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Apnée du sommeil

Publié le 15 sep 2021Lecture 5 min

Dépistage de l’apnée du sommeil chez les patients présentant de la fibrillation atriale

Alexis MECHULAN, Cardiologie-rythmologie, Institut Méditerranéen Cœur et Vaisseaux, CHP Clairval, Marseille

L’association entre la fibrillation atriale (FA) et le syndrome d’apnée du sommeil (SAS) est bien connue. En effet, ces deux pathologies partagent de nombreux facteurs de risque et leurs prévalences augmentent en parallèle de celles des maladies cardiovasculaires et de l’obésité. Leur interaction est complexe et vraisemblablement bidirectionnelle. Ainsi, le SAS favoriserait la FA qui à son tour contribuerait au développement du SAS. Les dernières recommandations de la Société européenne de cardiologie concernant la prise en charge de la FA vont dans le sens d’une prise en charge conjointe des deux pathologies. Le dépistage et le traitement du SAS chez les patients atteints de FA pourraient en limiter les conséquences ainsi que les risques de récidives.

• Le syndrome d’apnée obstructive du sommeil Le syndrome d’apnée obstructive du sommeil (SAOS) se caractérise par des interruptions répétées et incontrôlées de la respiration pendant le sommeil lié à l’obstruction plus ou moins complète durant plus de 10 secondes des voies aériennes supérieures. Ces obstructions entraînent soit des dénaturations, soit des micro-réveils dont le patient n’a pas conscience et qui sont à l’origine de somnolence diurne, de difficultés de concentration ou de mémoire. La prévalence de SAOS est estimée entre 4 et 7 % dans la population adulte en France, cependant la grande majorité des individus qui en souffrent ne sont ni diagnostiqués, ni traités. La sévérité du SAOS est estimée par le nombre d’apnées et d’hypopnées par heure de sommeil qui se traduit par un index apnée-hypopnée (IAH). Le SAOS est considéré comme minime pour un IAH compris entre 5 et 15, modéré entre 15 et 30 et sévère chez les patients qui cumulent plus de 30 pauses respiratoires par heure. Le traitement le plus efficace et le plus utilisé est la ventilation en pression positive continue (PPC). • Les mécanismes physiopathologiques La première relation entre FA et SAOS a été mise en évidence en 1983 avec la publication des travaux de Guilleminault et coll.(1). De nombreux mécanismes pourraient expliquer l’association entre SAOS et FA(2). Parmi ceux-ci, on retrouve entre autres : une hypoxémie, une hypercapnie, des changements de pression intrathoracique, des fluctuations du système nerveux autonome, une inflammation (figure 1). Les efforts respiratoires induisent d’importantes pressions négatives intrathoraciques (jusqu’à -60 mmHg) qui contribuent à un étirement et un remodelage des fibres au niveau des veines pulmonaires et à la dilatation progressive de l’oreillette gauche. Ceci entraîne des dysfonctionnements électrophysiologiques (prolongement de l’intervalle QT, raccourcissement de la période réfractaire…) qui sont caractéristiques du processus conduisant à une FA. L’hypercapnie et l’hypoxie favorisent la genèse d’un substrat arythmogène via un processus inflammatoire avec notamment une dysfonction mitochondriale, un stress oxydatif ainsi qu’un relargage de cytokines qui induiraient une dysfonction endothéliale et un remodelage myocardique. • Les outils de dépistage du syndrome d’apnée obstructive du sommeil Les outils de dépistage du SAOS sont nombreux et ont été classés en quatre catégories. La polysomnographie (type 1) est l’examen le plus fiable. Il est réalisé dans un laboratoire du sommeil. Celui-ci permet de détecter avec une grande précision les troubles respiratoires et d’en définir le type (apnée centrale, obstructive, mixte). Cependant, devant la difficulté d’accès à cet examen, de nombreux dispositifs ont été développés. Ils ne permettent pas toujours d’effectuer un diagnostic direct de l’apnée du sommeil, néanmoins ils permettent de réaliser rapidement une première évaluation. Parmi eux, on retrouve les appareils de polysomnographie et de polygraphie respiratoire (types 2 et 3) qui peuvent être utilisés au domicile du patient ou lors d’une prise en charge hospitalière. Ils présentent l’avantage de pouvoir être effectués sur plusieurs nuits avec un coût financier moindre. Néanmoins, en cas de négativité de l’examen, on peut proposer une polysomnographie de type 1 afin de diagnostiquer les faux négatifs (détection des micro-éveils respiratoire). Des systèmes encore plus simples sont disponibles (de type 4) tels que l’oxymétrie nocturne qui évalue la saturation fonctionnelle d’oxygène du sang par une mesure optique. Le risque d’apnée du sommeil peut être évalué via des questionnaires. C’est le cas du questionnaire de Berlin ou du test Lausanne NoSAS (No Syndrome d’Apnées du Sommeil) qui porte sur les cinq facteurs de risque suivants : tour de cou supérieur à 40 centimètres, indice de masse corporelle dépassant 25, sexe masculin, âge de 55 ans et plus, et personne encline aux ronflements. Il faut rappeler que les patients vus en cardiologie ne présentent pas tous une somnolence (en raison d’une hyperadrénergie) ou des ronflements en fonction de l’âge ou de l’IMC. Enfin, n’oublions pas que certains pacemakers et défibrillateurs ont des algorithmes permettant de rechercher l’apnée du sommeil et qu’ils doivent être activés lorsque le SAOS est suspecté. • Impact du syndrome d’apnée obstructive du sommeil sur le traitement de la fibrillation atriale L’étude de Gami et coll.(3) incluant 463 patients a mis en évidence une prévalence de SAOS supérieurs chez des patients souffrant de FA adressés pour cardioversion par rapport à une population de patients sans FA de cardiologie générale (49 % versus 32 %). Plus récemment, l’étude de Traaen et coll.(4), dans laquelle une polygraphie a été effectuée chez 579 patients atteints de FA paroxystique, a mis en évidence une prévalence particulièrement élevée d’apnée du sommeil (82,7 % avec un IAH ≥ 5 et 42,1 % présentant une apnée modérée-sévère avec un IAH ≥ 15). En plus de cette importante prévalence (à prédominance obstructive), ils ont observé que les patients atteints de SAOS sévère avaient une charge en FA, une gravité et des symptômes plus importants que les autres. Par ailleurs, le traitement médical de la FA chez les patients souffrant d’un trouble du sommeil est moins efficace. Dans l’étude de Kanagala en 2013(5), les auteurs ont observé que les patients présentant un SAOS non traité après une cardioversion électrique avaient un taux de récidives de FA à un an de 82 % comparé à seulement 53 % dans le groupe traité par PPC. Patel et coll. en 2010(6) ont mis en évidence chez les patients ayant bénéficié d’une isolation des veines pulmonaires que la présence de SAOS était un facteur prédictif d’échec de la procédure. En revanche, les patients traités par PPC avaient un taux de récidive significativement inférieure à ceux non traités. En 2013, Fein et coll.(7) ont quant à eux observé que le traitement du SAOS par PPC permettait de réduire le risque de récidive chez les patients après une isolation des veines pulmonaires. Les patients avec un SAOS traité par PPC présentaient ainsi des résultats similaires aux patients sans SAOS et un meilleur pronostic à ceux avec un SAOS non traité par PPC (figure 2). • Recommandations européennes de 2020 Selon les dernières recommandations européennes(8) concernant la prise en charge de la FA, il est préconisé de rechercher les facteurs qui induisent ou favorisent l’arythmie, parmi lesquels figure le SAOS (figure 3). Ainsi, il peut être considéré une prise en charge optimale du SAOS afin de réduire l’incidence de la FA, sa progression, sa récidive ainsi que ces symptômes (classe IIb). De plus, le traitement du SAOS devrait être optimisé afin de réduire les récidives de FA et d’en améliorer le traitement (classe IIa).

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