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Insuffisance cardiaque

Publié le 11 oct 2005Lecture 8 min

Insuffisance cardiaque, les nouveaux traitements

J.-F. LECLERCQ, Centre médical Monceau, Paris

RHYTHM

Ce congrès international bilingue a été consacré aux nouveaux traitements de l’insuffisance cardiaque, en particulier chez les patients ayant des troubles du rythme.
Au préalable, une séance a été consacrée à la mémoire de Philippe Coumel, pionnier de la rythmologie en Europe, par ses élèves qui ont retracé l’ensemble de son œuvre à laquelle ils ont tous collaboré (P. Attuel, B. Cauchemez, I. Denjoy, D. Flammang, J.-F. Leclercq, A. Leenhardt, P. Mabo et P. Maisonblanche), ainsi que par ses collègues et amis hollandais M. Allessie et M. Janse.

Traitements médicaux Après un rappel des traitements classiques de l’insuffisance cardiaque (bêtabloqueurs, IEC, sartans, antialdostérones), deux exposés ont souligné l’intérêt potentiel de deux autres types de thérapeutique en cours de développement. Les antithrombines, dont le ximélagatran est le plus étudié actuellement, ont une place évidente dans le traitement anticoagulant, en particulier dans la fibrillation auriculaire chronique. Les études disponibles montrent schématiquement une efficacité équivalente à celle des AVK sur le plan de la prévention des accidents emboliques, pour une sécurité et une simplicité d’emploi améliorées : le taux de saignement est significativement diminué et ce, malgré l’absence de surveillance biologique. Ce médicament est malheureusement responsable d’une cytolyse hépatique relativement fréquente et a fait l’objet d’un refus de la FDA l’an dernier dans l’attente de nouvelles données. D’autres produits comparables sont à l’étude mais leur développement est moins avancé. Les bradycardisants purs, sans effet sur le système nerveux autonome (SNA) telle l’ivabradine qui est un bloqueur du canal If, semblent particulièrement intéressants dans l’insuffisance cardiaque en rythme sinusal. Du simple fait du ralentissement de la fréquence, ils possèdent des effets hémodynamiques indirects : diminution de la dilatation VG, amélioration de la fonction pompe, diminution de la fibrose myocardique. Ces effets ont été mis en évidence expérimentalement. Les résultats d’essais chez l’homme sont attendus.   Traitements électriques des troubles du rythme ventriculaires   L’ablation électrique des TV Il ne s’agit pas d’un traitement nouveau puisqu’il remonte à 1983. Son utilisation par voie endocavitaire, voire épicardique via le péricarde, est encore actuellement préconisée dans les troubles du rythme rebelles. En particulier en endocavitaire, il peut s’appuyer sur les nouvelles techniques de cartographie tridimensionnelle, qui permettent non seulement de localiser le point d’origine d’une TV, mais aussi et surtout d’avoir une vue globale des altérations électriques de l’endocarde. On a ainsi davantage de chances de supprimer la zone de conduction lente à l’origine d’une TV récidivante ou incessante. Mais on peut également tenter de prévenir les TV polymorphes très graves, en particulier chez les coronariens, en réalisant des lignes d’ablation basées sur les données recueillies en rythme sinusal chez ces patients où le trouble rythmique n’est pas suffisamment bien toléré pour être cartographié en TV. En 2005, ces techniques complexes et hautement spécialisées ne se conçoivent guère qu’après l’implantation d’un défibrillateur, après avoir constaté que l’appareil intervient très souvent pour des TV hautement récidivantes malgré le traitement médical antiarythmique. Il en est de même pour l’ablation endocardique chez les patients ayant des FV récidivantes, le plus souvent idiopathiques. Elles sont habituellement initiées par des extrasystoles provenant du système de Purkinje, et peuvent se prêter assez bien à la technique d’ablation si elles sont fréquentes. Mais, là encore, cela ne se conçoit qu’après l’implantation d’un défibrillateur, nécessaire pout protéger la vie du malade.   Le défibrillateur implantable En effet, le défibrillateur implantable doit maintenant être très largement utilisé, non seulement dans les troubles du rythme ventriculaires graves documentés, mais aussi en prévention primaire de la mort subite dans l’insuffisance cardiaque. Ainsi, la dernière étude contrôlée publiée, SCDHefT, a permis de montrer une diminution importante (- 23 %) de la mortalité chez les patients insuffisants cardiaques (moitié coronariens, moitié cardiomyopathies) traités médicalement de façon optimale, lorsqu’ils sont implantés de façon prophylactique par un défibrillateur. Pour cette raison, les guidelines publiées cet été sur l’insuffisance cardiaque par la Société européenne de cardiologie ont placé le défibrillateur en indication de classe I en cas de dysfonction VG avec fraction d’éjection < 30 ou 35 % sous traitement médical optimal (Eur Heart J 2005 ; 26 : 1115). Il est clair que cette technique apporte un gain de survie comparativement aux traitements médicaux, même les mieux conduits. L’acceptation (enfin…) en 2005 des autorités de tutelle françaises de centres agréés, tant publics que privés, dans chaque région sanitaire va permettre, espérons-le, d’étendre les indications de cette technique dans notre pays où elle reste très largement sous-employée, notamment dans le cadre de la prévention primaire de la mort subite. Enfin, il faut signaler un travail en cours sur la faisabilité de l’implantation d’un défibrillateur implantable entièrement sous-cutané, sans électrodes endocavitaires. En effet, chez les patients jeunes, le devenir à long terme de ces électrodes est critique et une technique de ce type aurait sûrement sa place. Les prototypes sont encore au stade expérimental.   Resynchronisation ventriculaire La place des techniques de resynchronisation ventriculaire fait encore l’objet de discussions. En effet, si la dernière étude CARE-HF montre pour la première fois une diminution de la mortalité obtenue par la resynchronisation ventriculaire seule, on ne peut oublier que COMPANION montrait un bénéfice bien plus net avec la défibrillation combinée à la stimulation biventriculaire. Si l’on veut obtenir les meilleurs résultats chez les patients à qrs élargis – dont on sait que c’est un élément de pronostic sévère chez l’insuffisant cardiaque –, il est donc logique de proposer systématiquement un défibrillateur triple chambre. C’est la recommandation de la Société européenne de cardiologie. De ce fait, la place des stimulateurs triple chambre seuls est discutable. On peut estimer qu’ils sont limités aux patients qui ont une désynchronisation ventriculaire mais pas de dysfonction VG. Tel est souvent le cas des patients implantés depuis longtemps par un stimulateur classique : au fil des années, la stimulation permanente à l’apex du VD entraîne une désynchronisation à la fois inter- et intraventriculaire. On peut alors proposer, en particulier lors du remplacement pour usure du stimulateur, de remettre une sonde VG pour resynchronisation. Il est donc important de rechercher à l’échographie les critères de désynchronisation, surtout intraventriculaire gauche.   Une session en direct Quant à la mise en place de la sonde VG, sans être toujours aisée, elle est facilitée par les derniers matériels, en particulier les sondes filo-guidées, dérivées des techniques d’angioplastie, qui permettent habituellement de cathétériser les branches du sinus coronaire. Reste à trouver la plus adaptée. La réalisation d’un scanner multi-barettes avant l’implantation permet actuellement de se faire une bonne idée des branches disponibles, qui sont extrêmement variables d’un patient à l’autre. L’implantation d’un défibrillateur triple chambre, réalisée en « live » par J. Faure depuis Marseille, en a fourni un excellent exemple.   Traitements électriques des troubles du rythme auriculaires Si l’ablation de l’isthme cavo-tricuspide dans le flutter commun est devenue une intervention de routine dans tous les centres de rythmologie, représentant en volume la moitié de nos actes, il n’en est pas encore de même de l’ablation de la fibrillation auriculaire. Même si des progrès importants ont été accomplis ces dernières années, avec en particulier une tendance à l’uniformisation des techniques proposées, la relative lourdeur de la procédure la limite par nature à un petit nombre de centres spécialisés. Si le cathétérisme transseptal est un acte bien réglé, c’est un geste potentiellement dangereux, qui s’apprend, et que peu d’hémodynamiciens ou d’électrophysiologistes pratiquent en routine. Or, il est quasiment toujours nécessaire (peu de patients ayant un foramen ovale perméable), tandis que la réalisation concomitante d’une ETO ou d’une anesthésie générale sont optionnelles.   Quelle technique d’ablation ? Une fois l’oreillette gauche atteinte, deux techniques d’ablation par radiofréquence sont proposées : • l’approche électrophysiologique visant à supprimer les potentiels dans les 4 veines pulmonaires, • l’approche anatomique consistant à entourer celles-ci d’une ligne de tirs qui les encercle 2 par 2. En fait, si ces deux approches, qui en pratique ne sont pas si éloignées l’une de l’autre et peuvent être combinées, peuvent suffire dans la FA paroxystique, elles sont inefficaces dans la FA persistante ou permanente. Il faut alors réaliser en outre des lignes de tir joignant les veines pulmonaires supérieures et la veine inférieure gauche à l’anneau mitral. Cela réalise quelque chose de comparable à la technique du labyrinthe faite par les chirurgiens. On comprend alors que les appareils de cartographie tridimensionnelle sont en pratique indispensables, faute de quoi on ne pourrait jamais savoir si l’on a correctement réalisé les lignes en question. Depuis peu, on peut surimposer à la carte anatomo-électrique réalisée, l’image du scanner multibarettes, que l’on fait toujours au préalable, ce qui permet d’obtenir une meilleure précision. La procédure réalisée en « live » par l’équipe de Pisapia depuis Marseille a été très illustrative de ce point de vue, la superposition de l’image scanner permettant d’éviter les erreurs liées à la déformation de la cavité atriale induites par le cathéter.   Que peut-on attendre de cette technique d’ablation de l’oreillette gauche ? Le taux de succès dans la FA paroxystique est très élevé, plus de 80 %, surtout si l’on s’adresse à des sujets relativement jeunes et dont l’oreillette n’est pas trop volumineuse. Dans la FA persistante ou permanente mais de manière encore récente, le taux de succès est évidemment moindre, d’autant plus que l’on s’adresse à des arythmies anciennes, mais il reste > 50 % Dès lors, on comprend l’intérêt majeur de ces techniques, en particulier chez les patients dont la tolérance hémodynamique de la FA est médiocre. C’est ainsi que l’équipe de Bordeaux a pu montrer une amélioration progressive mais spectaculaire de la FEVG chez les patients où elle était au départ franchement altérée, lorsque le rythme sinusal se maintient à long terme (N Engl J Med 2004 ; 351 : 2373). Si le nombre de patients traités est encore faible pour prôner une généralisation de la technique, cela confirme que, comme le labyrinthe chirurgical, les lignes d’ablation réalisées n’empêchent pas à terme la récupération de l’activité mécanique de l’oreillette gauche et donc l’amélioration hémodynamique souvent majeure que cela entraîne chez les patients en insuffisance cardiaque. Il ne s’agit plus alors seulement d’un traitement de confort pour traiter les palpitations ou supprimer les anticoagulants, mais bel et bien d’un traitement visant à traiter ou prévenir l’insuffisance cardiaque et donc à améliorer à la fois qualité et espérance de vie. On voit que les perspectives de traitements rythmologiques de l’insuffisance cardiaque ne manquent pas. Même s’ils ne s’appliqueront jamais à l’ensemble de la population d’insuffisants cardiaques, contrairement aux médications classiques, ils leur sont complémentaires et doivent être systématiquement envisagés si la condition générale du patient semble le permettre. Le prochain congrès RHYTHM de 2007 confirmera vraisemblablement cette tendance, si les équipes de rythmologie existantes continuent sur leur lancée actuelle…

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