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Cardiopathies congénitales

Publié le 07 oct 2008Lecture 10 min

Nouvelles approches médico-chirurgicales de la CIA de l'enfant

J.-B. THAMBO et F. ROUBERTIE, hôpital cardiologique du Haut-Lévêque, Pessac

La fermeture des communications interauriculaires chez l’enfant a largement bénéficié du développement des techniques par voie percutanée depuis ces 10 dernières années. Aujourd’hui les recommandations et les indications sont clairement identifiées et les taux de succès sont excellents avec près de 97 % de réussite selon les séries.

De nos jours, pour les communications qui ne peuvent bénéficier de ce mode de fermeture, la chirurgie propose des solutions très séduisantes. La fermeture par thoracotomie postérieure droite représente, pour les équipes rompues à cette technique, une alternative intéressante qui combine à la fois esthétique et précocité d’intervention avec des résultats identiques à ceux de la classique sternotomie médiane. Elle peut donc être proposée aussi bien pour des CIA ostium secundum larges ou sans berges que pour des formes plus complexes ou avec des anomalies associées. La communication interauriculaire (CIA) est une des pathologies cardiaques congénitales les plus fréquentes. Elle représente la 2e ou la 3e cardiopathie par ordre de fréquence selon que l’on considère la bicuspidie aortique ou non, soit une fréquence de 1 enfant sur 1 500 naissances.   La voie percutanée se développe La chirurgie reste la méthode de référence pour la fermeture de la majorité des CIA, mais la fermeture par voie percutanée est devenue la technique de première intention dans les CIA ostium secundum lorsque certaines conditions anatomiques sont présentes. Depuis 1976 et la première fermeture par voie percutanée réalisée par King, le matériel et les prothèses ont très rapidement évolué et permettent aujourd’hui une utilisation simple avec un taux de réussite qui avoisine les 99 % dans les cas bien sélectionnés (tableau 1, figure 1). Figure 1. Évolution des prothèses de fermeture de communication interauriculaire. A : Sideris buttoned device ; B : Sideris selfcentering buttoned device ; C : Angel Wings ; D : Prothèse d’Amplatzer®, de nos jours la plus couramment utilisée ; E : de gauche à droite deux prothèses d’Amplatz™, CardioSEAL® et STARflex® (fermeture de PFO). Il est tentant d’utiliser la voie percutanée pour occlure des communications de plus en plus larges, mais l’on constate que ce type de fermeture s’accompagne d’un taux d’échec plus important et expose surtout à des complications possibles à plus long terme. Il est donc important, si l’on veut diminuer le taux d’échec de ces procédures et surtout minimiser, voire supprimer les complications potentiellement graves, de bien connaître les critères de sélection et de pratiquer très régulièrement.   Anatomie de la CIA Une CIA est un orifice mettant en relation les deux oreillettes, dont la taille peut varier de quelques millimètres à plusieurs centimètres de diamètre. Mais cet orifice peut être localisé à différents endroits dans le septum interatrial, rendant la fermeture percutanée plus ou moins aisée, voire impossible. On distingue plusieurs types de CIA (figure 2) : - les CIA ostium secundum siégeant en plein milieu du septum, avec des bords souvent bien individualisés, permettant une éventuelle fermeture par voie percutanée ; - les CIA postérieures avec un bord postérieur quasiment absent se prêtent moins bien à une fermeture percutanée en raison de l’absence de bord postérieur sur lequel peut s’ancrer l’occluder ; - les CIA sinus venosus (haut situées près de la veine cave supérieure), anatomiquement proches de la valve aortique sont souvent associées à une anomalie partielle du retour veineux pulmonaire (RVPAp) où tout ou partie des veines pulmonaires droites se jettent dans la veine cave supérieure droite réalisant un shunt gauche-droit ; - les CIA basses ou caves inférieures, situées près de la veine cave inférieure, peuvent être associées à un RVPAp d’une ou de plusieurs veines du poumon droit (abouchement dans la veine cave inférieure : syndrome du cimeterre) ; - les CIA sinus coronaire situés dans la région du sinus coronaire. Figure 2. Différents types de CIA. A : CIA ostium secundum ; B : CIA ostium secundum avec partie inférieure multiperforée ; C : CIA ostium secundum étendue vers le bas du septum ; D : CIA postérieure ; E : CIA haute type sinus venosus avec RVPAp ; F : CIA basse près de la veine cave inférieure. Les trois derniers types de CIA ne se prêtent pas à une fermeture percutanée en raison de leurs relations avec les gros vaisseaux (valve aortique, la veine cave supérieure ou inférieure) et la fréquence des anomalies associées.   Quels examens réaliser pour diagnostiquer une CIA ? L’échographie transthoracique reste l’examen de référence pour poser un diagnostic étiologique précis. Elle permet de préciser le type de communication interauriculaire et d’orienter vers un type de prise en charge. En fonction des signes de surcharge diastolique des cavités droites, elle permet de poser l’indication d’une fermeture. On s’oriente vers une fermeture par voie percutanée ou vers une chirurgie selon le type de communication et le poids et l’âge du patient.   Fermeture par voie percutanée Seules les CIA ostium secundum sont accessibles à une fermeture par voie percutanée à condition que certaines conditions soient réunies telles que la taille du defect, mais également l’existence ou non de berges autour de la CIA (tableau 2, figure 3). Figure 3. Occluder déployé, la prothèse est bien en place. L’échographie transœsophagienne (ETO) reste la technique de choix pour recueillir ces informations, même si l’échographie 3D voire l’IRM peuvent apporter des informations utiles dans la connaissance de ces communications (figure 4). Figure 4. Visualisation d’une CIA en IRM cardiaque. En pratique, le diagnostic et la sélection des patients sont réalisés à partir de l’échographie transthoracique. L’ETO n’est réalisée qu’au moment de la procédure, sous anesthésie générale, pour ne pas soumettre le patient plusieurs fois à ce type d’examen souvent traumatisant ou nécessitant une anesthésie générale. Il est alors procédé à l’analyse minutieuse des berges (figure 5) et à la mesure du diamètre étiré de la CIA (figure 6) qui est le temps primordial pour définir la solidité des berges, l’épaisseur du septum interauriculaire (SIA) et sa mobilité pour choisir de manière précise la taille de la prothèse. Il convient de ne pas sous-dimensionner l’occluder pour éviter une embolisation mais aussi de ne pas trop le sur-dimensionner, comme cela est souvent de mise dans les larges defects, afin d’éviter le risque d’abrasion de l’aorte ou du toit des oreillettes par la prothèse par effet de « scie circulaire » (figure 7). L’absence de berge postérieure ou inférieure et/ou l’existence d’une large communication (hauteur du septum – diamètre de la CIA < 14 mm) sont des facteurs prédictifs d’échec ou de complication et doivent conduire le patient à la chirurgie. L’absence de berge antérieure n’est, en revanche, pas une situation rédhibitoire. Il est en effet possible de proposer une occlusion en sur-dimensionnant légèrement la prothèse pour lui faire chevaucher l’aorte (figure 8). Toute non-indication de fermeture par voie percutanée de ces CIA ostium secundum nous conduit à proposer une chirurgie chez ces patients. Figure 5. ETO visualisation des berges. A : Coupe horizontale. Détermination des berges para-aortiques antérieures (AN) = distance entre l’anneau aortique et le defect et de la berge postérieure (P) = distance entre le defect et le mur postérieur de l’oreillette. B : Dans le plan longitudinal, détermination de la berge supérieure (S) = distance entre le defect et le la veine cave supérieure et de la berge inférieure (I) = distance defect et veine cave inférieure. Figure 6. Mesure du diamètre étiré de la CIA à l’aide d’un ballon de mesure. Figure 7. Occluder déployé dans la CIA. (d’après Amin Z et al. Catheter Cardiovasc Interv 2004 ; 63 (4) :496-502). A : On note la proximité de la paroi libre des deux oreillettes et du bord de la prothèse. B : À chaque cycle cardiaque, le bord de la prothèse se comporte comme une scie circulaire avec le toit de l’oreillette et la paroi de l’aorte. C : La prothèse peut éroder le toit des deux oreillettes au contact et/ou la paroi aortique et entraîner des troubles hémodynamiques sévères. Figure 8. CIA ostium secundum. A : avec absence de berge aortique. B : fermeture du defect malgré l’absence de berge antérieure ; la prothèse est positionnée à cheval sur l’aorte. Approche chirurgicale de la CIA de l’enfant Le traitement chirurgical conventionnel de la CIA chez l’enfant par sternotomie médiane donne d’excellents résultats avec une mortalité quasi nulle et une morbidité très basse. Il s’agit de la voie d’abord classique pour cette chirurgie. Elle permet une excellente vision de l’ensemble du cœur et donne de très bons résultats chirurgicaux. « Gold standard » en termes de résultats, elle a pour inconvénient de laisser une cicatrice visible qui, outre la gêne esthétique, peut engendrer une gêne psychologique, chez la jeune femme notamment. En effet, si cette voie d’abord est classiquement proposée chez un jeune garçon, elle l’est moins chez la jeune fille chez qui il est préféré d’attendre l’adolescence et le développement mammaire pour proposer un abord sous-mammaire droit moins disharmonieux. La thoracotomie antérolatérale droite est réservée à la femme jeune après la période pubertaire. La cicatrice est plus ou moins bien dissimulée, car située dans le sillon sous-mammaire droit. Utilisée parfois chez l’enfant, avant la période pubertaire, elle a pour inconvénient le risque d’atrophie de l’ébauche mammaire ou d’asymétrie des muscles pectoraux. À côté de ces deux voies chirurgicales classiques, il existe d’autres modes d’abord plus « esthétiques » avec, pour certains, d’aussi bons résultats que la voie médiane chez des enfants plus jeunes que par thoracotomie sous-mammaire droite lorsqu’elles sont pratiquées par des équipes rompues à ce type de chirurgie. La thoracotomie postérieure droite est une voie d’abord postérieure qui laisse une cicatrice invisible de face et diminue le préjudice esthétique (figure 9). Cette technique, employée initialement par l’équipe chirurgicale du centre Marie-Lannelongue, fait partie intégrante de notre stratégie de prise en charge des communications interauriculaires chirurgicales mais aussi des CIA ostium secundum qui ne se prêtent pas à la fermeture percutanée. L’incision cutanée mesure 6 à 8 cm de longueur, située sous la pointe de l’omoplate, avec ouverture du quatrième espace intercostal. Figure 9. Résultat d’une thoracotomie postérieure droite. La cicatrice très postérieure est presque invisible pour l’enfant. Elle permet de fermer les CIA dans les mêmes conditions de sécurité, avec des résultats similaires. Les CIA type sinus venosus avec RVPAp peuvent également être réparées par cette voie d’abord. La principale contre-indication à cette voie est la présence d’une veine cave supérieure gauche, difficilement accessible par cet abord thoracique droit. Les enfants âgés de 2 à 10 ans peuvent bénéficier de cette voie d’abord car, à cet âge, la souplesse des espaces intercostaux permet, au prix d’une petite incision, une exposition satisfaisante sans fracture de côte associée. Les mini-sternotomies et les voies sous-xyphoïdiennes : difficiles techniquement et rarement employées, elles ont pour inconvénient de laisser une cicatrice médiane qui, bien que plus petite, reste visible. La voie axillaire : variante haute de la thoracotomie postérieure droite, elle laisse aussi une cicatrice invisible de face mais au prix de modifications dans la stratégie chirurgicale (circulation extra-corporelle par les vaisseaux fémoraux). Elle est techniquement plus difficile. La chirurgie vidéo-assistée : elle est possible chez l’adulte ou le grand adolescent ; la taille du matériel utilisé rend cette technique inutilisable chez l’enfant.   Bilan préopératoire Il doit rechercher les anomalies associées qui peuvent modifier la technique chirurgicale. Il repose avant tout sur l’échocardiographie. Il est donc primordial de préciser l’existence ou non d’un éventuel RVPAp qui sera, le cas échéant, corrigé dans le même temps chirurgical, mais également la présence d’une veine cave supérieure gauche ou l’existence d’une sténose pulmonaire qui, dans les deux cas, modifient la tactique chirurgicale et doivent donc être connues avant l’intervention.   Principe du traitement chirurgical Après ouverture du péricarde et inspection du cœur à la recherche notamment d’une anomalie associée du retour veineux pulmonaire, une circulation extracorporelle est mise en route en normothermie. L’aorte ascendante est clampée et la protection myocardique est obtenue par cardioplégie au sang chaud (riche en potassium et magnésium), réinjectée à intervalles réguliers dans les coronaires. Le cœur est ainsi non contractile, ce qui facilite la réparation. Le temps de clampage aortique ne dépasse jamais 25 minutes. Par atriotomie droite de quelques centimètres, l’exploration intracardiaque est réalisée : connexion des quatre veines pulmonaires dans l’oreillette gauche, localisation et type de la CIA. La fermeture est réalisée au moyen d’un patch de péricarde autologue ou hétérologue, dont la taille est adaptée au diamètre de la CIA. La suture directe est rarement réalisée en raison du risque de tension engendré et du risque de lâchage de la suture. Après fermeture de l’oreillette droite et purge soigneuse de l’air des cavités gauches, le cœur est remis en charge puis la circulation extracorporelle arrêtée.   Quelle technique privilégier en cas d’anomalies associées ? S’il existe plusieurs techniques chirurgicales pour corriger un RVPAp associé, le principe reste toujours le même. Il consiste à tunneliser le retour veineux anormal vers l’oreillette gauche au travers de la CIA à l’aide du patch de fermeture de cette CIA. Cette chirurgie d’apparence simple présente plusieurs difficultés techniques. Une fermeture incomplète de la CIA, une mauvaise purge de l’air ou une mauvaise tunnelisation d’un RVPAp sont toujours possibles. La proximité de l’aorte, des veines caves ou du sinus coronaire rend cette chirurgie plus complexe et nécessite une technique chirurgicale rigoureuse et minutieuse afin d’éviter la survenue d’éventuelles complications.   En pratique   L’avènement et le développement des techniques de fermeture par voie percutanée des CIA ostium secundum a transformé la prise en charge de ces malformations cardiaques congénitales reléguant les indications de la chirurgie aux seuls échecs ou contre-indications du cathétérisme interventionnel, tant les avantages de la voie percutanée sont évidents en termes d’esthétique, absence de CEC et de ses complications éventuelles, durée d’hospitalisation plus courte. Cependant, l’existence de nouvelles approches chirurgicales permet une correction plus précoce et un préjudice esthétique moindre que les techniques habituelles. Elles offrent ainsi une alternative intéressante lorsque la voie percutanée n’est pas réalisable ou trop risquée.

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