MORICE dans ces « Heart Team Meeting » qui ont lieu dans son centre tous les jours ? !!! Nous savons tous que la décision thérapeutique est prise par le coronarographiste explorateur et « parfois » avec son correspondant, mais jamais avec un chirurgien. Faisons une enquête dans tous les centres français auprès des angioplasticiens et des chirurgiens. Une écrasante majorité de ces centres reconnaîtra que les décisions sont exclusivement celles des coronarographistes angioplasticiens. Le Docteur MORICE dans sa réponse du 5 octobre 2005 (Cardiologie Pratique n°739) évoque ces discussions. Elle sait qu’elles sont indispensables et qu’elles devraient être incontournables dans tous les centres de cardiologie interventionnelle et de chirurgie cardiaque. Oui, le Docteur MORICE a raison, il est impératif que les discussions médico-chirurgicales (incluant les anesthésistes-réanimateurs) existent dans les centres de cardiologie interventionnelle et de chirurgie cardiaque. Les enjeux économiques en terme d’activité et de rémunération, en terme de lobbying économique de la part des grandes sociétés (presque toutes exclusivement américaines) productrices de stents actifs, induisent des choix qui doivent être discutés et partagés. S’il est indéniable que l’angioplastie coronaire a fait d’énormes progrès et a d’excellents résultats, il existe bien un groupe important de patients (tritronculaires à mauvais VG par exemple) qui sont des « patients frontières » pouvant être traités par les deux techniques. L’angioplasticien, juge et partie, vente l’angioplastie et ne peut pas, seul, représenter aussi la chirurgie. • Pourquoi les organismes payeurs (CNAM) ne font pas eux-mêmes une étude économique comparant les coûts d’une prise en charge coronarienne sur une période de cinq ans. Dans le secteur libéral, une chirurgie coronaire a un coût de revient, tout compris, proche de 10 000 €. Le coût d’une triple angioplastie coronaire avec stents actifs et trois jours d’hospitalisation a un coût d’environ 8500 €. Dans les cinq années qui suivent leur chirurgie, nous savons tous que les patients opérés présentent très peu d’événements cardiologiques et il serait temps d’afficher les additions des patients recontrôlés, redilatés… dans les cinq années qui suivent leur primo-implantation. Le problème actuel est l’absence de concertation médico-chirurgicale avant l’angioplastie coronaire. Nous parlons de la concertation qui existe avant toute chirurgie coronaire : médecin référent, cardiologue traitant, coronarographiste, chirurgien et anesthésiste réanimateur participent à la décision. Il faut l’exiger auprès des pouvoirs publics et de la CNAM afin qu’elle soit imposée dans tous les centres cardiologiques. Cette concertation existe d’ailleurs dans les centres anticancéreux entre cancérologues et chirurgiens. Merci encore pour votre courage. Il s’agit bien de courage car vous êtes bien seul dans les hauts responsables hospitalo-universitaires français à avoir pris publiquement une position, autre que strictement médicale, mettant en évidence la trop grande solitude de l’angioplasticien lors du choix thérapeutique d’angioplastie Je me permets d’adresser cette lettre ouverte à plusieurs de nos confrères pour simplement leur faire savoir que certains des chirurgiens cardiaques français sont derrière vous. Croyez, Cher Maître, en l’expression de mon profond respect.

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