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Cardiologie générale

Publié le 18 jan 2005Lecture 8 min

Lipides, syndrome métabolique et nutrition

M. FARNIER, hôpital Bocage, Dijon

AHA
Le congrès de l’AHA 2004 n’a fait que confirmer la place importante des statines dans la prévention cardio-vasculaire et plusieurs présentations ont précisé l’intérêt de cette classe d’hypolipémiants au décours des syndromes coronaires aigus (SCA), mais de nouvelles stratégies thérapeutiques agissant sur les HDL voient le jour. Par ailleurs, les communications sur le syndrome métabolique ne font que croître, tant ce syndrome est hautement prédictif du risque cardio-vasculaire. Enfin, l’approche nutritionnelle n’a pas été oubliée avec, en particulier, des précisions sur les bénéfices liés à la consommation de poisson.

Place des statines dans les syndromes coronaires aigus Plusieurs analyses complémentaires de l’étude PROVE-IT–TIMI 22 ont été présentées. Rappelons que l’étude PROVE-IT a montré le bénéfice d’un traitement intensif par atorvastatine 80 mg par rapport à un traitement dit conventionnel par pravastatine 40 mg, traitements institués dans un délai de moins de 10 jours après la survenue d’un SCA. Pour la pratique clinique, cette étude soulève plusieurs questions, en particulier sur la stratégie thérapeutique au long cours : – est-il nécessaire de maintenir une forte dose de statine ? – y a-t-il un risque à trop abaisser le LDL cholestérol (LDL-C) ? – quels sont les rôles de la baisse des LDL et de celle de la CRP vis-à-vis de ce bénéfice clinique ?   Risque de l’abaissement du cholestérol ? En étudiant spécifiquement le groupe des patients traités par atorvastatine 80 mg, Wiviott (abstract 2430) a évalué la tolérance et l’efficacité de ce traitement en fonction du taux de LDL-C atteint. Les patients étaient répartis en quatre sous-groupes selon que le LDL-C était : – < 0,4 g/l, – entre 0,4 et 0,6 g/l, – entre 0,6 et 0,8 g/l, – > 0,8 g/l. La tolérance clinique et biologique a été comparable dans ces quatre sous-groupes. De plus, en prenant comme risque relatif de référence celui observé dans le sous-groupe LDL-C entre 0,8 et 1,0 g/l, le risque relatif était encore plus bas pour les deux sous-groupes LDL-C entre 0,4 et 0,6 g/l et LDL-C < 0,4 g/l. Même s’il ne s’agit que d’une analyse post-hoc, cela est très rassurant vis-à-vis du maintien au long cours d’une forte dose de statine et ce n’est pas un taux de LDL-C nettement en dessous des objectifs thérapeutiques recommandés actuellement qui doit imposer la réduction de la posologie d’une statine.   Baisse du LDL-C ou CRP ? Cette analyse milite également en faveur de l’objectif thérapeutique optionnel proposé récemment dans les SCA, à savoir l’obtention d’un taux de LDL-C < 0,7 g/l. Ce nouvel objectif a également servi de base à une autre analyse préspécifiée de PROVE-IT. Ridker (abstract 2342) a étudié le bénéfice du traitement par statine dans PROVE-IT en fonction des taux de LDL-C et de CRP atteints : le risque récurrent d’infarctus du myocarde et de décès coronariens a été le plus faible dans le groupe de patients chez lesquels avaient été observés de façon simultanée, sous traitement, un LDL-C < 0,7 g/l et une CRP < 2 mg/l. Pour plusieurs auteurs, le bénéfice précoce d’un traitement par statine au décours d’un SCA serait plus dépendant des effets pléiotropes telle la baisse de la CRP. La baisse prolongée des LDL interviendrait plus dans le bénéfice tardif mis en évidence par Cannon (abstract 2341) dans une autre analyse post-hoc de PROVE-IT. Ce sont les études en cours chez des patients coronariens stabilisés, comme TNT, IDEAL et SEARCH, qui devront confirmer le bénéfice tardif d’un traitement intensif par statine. Agir sur les HDL : de nouvelles approches thérapeutiques prometteuses Depuis l’avènement des statines, l’abaissement des LDL est la priorité en termes de prévention cardio-vasculaire chez les patients à haut risque, mais l’enjeu des années futures se tourne maintenant vers les HDL : de nombreuses sessions de l’AHA ont été consacrées à ces nouvelles approches thérapeutiques. Deux types de thérapies par les HDL sont envisagés, soit en aigu, soit en chronique.   Thérapie par les HDL en aigu Il a déjà été publié que l’infusion d’apoA-I Milano pourrait réduire le volume de l’athérome intracoronaire (JAMA 2003 ; 290 : 2292), mais la préparation de l’apoA-I Milano reste difficile et nécessite des infusions répétées sur plusieurs semaines. Une nouvelle approche, présentée par Brewer (abstract 241), propose d’utiliser des HDL délipidées de façon sélective à l’aide d’une machine conçue pour assurer la réinfusion du plasma autologue contenant ces HDL délipidées. Leur utilisation permet d’augmenter l’efflux de cholestérol à partir de plaques athéromateuses. Cette approche pourrait permettre de stabiliser des plaques et une évaluation chez l’animal est en cours. D’autres peptides mimétiques de l’apoA-I sont également proposés pour cette thérapie par les HDL en aigu, qui ne serait possible que par voie parentérale. Tout cela va certainement demander de nombreuses années de mise au point.   La thérapie chronique par les HDL Cette thérapie a un avenir beaucoup plus proche avec deux approches différentes : – l’utilisation d’inhibiteurs de la cholesteryl ester transfer protéine (CETP), – l’administration par voie orale de petits peptides synthétiques mimétiques de l’apoA-I comme le D-4F. Même si des incertitudes persistent quant au bénéfice chez l’homme à inhiber la CETP, cette inhibition est l’une des voies prometteuses pour agir sur les HDL. Il est connu que des animaux déficients en CETP ont des taux élevés de HDL et sont plus résistants à l’athérosclérose induite par des régimes riches en graisses. Deux molécules sont en développement : le torcetrapib et le JTT-705. Dans une étude utilisant le torcetrapib chez des patients avec HDL bas (Brousseau, abstract 684), l’augmentation des taux de HDL cholestérol (HDL-C) s’accompagne d’une normalisation des concentrations d’apoA-I, essentiellement due à une diminution du catabolisme de cette apolipoprotéine. Morehouse (abstract 1168) a évalué les effets du torcetrapib sur l’évolution de l’athérosclérose sur un modèle animal non rongeur. Administré à des lapins de Nouvelle-Zélande ayant un régime riche en cholestérol, le torcetrapib inhibe de plus de 70 % la CETP et augmente les taux de HDL-C par un facteur de 3 à 4. Surtout, on observe une réduction significative des lésions aortiques athéromateuses, elle-même corrélée à l’augmentation des HDL. Les inhibiteurs de la CETP seront toutefois particulièrement intéressants associés aux statines et chez des patients hypercholestérolémiques traités par pravastatine 40 mg, le JTT-705 à la dose de 600 mg par jour induit une diminution de 30 % de l’activité CETP et une augmentation de 28 % des concentrations de HDL-C après 4 semaines de traitement, avec une légère diminution complémentaire (de l’ordre de 5 %) du taux de LDL-C (Kuivenhoven, abstract 683). L’autre approche est fondée sur des peptides synthétiques utilisables par voie orale comme le D-4F, peptide de 18 D-aminoacides, susceptible de convertir des HDL pro-inflammatoires en HDL anti-inflammatoires, ce qui permet de protéger les LDL vis-à-vis de l’oxydation (Yu, abstract 1165). Ce peptide D-4F permet une régression de l’athérosclérose aortique chez des souris LDLr-KO et apoE-KO (Milwaukee, abstract 1166), mais tout cela reste à valider dans d’autres modèles animaux et chez l’homme. Le syndrome métabolique à l’honneur Il est impossible de rapporter toutes les présentations de l’AHA relatives au syndrome métabolique tant elles ont été nombreuses ; une session plénière a été entièrement consacrée à ce syndrome, faisant le point à la fois sur les données épidémiologiques, le risque cardio-vasculaire et les approches thérapeutiques. Le syndrome métabolique est un puissant facteur prédictif des événements cardio-vasculaires, comme cela a été rapporté par plusieurs auteurs : - Takeno (abstract 3565) a montré que le syndrome métabolique était un important facteur prédictif des événements cardio-vasculaires majeurs chez 461 patients ayant un infarctus du myocarde (IDM) inaugural, dont 30 % avaient les caractéristiques du syndrome métabolique (risque relatif : 2,4 comparativement aux patients non porteurs de ce syndrome) ; - dans une étude réalisée à partir de 748 patients — bénéficiant d’une angioplastie — dont 307 avec syndrome métabolique, le risque relatif de décès cardiaques a été de 2,19 chez les patients avec syndrome métabolique au terme d’un suivi moyen de 143 ± 43 mois ; - Kalahasti (abstract 2860) a, de plus, analysé chez 2 382 patients le risque de complications après angioplastie en fonction du nombre des facteurs définissant le syndrome métabolique. Comparé au groupe sans facteur, le risque relatif d’événements cardio-vasculaires majeurs augmente progressivement pour être de 1,35 chez les patients avec 1 facteur et de 1,76 chez les patients avec 4 des facteurs définissant le syndrome métabolique ; - enfin, des données issues du registre exhaustif des patients ayant subi un IDM, hospitalisés en Côte d’Or (registre RICO), ont montré que le syndrome métabolique est également un problème majeur chez les coronariens en France. Zeller (abstract 3060) a ainsi observé, chez 633 patients hospitalisés pour IDM, que la prévalence du syndrome métabolique est très élevée (46 %). Globalement, les patients avec syndrome métabolique ont un pronostic hospitalier plus sévère avec une augmentation de la mortalité et du risque d’insuffisance cardiaque. Parmi les critères du syndrome métabolique, c’est principalement l’hyperglycémie qui est corrélée, dans cette étude, à la survenue de l’insuffisance cardiaque. Le syndrome métabolique est classiquement associé à l’insulinorésistance et Desprès (abstract 3564) a rapporté les résultats du suivi à 13 ans de la Quebec Cardiovascular Study, réalisée à partir d’un échantillon de 1 890 hommes non diabétiques, exempts de maladies cardio-vasculaires ischémiques à l’inclusion dans l’étude. Une augmentation de 10 % de l’insulinémie est associée à une augmentation de 46 % du risque relatif de maladies cardio-vasculaires ischémiques. Dans cette étude, le risque d’accidents ischémiques n’est associé à une élévation du rapport cholestérol total/HDL cholestérol que chez les sujets ayant une hyperinsulinémie. Même si ce critère n’est pas un marqueur parfait de l’insulinorésistance, l’hyperinsulinémie paraît être un excellent facteur prédictif du risque de maladie cardio-vasculaire ischémique chez l’homme.   Bénéfice du poisson en fonction de son mode de consommation Il est classique de recommander une consommation régulière de poisson pour prévenir les maladies cardio-vasculaires. En effet, plusieurs études épidémiologiques ont montré une diminution des morts subites chez les consommateurs de poisson. Le bénéfice des acides gras oméga-3 apportés par les poissons serait surtout lié à leur action sur les troubles du rythme Mais la façon dont le poisson est consommé paraît également importante : en effet, à partir d’une large cohorte de 4 815 sujets âgés de plus 65 ans et suivis pendant 12 ans, Mozaffarian (abstract 3766) a montré que la diminution de la survenue d’une fibrillation auriculaire n’est observée que chez les sujets qui consomment du thon ou d’autres poissons bouillis ou cuits au four, mais pas chez ceux qui mangent des poissons frits ou en sandwich. Comparativement à des sujets consommant moins d’une fois par mois du poisson frais, le risque de fibrillation auriculaire est diminué de 28 % pour un apport d’1 à 4 fois par semaine et de 31 % pour une consommation de poisson au moins 5 fois par semaine. Cette étude confirme le bénéfice du poisson, mais attention au mode de préparation. Un autre bénéfice lié à la consommation de poisson a été mis en évidence dans l’étude CARDIA (He, abstract 3835) Une consommation régulière de poisson chez de jeunes adultes caucasiens réduit le risque de développer un syndrome métabolique. Toutefois, ce bénéfice n’est pas retrouvé chez les Noirs américains. Cette différence raciale reste, pour l’instant, inexpliquée.

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