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Prévention et protection

Publié le 14 sep 2004Lecture 9 min

Bénéfices de l’activité physique

J.-P. BROUSTET, hôpital du Haut l’Évêque, Pessac

Maintenir son corps dans le meilleur état physiologique possible, en pratiquant une activité physique, c’est lutter contre l’émoussement du besoin de bouger et contre le vieillissement. Encore faut-il y prendre plaisir.
Les bénéfices sont multiples sur tous les plans : circulatoire, ventilatoire, métabolique, ostéo-articulaire…

    De la petite enfance à la vieillesse, le besoin de bouger son corps et le plaisir qu’on en retire diminuent. Le petit enfant a la joie de conquérir l’espace et d’acquérir l’équilibre en vélo ou en ski. Il lui manque la force, mais il a la souplesse et très vite la coordination et l’endurance… Son châssis léger lui apporte un rapport poids/puissance très favorable pour les efforts incessants ou prolongés. Une VO2 max de 50 à 60 ml/kg est courante chez un enfant de 10 ans habitué à bouger, alors qu’elle n’est plus que de 40 à 50 ml chez les étudiants. Viennent la puberté et la prise de poids… et d’autres préoccupations que les jeux et les sports. Sans gymnastique, la souplesse n’est plus la même. Le développement staturo-pondéral prend souvent de vitesse l’adaptation fonctionnelle du myocarde et des muscles. La « civilisation » des deux-roues et quatre-roues à moteur prive les adolescents de ce conditionnement cardio-vasculaire qui n’a rien à attendre de la musculation, laquelle est plutôt un signe de narcissisme en dehors des sports où elle est nécessaire (rugby). Les différences génotypiques des aptitudes qualitatives et quantitatives au sport sont considérables et déterminent le plaisir de l’activité physique. Au premier « mille mètres » couru à l’école, des écarts de plus de trois cents mètres sont courants chez les enfants de 10 ans ; il en va de même pour la vitesse, la souplesse ligamentaire ou la force pure. Chacun reçoit sa part de dons, et de manière très variable, au sein d’une même famille. Le sentiment de supériorité ou d’infériorité est déterminant pour le désir et le plaisir de la pratique sportive pendant l’enfance et l’adolescence.   Lutter contre le « vieillissement » Qu’est-ce que le vieillissement sinon, en l’absence de maladie organique, la diminution progressive de ces facteurs d’alacrité ? Les tendons se raidissent, les muscles diminuent de volume, se dépeuplent de leurs mitochondries. Pendant l’effort, les résistances périphériques ne baissent plus autant ; les pressions de remplissage augmentent parce que le ventricule gauche se relaxe moins vite et moins complètement. Les cartilages des hanches et des genoux sont usés ; les disques s’aplatissent ou expulsent quelques fragments vers des racines cervicales, crurales ou sciatiques ; la fonction vestibulaire et cérébelleuse s’émousse. En l’absence de tabac, les poumons résistent mieux, mais la vitesse expiratoire diminue. Finalement, c’est le myocarde qui vieillit le mieux, mais l’incompétence chronotropique d’effort est fréquente chez les sportifs d’endurance. Enfin, la prise de poids est plus ou moins catastrophique mais elle retentit toujours sur la disponibilité du corps à l’effort. À tout cela s’ajoutent de nombreux éléments sociologiques et psychologiques qui font qu’à l’âge mûr, la condition physique relève d’un ensemble très vaste de facteurs (tableau). Peut-on estimer la condition physique ? Comment apprécier et distinguer, chez une personne donnée, le niveau d’entraînement physique, la condition physique, la forme, l’activité physique, la sédentarité, le désentraînement ? Tous ces vocables ne s’appuient sur aucune définition chiffrée ! La pratique des épreuves d’effort maximales donne des renseignements précis sur l’aptitude à l’endurance, mais ignore la puissance musculaire de la moitié supérieure du corps, bien plus utile pour les activités de loisirs que la force des jambes. L’épreuve d’effort montre souvent aussi qu’il existe un fossé entre l’opinion qu’ont les sujets malades ou normaux de leurs capacités et leur niveau d’activité, et l’impitoyable réponse de la VO2 par kilo de poids ! Être en forme (figure) est une tâche presque insurmontable. Si l’on considère bon nombre de fonctions qui président à une bonne capacité physique, on se rend compte qu’il faut avoir beaucoup de temps devant soi si l’on n’a pas un métier physiquement très exigeant !   Pourquoi s’entraîner ? D’abord, est-il raisonnable de consacrer beaucoup de loisirs, d’affronter les risques quasiment incontournables de complications ostéo-articulaires à long terme à l’entraînement physique s’il n’y a pas de plaisir ? Il faut répondre oui ! Toutes les études longitudinales sont convergentes. À âge égal, il y a une corrélation positive entre la capacité d’effort aérobie et l’espérance de vie, et une corrélation négative avec l’incidence des maladies cardio-vasculaires. Qu’il s’agisse de sujets en bonne santé ou de sujets déjà atteints par une cardiopathie ischémique, la capacité d’effort est un facteur de pronostic indépendant. Certes, les facteurs confondants sont nombreux : dans l’étude norvégienne de Sandvik ou dans les études britanniques, des sujets normaux qui sont dans le meilleur quartile de l’activité physique ou de capacité fonctionnelle et qui ont une meilleure espérance de vie, ont moins de tabagisme, moins de cholestérol, moins d’hypertension, moins de diabète, moins d’excès de poids. Est-ce à cause de la pratique sportive ou simplement parce que les autres gros mangeurs, grands fumeurs, hypertendus sont peu attirés par l’activité physique ou le sport ? Cette discussion est perpétuelle et ne doit pas faire oublier le bon sens : reste actif ou le devient celui qui a une hygiène de vie permettant la pratique de l’activité physique. Pendant la vieillesse le maintien des capacités fonctionnelles est un constituant majeur de la qualité de vie et un facteur retardataire précieux de l’apparition de la dépendance. En prévention secondaire, les métaanalyses des études contrôlées sérieuses ont réussi à montrer, voici une vingtaine d’années, un gain de longévité de 20 à 25 % comparativement à ceux qui restent inactifs. Mais les progrès des médicaments et de la cardiologie interventionnelle ne permettent plus ce type d’étude et, actuellement, on se tourne plutôt vers des comparaisons sur divers facteurs métaboliques entre les groupes d’entraînés et les témoins. Quels sont les bénéfices de l’activité physique ? Nous ne pouvons qu’en souligner quelques-uns.   Bénéfices circulatoires Les facteurs qui favorisent la perfusion musculaire sont améliorés par l’entraînement physique en endurance. On observe un effet bêtabloquant-« like », c’est-à-dire : - moins de consommation d’oxygène du myocarde pour le même niveau d’effort en raison de la réduction de fréquence cardiaque, - moins de débit cardiaque par amélioration de l’extraction musculaire de l’oxygène, - une réduction de la pression artérielle moyenne sans doute liée à l’amélioration de la fonction endothéliale, - une amélioration de la variabilité du rythme cardiaque due à la prépondérance vagale, - une augmentation de la différence artério-veineuse en O2 à effort égal, - enfin, le volume sanguin augmente. Pour obtenir de tels effets, il faut au moins 3 mois d’entraînement à raison de trois séances de 30 à 40 minutes par semaine à 60–70 % au moins de la VO2 max ou de la VO2 limitée par les symptômes si celle-ci est suffisamment élevée.   Bénéfices ventilatoires Ils sont bien connus : - augmentation de la capacité vitale, - augmentation de la vitesse expiratoire par renforcement des muscles intercostaux et diaphragmatiques et diminution du travail ventilatoire à effort égal, - diminution du rapport VE/VO2 et augmentation du seuil anaérobie et de la VO2 max par kilo de poids. Pour les sujets qui s’entraînent, c’est ce bénéfice ventilatoire qui est le plus tangible et qui leur fait le mieux sentir leurs progrès.   Bénéfices musculaires et ostéo-articulaires • Quand l’entraînement est adapté, il y a incontestablement un gain de force physique. Il peut être considérable : même au-delà de 80 ans, un entraînement de musculation adapté peut permettre un gain de force dépassant 50 % pour les extenseurs et fléchisseurs de la jambe ou pour les muscles des bras. • Le gain en endurance dépend de la durée de l’entraînement et, si celui-ci se fait avec une intensité très modérée, il ne permet pas de gagner de la vitesse, mais il permet à certains sujets limités de marcher ou de faire du vélo sur de très longues distances sans épuisement. • Le gain en récupération est bien connu des sportifs et permet la répétition des efforts. • Ces bénéfices sont sous-tendus par l’augmentation du nombre, de la taille et de l’équipement enzymatique des mitochondries, bien démontrée par des biopsies musculaires répétées en cours d’entraînement chez des sujets au départ très sédentaires. Les études en RMN ont montré une amélioration du rapport phosphocréatine/phosphates anorganiques, en particulier chez les insuffisants cardiaques. • Enfin, il est clair qu’une gymnastique appropriée maintient ou augmente la flexibilité ligamentaire.   Bénéfice métabolique Il est évident, mais son obtention est plus longue et plus pénible que beaucoup se l’imaginent. • La perte de poids est un objectif de base, puisqu’elle suffit à améliorer considérablement le rendement. Néanmoins, il faut savoir qu’une personne de 75 kg qui marche une heure à 6 km/h perd environ 300 calories, soit 37 à 38 g de poids sec ! C’est peu en apparence, mais un retraité ou une retraitée qui pratique quotidiennement cet exercice peut espérer une perte de poids de 9 kg par an ! Beaucoup plus importante probablement sur le plan métabolique est la régulation glycémique avec diminution de l’insulinémie, meilleure perméabilité des cellules musculaires à l’entrée du glucose. • La mobilisation des acides gras est très favorisée par l’entraînement physique en endurance. • On a noté des augmentations significatives du HDL cholestérol si l’entraînement représente au moins 2 000 kcal par semaine, ce qui correspond à une vingtaine de kilomètres en cross ou en footing rapide ! • La fixation du calcium est fondamentale, mais nécessite un sport en position debout car c’est la pesanteur qui fixe le mieux le calcium sur les os comme l’ont bien montré les études chez les cosmonautes et chez les malades alités. • Enfin, parmi d’innombrables facteurs métaboliques, retenons que l’exercice physique en aigu a un effet à la fois fibrinolytique et d’activation plaquettaire si bien qu’il peut survenir des thromboses d’effort mais elles sont rares !   Autres bénéfices D’autres avantages sont prouvés chez l’animal et probables ou certains chez l’homme. • Chez le porc, l’entraînement physique développe les collatérales et le protège des arythmies provoquées par occlusion coronaire. • Chez les sportifs italiens de niveau olympique, les échographies ont montré une augmentation du diamètre proximal des artères coronaires comparativement à des témoins non entraînés. • Le phénomène de préconditionnement à l’ischémie est évident et bien connu de tous ceux qui entraînent des sujets qui ont un sous-décalage du segment ST à l’effort. • De même, l’élévation du seuil angineux est une évidence que les jeunes cardiologues ne peuvent plus connaître dans la mesure où il reste peu d’angineux d’effort stables. • Enfin, il est clair que la longévité est accrue, que ce soit chez les animaux ou chez les hommes sains ou coronariens.   Les maléfices de l’activité physique   Quel est le prix à payer pour tout cela ? En dehors des contraintes de temps, des risques d’accident qu’offrent les diverses activités physiques (accidents de la circulation, fractures, chutes, etc.), il existe incontestablement une aggravation du risque ostéo-articulaire au long cours et la plupart des gens doivent arrêter le sport non pour des problèmes cardio-respiratoires, mais pour des ennuis de hanches, de genoux ou de colonne vertébrale. Chez les personnes âgées, il arrive que les activités physiques deviennent impossibles en raison de troubles de l’équilibre, de plus en plus gênants. La névrose obsessionnelle de l’amélioration des performances par un entraînement forcené, destructeur de vie familiale et sociale, couplé à une diététique maniaque, est bien connue…   Conclusion   Pour un médecin ou un cardiologue, il est un peu lassant de toujours ramener l’activité physique à un bénéfice pour la santé. Ce n’est pas le but principal. L’éducation sportive au cours de l’enfance et de l’adolescence a des bénéfices éducatifs moraux considérables pour peu que les éducateurs soient de qualité. Par la suite, les liens de camaraderie, le plaisir que l’on a toute sa vie à pratiquer son activité ou son sport favori sont facteurs d’équilibre psychologique, de résistance à la fatigue, tout autant que de protection cardio-vasculaire ! Quant aux risques cardiaques, après un dépistage raisonnable chez les sujets apparemment indemnes et une évaluation précise chez les cardiaques, il faut les accepter comme bien d’autres risques de la pratique sportive. Il est assez vain, sauf chez les sujets d’un certain âge présentant des facteurs de risque ou ayant déjà une cardiopathie, d’espérer dépister et préserver tous les pratiquants des accidents cardio-vasculaires de la pratique sportive.

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