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Cardiologie générale

Publié le 09 mai 2006Lecture 6 min

Insuffisance cardiaque - En attente de l'EPO ?

E. DONAL, CHU de Rennes

ACC

L’ACC 2006 n’a pas présenté de grandes études dans le domaine de l’insuffisance cardiaque, qu’elle soit aiguë ou chronique. Cependant, quelques résultats intéressants, mises au point et tendances ont retenu notre attention.

L'insuffisance cardiaque aiguë La décompensation cardiaque aiguë reste dans nos services hospitaliers une situation fréquente et souvent difficile à contrôler. Dans le registre américain ADHERE, la dyspnée et les œdèmes des membres inférieurs restent une cause majeure d’hospitalisation en urgence de patients connus comme insuffisants cardiaques. Le traitement institué est alors souvent sub-optimal puisque l’incidence des réhospitalisations à 60 jours est de 17 à 22 %. La mortalité atteint 22 % dans la sous-population des patients les plus sévères, avec dysfonction rénale.   UNLOAD Dès lors, à côté des résultats attendus d’études multicentriques concernant par exemple, le levosimendan (calcium « sensitizer »), ou les antagonistes des récepteurs à la vasopressine, il a été présenté à Atlanta, les résultats de l’étude UNLOAD visant à démontrer l’intérêt d’une hémofiltration à petits volumes pour le traitement de la surcharge hydrosodée à la phase décompensée d’une insuffisance cardiaque versus le traitement diurétique habituel. Les résultats de cette étude multicentrique conduite sur une population de 83 patients par groupe sont en faveur d’une hémofiltration à la phase aiguë de la décompensation cardiaque tableau 1). Il y a significativement moins d’hypokaliémie, de nécessité d’utiliser des drogues vasoactives dans le groupe hémofiltration. Le risque et la durée d’une éventuelle réhospitalisation sont significativement plus faibles dans le groupe « hémofiltration » que dans le groupe « traitement diurétique conventionnel ». Ces résultats positifs sont à modérer par le faible effectif (83 patients par bras) et la faiblesse relative du critère principal de jugement. Aussi n’avons-nous pas la conviction que le traitement diurétique du bras témoin était optimal. En effet, sans doute l’hémofiltration a-t-elle permis de normaliser plus vite la volémie et, de fait, les patients non hémofiltrés ont sans doute quitté la structure hospitalière avec encore un certain degré de surcharge hydrique. Le recours à l’hémofiltration chez nos patients les plus sévères est peut-être à proposer mais il faudra attendre d‘autres études avant qu’un recours plus large à l’hémofiltration soit proposé chez les insuffisants cardiaques décompensés. Des travaux complémentaires restent nécessaires et il est prudent d’attendre les résultats des études sur les inhibiteurs des récepteurs à la vasopressine. Les V2 antagonistes sont des aquarétiques et non des salidiurétiques comme le furosémide.   Attendons EVEREST et les essais sur l’EPO L’étude EVEREST est une étude de mortalité débutée en 2003 et dont les résultats devraient être communiqués prochainement. L’étude pilote réalisée avec le tolvaptan n’avait pas montré de bénéfice de cette nouvelle thérapeutique sur le remodelage mais faisait état d’un profil de tolérance très satisfaisant de la molécule qui semblait avoir un effet bénéfique sur la morbi-mortalité, d’où EVEREST. Par ailleurs, si le caractère défavorable de l’anémie a déjà été montré dans le cadre de l’insuffisance cardiaque, la prise en charge thérapeutique de ce facteur de mauvais pronostic vital et fonctionnel n’en demeure pas moins problématique. Faut-il transfuser assez systématiquement ? Les éléments de réponse, actuellement très faibles, sont plutôt en défaveur de cette attitude. Pourtant dans ADHERE, prêt de 50 % des patients avaient un dosage d’hémoglobine sérique < 12 g/dl. Des études sont en cours pour savoir si l’EPO n’aurait pas un rôle bénéfique à jouer. Pour l’instant, plusieurs auteurs ont fait part de leur utilisation non validée de supplémentation en fer, y compris en intraveineux.   L’insuffisance cardiaque chronique Un complément d’information concernant l’association inhibiteur de l’enzyme de conversion pleine dose et candésartan a été apporté. L’étude CHARM-added avait démontré l’intérêt de cette association chez les patients insuffisants cardiaques chroniques stabilisés en stade 2-3 de la NYHA.   Augmenter les IEC ou les associer aux ARA II ? Cette association IEC + ARA II n’avait pas montré de bénéfice dans le postinfarctus (étude Val-Heft). La question qui pouvait se poser était de savoir si, dans le cadre de l’insuffisance cardiaque chronique stable, il n’y aurait pas intérêt à augmenter la dose d’IEC plutôt que d’associer une forte posologie d’IEC et d’ARA II. Cette association ne pouvait-elle pas être plus délétère que favorable en raison du risque d’hyperkaliémie, insuffisance rénale, hypotension orthostatique tel que cela a pu être démontré au Canada par Juurlink et coll. avec l’augmentation des hospitalisations pour hyperkaliémie sévère, suite à la publication de RALES (figure 1) ? Figure 1. Représentation de l’importance de l’augmentation des hospitalisations pour hyperkaliemie suite à la publication de RALES et la prescription non surveillée de spironolactone dans l’insuffisance cardiaque. Parmi les éléments de réponse, nous disposons de quelques travaux monocentriques, tel le travail de Nanas et coll. qui a comparé chez 249 patients une dose de 20 mg d’énalapril à une dose de 60 mg/j d’énalapril. Il n’a pas été montré dans cette expérience de différence significative entre les deux stratégies après 12 mois de suivi (figure 2). Figure 2. Courbe de survie (Kaplan Meier) de l’étude de Nanas et al. comparant 18 mg à 60 mg d’énalapril dans le traitement de l’insuffisance cardiaque chronique. Ensuite, l’analyse a posteriori montre bien la supériorité de l’association progressive et surveillée d’une pleine dose d’IEC et de sartans (figures 3 et 4). Bien entendu, cette association ne peut être initiée qu’après un contrôle de la fonction rénale (créatininémie < 265 mmol/l ou clairance > 30 ml/min) et de la kaliémie (K < 5mmol/l). Ensuite, il faudra être d’autant plus prudent dans la surveillance que le patient est diabétique et âgé. L’association candésartan et spironolactone est plutôt déconseillée en raison du risque d’hyperkaliémie. Figure 3. Courbe de survie de l’étude CHARM-Added. Figure 4. Synthèses des motifs d’arrêt de traitement au cours de l’étude CHARM-Added. La surveillance biologique recommandée consiste à faire un ionogramme toutes les 3 semaines et à chaque palier de titration. Il est maintenant bien connu, et redémontré, dans la population de CHARM, qu’une insuffisance rénale (taux de filtration glomérulaire estimé < 60 ml/min/1,73 m2) est un facteur de risque indépendant de mauvais pronostic et de mortalité. Ce caractère péjoratif de la mauvaise fonction rénale est vérifié dans la population globale de CHARM mais aussi dans le groupe des patients ayant une fonction ventriculaire systolique conservée (CHARM-preserved).   IMPACT-HF et CIBIS-3 Sinon, l’étude IMPACT-HF a été mise en balance avec les résultats de l’étude CIBIS-3 précédemment présentés à l’ESC 05. L’étude IMPACT-HF est un travail réalisé chez 363 patients hospitalisés pour insuffisance cardiaque. Ces patients ont été randomisés : mise en route du bêtabloquant avant la sortie versus plus de deux semaines après la sortie de l’hôpital. Le critère principal de jugement était le nombre de patients sous bêtabloquant après 60 jours de suivi (figure 5). Le résultat observé fut : 91,2 % de traitement bêtabloquant dans le groupe instauration hospitalière versus 73,4 % dans le groupe instauration du bêtabloquant plus de deux semaines après l’hospitalisation. L’instauration précoce du bêtabloquant n’a pas été associée à un nombre plus important d’effets secondaires et la durée d’hospitalisation a été de 5 jours dans les deux groupes. Figure 5. Résultats de l’étude IMPACT-HF, à la faveur d’une prescription précoce du carvédilol après la décompensation d’une insuffisance cardiaque. CIBIS-3 comparait une introduction première de l’énalapril ou du bisoprolol suite à une décompensation. Dans l’analyse en intension de traiter (et non en analyse per-protocole) il a été retrouvé une non-infériorité de la prescription première du bisoprolol puis de l’énalapril. Néanmoins, le protocole imposait initialement 28 jours de relative « monothérapie » IEC ou bêtabloquant. Au-delà de 28 jours, la titration du bêtabloquant ou de l’IEC était effectuée. Il semble donc possible d’introduire tôt le bêtabloquant sans prendre pour autant de retard dans l’atteinte de la dose cible d’IEC.

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