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Cardiologie interventionnelle

Publié le 03 juin 2008Lecture 7 min

Peut-on utiliser les stents actifs au cours des syndromes coronaires aigus ?

O. VARENNE, hôpital Cochin, Paris


APPAC
Depuis leur validation initiale dans des groupes de patients très sélectionnés, de multiples études ont étudié l’efficacité des stents actifs auprès de patients ayant des lésions très spécifiques. Si la majorité des indications a été rapidement acceptée par la communauté scientifique sur la base d’études de petite taille ou de registres (longues lésions, petits vaisseaux, occlusions chroniques, troncs communs, etc.), les lésions responsables de syndromes coronaires aigus continuent à susciter doutes et interrogations, en particulier dans l’infarctus du myocarde. Pourtant, les stents actifs ont été largement évalués dans cette indication, avec un nombre de patients inclus dans les études randomisées voisin de celui des études pivots pour le Cypher et le Taxus.

Les réticences à l’égard des stents actifs dans cette indication s’expliquent par deux types de raisons : concernant l’efficacité réelle des stents actifs dans cette indication et leur sécurité. En effet, l’existence d’un thrombus endocoronaire peut limiter la diffusion de la drogue dans la paroi artérielle et donc en théorie en réduire l’efficacité en termes de prévention de la resténose. Par ailleurs, le polymère qui délivre la drogue a été lui-même associé à un risque de thrombose. Ce risque de thrombose suscite de réelles craintes après les déclarations fracassantes de l’ESC 2006 sur un éventuel risque accru de mortalité en cas d’utilisation de ces stents.   Syndrome coronaire aigu sans sus-décalage du segment ST Bien que les mécanismes physiopathologiques conduisant à un syndrome coronaire aigu (SCA) avec ou sans sus-décalage de ST soient identiques, on individualise la prise en charge de ces deux entités. En ce qui concerne les revascularisations pour SCA sans sus-décalage du segment ST, il n’existe pas d’étude spécifique. Cependant, de nombreux patients ont été inclus tant dans les études randomisées que dans les registres.   Le registre RESEARCH Depuis 2002 à Rotterdam, les patients traités par angioplastie reçoivent exclusivement un stent actif, quel que soit le type de lésion en dehors des contre-indications classiques. Dans ce registre RESEARCH et l’analyse à 3 ans, tous les sous-groupes de patients/lésions tirent un avantage de l’utilisation des stents actifs, y compris les patients revascularisés pour SCA sans sus-décalage de ST. Dans l’analyse multivariée associée, l’existence d’un SCA est aussi corrélée à une amélioration du pronostic à 3 ans. Malgré ces données rassurantes et publiées en 2006, l’année 2007 a été marquée par un recul de l’implantation des stents actifs et la montée d’une crainte concernant leur sécurité d’emploi.   Pas plus de thrombose à 4 ans Plusieurs publications ont ainsi mis en avant ce qui était connu depuis le début et même dénoncé en particulier par le Dr Virmani, à savoir le retard de réendothélialisation lié à l’absence de spécificité des drogues antiprolifératives. La métaanalyse des essais randomisés publiés avec le Cypher et le Taxus, ne retrouve pas de majoration du risque de thrombose sur des périodes de 4 ans, mais uniquement un risque accru et modeste de thrombose tardive au-delà d’un an chez les patients traités par stents actifs. Cependant, de nombreuses études ont rapporté des taux de thromboses plus importants qui ont alimenté un débat sur la sécurité des stents actifs, sans reconnaître, que dans la plupart de ces études, les stents actifs étaient implantés dans des populations à risque cardiovasculaire très supérieur à celui des populations témoins ayant reçu les stents nus. Ainsi, dans les registres de Bern et de Rotterdam, les taux de thrombose de stents annoncés de 0,6 % par an (en dehors de la période hospitalière) restent très abstraits en l’absence de groupe comparateur fiable traité par stent nu.   Le registre du Massachussets Plus récemment, la présentation des données du registre de l’utilisation des stents actifs dans l’état du Massachussetts, amène des précisions sur l’efficacité et la sécurité des stents actifs en comparaison avec les stents nus. Dans ce registre réalisé entre 2003 et 2004, 21 019 patients ont été évalué et suivis pendant 2 ans. Parmi ces patients, il a été possible d’identifier un groupe de 1 221 patients ayant reçu un stent actif au cours d’un infarctus sans sus-décalage de ST et de les apparier à 1 221 patients similaires ayant reçu un stent nu. Dans ce registre, les stents actifs permettent une nette réduction du risque de revascularisation de l’artère traitée, de 5,3 % en risque absolu. Par ailleurs, cette amélioration significative s’associe à une réduction non significative de la mortalité de 1,9 % et du risque de nouvel infarctus de 2,4 % (Laura Mauri, congrès de l’American College of Cardiology 2008). On peut reprocher à cette étude de n’être qu’un registre et de n’avoir apparié que secondairement les populations.   L’étude TRITON TIMI 38 Ce n’est pas le cas de cette étude qui a comparé l’efficacité antiplaquettaire du prasugrel dans une vaste population de patients (n = 13 608) coronariens. Dans cette population randomisée entre un traitement par clopidogrel et un traitement par prasugrel, 6 461 patients ont reçu un stent nu et 5 743 patients ont reçu un stent actif (Taxus et Cypher). Le taux de thrombose de stents actifs est rigoureusement le même entre les patients traités par stents actifs et ceux traités par stents nus (2,31 vs 2,41 ; p = NS). TRITON démontre donc sans la moindre ambiguïté que dans cette population de SCA sans sus-décalage de ST mais à risque élevé (troponine élevée), les stents actifs n’augmentent pas le risque de thrombose par rapport aux stents nus. Cette étude montre en outre, que l’utilisation d’un antiplaquettaire plus puissant que le clopidogrel, s’associe à une réduction marquée du taux de thromboses de stents nus et actifs.   Syndrome coronaire aigu avec sus-décalage du segment ST En ce qui concerne les syndromes coronaires aigus avec sus-décalage de ST, il existe dans le sillon de l’étude TYPHOON, plusieurs études randomisées ayant étudié les stents actifs. Dans cette indication, les stents Cypher sont efficaces pour réduire le risque de réinterventions sur le vaisseau cible et sans effet sur la mortalité.   L’étude TYPHOON Le taux de thrombose retrouvé dans cette étude est similaire dans le groupe stent nu et dans le groupe stent actif. Depuis lors, plusieurs métaanalyses ont été publiées, dont celle de Schömig et coll. qui reprend toutes les études dans l’infarctus du myocarde et regroupe 2 300 patients répartis dans les deux groupes. Cette métaanalyse démontre un taux de thrombose de stent similaire dans les deux groupes et une réduction du risque de réinterventions sur l’artère dilatée en faveur des stents actifs. Cette amélioration fonctionnelle sur la resténose clinique est la principale responsable de l’efficacité sur le critère composite composé des décès, des infarctus et des revascularisations. On peut regretter que les études randomisées aient inclus des patients très sélectionnés et à faible risque, comme en témoigne la faible mortalité à un an dans l’étude TYPHOON (2,2 %).   Le registre GRACE À l’inverse, dans le registre GRACE plus proche de la « vraie vie », une différence de mortalité a été rapportée en défaveur des stents actifs. Cependant, du fait même du caractère du registre, les populations recevant un stent nu et un stent actif n’étaient pas similaires et ce déséquilibre a pu influer sur le résultat, dans un sens ou dans l’autre. Dans le registre du Massachussetts déjà cité, les 1 302 patients avec infarctus et sus-décalage de ST traités avec stents actifs ont été appariés à 1 302 patients traités par stents nus. Suite à cet appariement, l’efficacité des stents actifs est à nouveau retrouvée dans ce contexte sur le risque de resténose et de réintervention sur le vaisseau cible, mais de plus, en considérant ces groupes à risque similaire, les stents actifs sont également associés à une amélioration significative de la survie et du risque de réinfarctus. Les études randomisées retrouvent donc bien une efficacité et une sécurité qui semble aller au-delà du simple critère « revascularisation » dans des populations à haut risque, lorsque les groupes « stent actif » et « stent nu » sont de risque comparable.   En pratique   Les syndromes coronaires aigus et l’infarctus du myocarde avec sus-décalage de ST représentent un motif fréquent de revascularisation par angioplastie. La place des stents actifs n’est pas encore claire dans ces syndromes, en particulier en l’absence de remboursement. On peut conclure des données publiées ou présentées dans les congrès que l’utilisation des stents actifs dans les syndromes coronaires aigus avec ou sans sus-décalage de ST est possible, efficace et sûre dans le cadre d’une prise d’antiplaquettaire adaptée. En effet, dans le registre PREMIER, l’interruption du clopidogrel 30 jours après l’angioplastie et l’implantation de stent actif, s’associe à une augmentation de la mortalité. Par ailleurs, certains sous-groupes de patients semblent avoir plus de risque que d’autres d’avoir une issue défavorable, tels que les patients ayant des lésions de bifurcation, ou des lésions avec un thrombus volumineux, amenant à ne pas implanter de stents actifs dans ces situations précises. L’implantation de stents actifs peut donc être réalisée dans le cadre de syndromes coronaires aigus avec ou sans sus-décalage de ST dans le cadre de patients et de lésions sélectionnés. L’adhésion des patients au traitement antiplaquettaire et l’absence de cause possible d’arrêt de ce traitement dans l’année suivant l’angioplastie doivent être systématiquement recherchées.

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