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HTA

Publié le 15 fév 2020Lecture 33 min

Retour sur les 39es Journées d’hypertension artérielle

Hélène LELONG, Hôtel-Dieu, AP-HP, Paris

Les 19 et 20 décembre 2019 se sont déroulées les 39es Journées d’hypertension artérielle sous l’égide de la Société française d’hypertension (SFHTA). Pour ces journées, plusieurs parcours thématiques étaient proposés, notamment un parcours orienté pharmacologie, un parcours AC/FA et HTA, plusieurs sessions sur la médecine connectée, et un parcours « sport et HTA » qui a rencontré un franc succès répondant à une demande de plus en plus importante avec ces dernières années l’apparition de la prescription de l’activité physique.
Ce résumé reprend quelques éléments du parcours « pharmacologie » et « sport et HTA », ainsi que des données épidémiologiques dont les conclusions ne sont malheureusement pas en faveur d’une amélioration de la prise en charge de l’hypertension en France.

Pharmacologie Chronothérapie dans l’hypertension D’après J.-M. Krzesinski (Liège), absent, remplacé par J.-P. Fauvel, actuel président de la SFHTA Pourquoi se pose la question d’une utilité potentielle de de la chronothérapie dans l’hypertension artérielle ? Physiologiquement, le niveau de pression artérielle (PA) varie au cours du nycthémère avec notamment une baisse du niveau de PA la nuit et une augmentation « brutale » au réveil le matin. Plusieurs données épidémiologiques laissent penser que le risque cardiovasculaire est associé à cette variation nycthémérale et à son altération éventuelle. En effet, il a été décrit que la survenue des accidents vasculaires cérébraux (AVC) était plus fréquente le matin et celle des infarctus du myocarde (IDM) la nuit. Par ailleurs, il a été décrit par l’utilisation de mesures ambulatoires de la PA (MAPA) que la valeur de la PA nocturne avait une meilleure valeur prédictive sur la mortalité cardiovasculaire(1), et que le risque cardiovasculaire augmentait chez les sujets qui avaient une perte du rythme physiologique (sujets non-dippers en MAPA) et était encore augmenté chez ceux qui avaient une inversion du rythme (sujets reverse-dippers) par rapport aux sujets dippers considérés comme « normaux »(2). La question qui se pose est donc de savoir quel est le meilleur moment (s’il y en a un) pour prendre les traitements anti- HTA en stimulant les différents systèmes de régulation aux moments les plus opportuns pour in fine réduire le risque cardiovasculaire. La cause de l’altération du rythme nycthéméral chez certains sujets n’est pas connue, il a été décrit que la proportion de sujets reverse-dippers variait en fonction des populations : par rapport à la population générale, le pourcentage de reverse-dippers croît progressivement chez les sujets diabétiques de type 2, chez les hypertendus traités, chez les sujets ayant un syndrome d’apnée du sommeil, chez les hypertendus non traités et enfin chez les insuffisants rénaux où il est maximal. De plus, le pronostic cardiovasculaire de ces sujets étant moins bon, il a été suggéré qu’une approche « chrono-thérapeutique » des sujets reverse-dippers devrait être considérée pour améliorer leur prévention cardiovasculaire(3). En 2015, une revue de la littérature d’études prospectives rapportait que le fait de prendre au moins une molécule du traitement anti-HTA le soir vs le matin permettait de normaliser le cycle nycthéméral de la PA et était associé à une diminution du risque cardiovasculaire chez des sujets hypertendus, des diabétiques, des insuffisants rénaux et des hypertendus résistants. Cependant ces résultats étaient tempérés par les auteurs de la revue qui soulignaient que toutes les données provenaient d’études menées par une unique équipe et donc un manque de diversité des populations étudiées(4). En 2018, une étude en cross-over menée par Poulter et coll. ne retrouvait aucun effet d’une chronothérapie sur le niveau de PA évalué par MAPA, chez des sujets hypertendus « raisonnablement contrôlés », i.e. dont la PA sous traitement était ≤ 150/90 mmHg(5). Un autre essai en cross-over, mené dans une population de sujets hypertendus ayant un syndrome obstructif d’apnée du sommeil montrait une amélioration des PA nocturnes et du statut dipper/non-dipper lorsque les traitements étaient pris le soir vs le matin(6). Dans une revue récente de la littérature ayant analysé les résultats de 47 essais randomisés contrôlés sur la période 2008/2018, 35 essais rapportent un effet « positif » de la prise des traitements le soir (l’effet correspondant à l’efficacité thérapeutique), 1 essai un effet « positif » de la prise des traitements le matin et 11 essais un effet neutre du moment de prise. À noter que « les effets », les molécules, les populations diffèrent dans les 47 essais ne permettant pas la métaanalyse des résultats(7). Enfin, une étude très récente, dont les résultats ont été publiés en octobre 2019, menée par l’équipe de Hermida, rapporte une diminution de 45 % des événements cardiovasculaires lorsque la prise des traitements est faite le soir vs le matin. Cette étude aux résultats très impressionnants était multicentrique et a inclus plus de 19 000 sujets hypertendus avec une médiane de suivi de 6,3 ans. La prise des traitements le soir était associée significativement à une diminution globale des événements cardiovasculaires mais également à une diminution de chacun des événements considérés individuellement(8). Cependant, ces résultats restent à être confirmés par d’autres études menées dans d’autres populations, l’équipe de Hermida étant à l’origine de la plupart des publications sur le sujet. Ordonnance de l’hypertendu D’après J.-J. Mourad (Paris) & B. Sautenet (Tours) Cet atelier pratique avait pour objectif à travers quelques observations issues de consultations réelles, de rediscuter et d’optimiser le traitement antihypertenseur chez des patients hypertendus. Tout d’abord, en introduction, J.-J. Mourad a rappelé la notion de temporalité dans l’hypertension artérielle qui change au cours de la vie. Le suivi d’un hypertendu débute lors du diagnostic (HTA confirmée par des mesures ambulatoires) et doit théoriquement amener au contrôle tensionnel en 6 mois maximum. Pour atteindre ce « temps du contrôle », le traitement doit être débuté par une monothérapie (IEC/ARAII ou inhibiteur calcique ou diurétique, les bêtabloquants n’étant pas recommandés en 1re intention sauf en cas de comorbidités particulières). En cas de noncontrôle, le passage à une bithérapie après 1 mois doit être systématique, puis une titration des différentes molécules en bithérapie peut être faite si on n’est pas très loin du contrôle tensionnel, sinon la trithérapie doit être instaurée rapidement. Le contrôle tensionnel obtenu va perdurer plus ou moins longtemps selon les sujets ; puis, en raison du vieillissement, il faudra parfois réadapter le traitement chez les sujets qui ne sont plus contrôlés ou bien chez les sujets qui vont passer en prévention secondaire après la survenue d’un événement cardiovasculaire. Avec le vieillissement, on voit apparaître une modification des systèmes de régulation de la PA, avec notamment une diminution de la part du système rénine-angiotensine dans la régulation, une augmentation de la rigidité artérielle et de la sensibilité au sel (d’où une meilleure efficacité des inhibiteurs calciques et des diurétiques dans les populations âgées). Il est par ailleurs rappelé que les trithérapies étaient encore trop peu nombreuses en France où le contrôle tensionnel des hypertendus est pourtant médiocre. En fait, en consultation, la décision de modifier ou de simplement renouveler le traitement se prend en moins d’une minute. Il y a donc une nécessité de rationaliser la démarche de réflexion afin de limiter la part d’irrationnel et d’inertie thérapeutique. Pour cela, 2 questions doivent être systématiques en consultation : – ai-je assez d’arguments pour modifier le traitement ? (efficacité imparfaite et/ou mauvaise tolérance) ; – est-ce que le traitement actuel remplit les conditions d’un traitement moderne ? i.e. des associations logiques, des durées d’actions longues, des associations fixes avec un minimum de comprimés à prendre ? Après cette introduction, les cas cliniques ont été posés et discutés dans la salle (à noter que les réponses ne sont que des propositions des intervenants mais permettent quelques rappels pharmacologiques pertinents). • Observation n°1 Il s’agit d’un homme de 42 ans, traité depuis 2 années pour une hypertension artérielle. Il se dit stressé mais se sent mieux depuis que son cœur « est plus lent ». Il consulte dans le cadre de son suivi pour son HTA et rapporte des troubles érectiles. Ses pressions artérielles en automesure sont égales à 148/90 mmHg. Son traitement comporte : bisoprolol 2,5 : 1 comprimé le matin et ramipril 5 mg le matin. Vous décidez de modifier le traitement. Que recherchez-vous comme cause à ce profil tensionnel ? L’arrêt des bêtabloquants devrait améliorer sa dysfonction érectile. Réponse proposée : il y a plusieurs raisons de devoir changer le traitement. Tout d’abord les pressions artérielles ne sont pas contrôlées en automesure. De plus, l’association bêtabloquant/IEC est une association « non additive ». À noter également que le ramipril n’a une durée d’action que de 12 heures et doit donc être pris en 2 fois si on veut le conserver, sinon il faut le remplacer par un IEC à plus long durée d’action. Le patient se plaignait d’être tachycarde avant la prise de bêtabloquants, le choix du traitement doit tenir compte de cette amélioration, d’une part, et de chercher une cause à cette tachycardie (hyperthyroïdie, prise de cocaïne), d’autre part, en proposant une molécule ayant un effet bradycardisant. Le traitement proposé est donc une association IEC/inhibiteur calcique bradycardisant (vérifier qu’il n’y ait pas de constipation pour ce dernier). Une association vérapamil, trandolapril existe en bithérapie combinée (Tarka LP® 240 mg/4 mg). • Observation n°2 Il s’agit d’une femme de 71 ans, traitée depuis plus de 10 ans pour une HTA. Son bilan biologique est sans particularité. Elle n’a aucun autre facteur de risque CV. Depuis plusieurs consultations les chiffres de PA sont autour de 150/70 mmHg ; en automesure les chiffres de PA sont très élevés le matin, supérieurs aux mesures du soir. Son traitement comporte : Hyzaar® (losartan, hydrochlorothiazide) 1 comprimé le matin, Atenolol® 50 mg: 1 comprimé le matin. Quelle(s) modification(s) au traitement ? Réponse proposée : parmi les éléments de réponse, on note que les bêtabloquants n’ont pas leur place dans une trithérapie ; un inhibiteur calcique serait plus efficace chez cette patiente. Les chiffres de PA plus élevés le matin suggèrent que l’un des traitements n’agit pas sur 24 heures. En effet, le losartan ne fait pas partie des sartans ayant la plus longue durée d’action contrairement au telmisartan, au candesartan et à l’olmesartan). De même, concernant les thiazidiques, l’hydrochlorothiazide a une moins longue durée d’action que l’indapamide. L’ordonnance proposée comporte donc une association telmisartan/amlodipine (existe en bithérapie combinée sous forme de Twynsta®) à laquelle on ajoute de l’indapamide afin d’obtenir une trithérapie efficace en 2 comprimés. • Observation n°3 Il s’agit d’une femme de 82 ans, ayant une HTA ancienne traitée par Renitec® et Loxen®. Elle est par ailleurs en bonne forme et sans pathologie associée. Depuis 1 an, la PA systolique est mal contrôlée ayant motivé une majoration de traitement jusqu’à une quadrithérapie par Hyperium® : un le matin et un le soir ; Renitec® 20 mg : un le matin ; Lasilix® 20 mg : un le matin ; Loxen® 50 mg : un le matin et un le soir. À l’interrogatoire, la patiente rapporte que la PA n’est « jamais la même » avec parfois des valeurs de PA systolique diminuée à 100 mmHg en automesure. Réponse proposée : la première remarque est qu’il y a nécessité de modifier le traitement, en effet cette patiente sous quadrithérapie a des épisodes d’hypotension liée à la pharmacologique courte de certains traitements. La patiente est donc en « surtraitement » à certains moments de la journée. La deuxième remarque est que le Lasilix® n’a pas d’indication dans l’hypertension artérielle lorsqu’il n’y a pas d’insuffisance rénale. La troisième remarque est que le Renitec® a une très courte durée d’action (les IEC ayant une longue durée d’action sont le trandolapril, le zestril, le périndopril). La proposition chez cette patiente est donc de lui donner dans un premier temps une bithérapie associant un inhibiteur calcique et un diurétique thiazidique qui sont les deux classes les plus efficaces chez les sujets âgés. Cette association existe en bithérapie combinée sous forme de Natrixam®. Sa PA sera réévaluée 1 mois après par des mesures ambulatoires de la pression artérielle sur 24 h. • Observation n°4 Il s’agit d’une femme de 40 ans traitée depuis 3 ans pour hypertension artérielle est équilibrée sous Lercapress®. Elle consulte pour un désir de grossesse, sa PA en consultation est de 124/70 mmHg. Quelle(s) modification(s) de traitement ? Réponse proposée : la première remarque est qu’en cas de désir de grossesse, il faut impérativement arrêter les IEC (et ARAII le cas échéant) qui sont formellement contre-indiqués. Une modification est donc indispensable. La proposition chez cette patiente qui présente une PA plutôt basse (certes sous traitement) est de stopper le traitement et de ne pas le remplacer dans un premier temps étant donné que les pressions artérielles ont tendance à baisser en début de grossesse. Il faudra surveiller la patiente et en cas de réaugmentation de la PA (confirmée par des mesures ambulatoires) introduire du Loxen® par exemple. Il est également conseillé à la patiente de ne pas prendre trop de poids pendant cette première grossesse. • Observation n°5 Il s’agit d’une femme de 85 ans traitée depuis 30 ans pour une HTA. Elle est équilibrée sous Atenolol® 50 mg 1/jour et Corenitec® 20 mg/12,5 mg 1/jour. Elle consulte aux urgences pour un tableau de gastro-entérite fébrile, sa PA est à 110/70 mmHg. Une modification de traitement ? Réponse proposée : il faut évidemment modifier le traitement chez cette patiente en situation de déshydratation qui nécessite donc un système rénine-angiotensine et un système nerveux sympathique opérationnels. Dans un premier temps, il faut arrêter le Corenitec®, l’arrêt du bêtabloquant peut être plus compliqué (cela dépend de son indication et les situations de déshydratation pourraient augmenter un phénomène de tachycardie réflexe). Le traitement doit être rediscuté à distance de la réhydratation et de l’épisode aigu. On rappelle que les médicaments agissant sur le système rénine-angiotensine et les diurétiques doivent être suspendus en cas de déshydratation intense au moins le temps des symptômes. Interaction à risque dans l’HTA D’après A. Pathak (Toulouse) L’objet de la présentation était de réfléchir à l’imputabilité du traitement devant la survenue de d’effets indésirables (EI) qu’ils soient de tout type ou de type « trouble tensionnel » (qu’il s’agisse d’hypo- ou d’hypertension). • Effets indésirables des anti-HTA Si la plupart des effets indésirables des antihypertenseurs sont connus et doivent être recherchés (œdèmes sous inhibiteurs calciques, toux sous IEC, troubles digestifs sous olmesartan), souvent dose-dépendants, certains sont inattendus. Il faut se poser la question de l’iatrogénicité devant l’apparition de tout symptôme sous traitement (dépistage du signal). Les mécanismes des EI sont de 2 types : – type A (pour augmented) correspondant à une exagération de la réponse pharmacodynamique. Ils sont dépendants de la dose (hypotension sous anti- HTA, bradycardie sous bêtabloquants, dyskaliémie sous diurétiques…). Ces effets sont fréquents et souvent « non graves » ; – type B (pour bizarre) : correspondant à un EI non expliqué par la pharmacodynamie, indépendant de la dose et potentiellement grave pouvant mettre en jeu le pronostic vital comme les EI de mécanisme immuno-allergique qui nécessitent l’arrêt immédiat et définitif de la molécule. Une autre classification « administrative » cette fois, classe les EI selon qu’ils sont attendus et dans ce cas listés dans les RCP ou inattendus (non listés). Quelle conduite à tenir face à un effet indésirable dans l’HTA ? Il faut d’abord à apprécier l’imputabilité de la molécule, pour cela : – s’assurer de la chronologie : apparition de l’EI après l’introduction du traitement ; – vérifier la séméiologie, la biologie et faire des recherches bibliographiques ; – faire des fenêtres thérapeutiques (enlever et remettre le traitement). En cas d’imputabilité ainsi établie, il faut adapter le traitement et déclarer les EI inattendus et/ou graves. • Effet indésirable de type « trouble tensionnel » Dans les situations ou une HTA devient difficile à contrôler, voire résistante, la question de l’iatrogénicité doit être revue : prise d’une substance connue pour augmenter la PA, perte d’efficacité d’un anti-HTA par interaction pharmacodynamique ou perte d’efficacité d’un anti-HTA par interaction pharmacocinétique. Les substances conduisant à une augmentation iatrogène de la PA ont des mécanismes d’action portant en général sur le système nerveux sympathique autonome ou sur le rein et/ou le système rénine-angiotensine. Il s’agit le plus souvent de drogues, d’aliments, de toxiques. Les substances les plus fréquentes affectant le SNA sont les amphétamines, la cocaïne (effet aigu plus que chronique), l’éphédrine pseudo-éphédrine, les tricycliques, les inhibiteurs de recapture de la sérotonine avec un effet dose-dépendant et les triptans (liste non exhaustive…). Les substances les plus fréquentes affectant le SRAA ou le métabolisme rénal sont les AINS, la contraception estroprogestative par la production hépatique d’angiotensine, les corticoïdes, la ciclosporine. L’augmentation de la PA liée à la prise de corticoïdes concerne 20 % des sujets ayant une corticothérapie à fortes doses par un mécanisme de rétention hydrosodé majoritairement. Chez ces sujets chez qui la corticothérapie est le plus souvent nécessaire, l’introduction de diurétique peut aider à contrer l’effet. Les quelques substances souvent incriminées dans une augmentation de la PA ayant un mécanisme d’action indépendant du SNA et du rein sont l’alcool, les antiangiogéniques, le cannabis, l’EPO et les phytothérapies. L’alcool représente la première cause d’HTA dite « toxique » en France et est responsable de nombreuses HTA résistantes. La prise d’alcool diminue l’efficacité de la plupart des traitements anti-HTA sauf des alphabloquants dont il peut potentialiser l’effet hypotenseur. À noter que le sevrage peut également induire des variations de la PA et de la fréquence cardiaque. Concernant l’apparition ou le déséquilibre d’une HTA sous antiangiogéniques (souvent indispensables) qui atteint 60 à 90 % des sujets les recevant, le consensus d’experts de la SFHTA recommande de traiter l’HTA (action généralement réversible). Concernant les phytothérapies, la question de prise de traitements/ substances naturelles doit être posée devant toute HTA. Les substances responsables d’HTA sévères et/ou résistantes les plus fréquentes sont : le mahuang (plante traditionnelle de médecine chinoise), la synéphrine contenue dans l’orange amère, la yohimbine, le ginkgo biloba, les extraits de millepertuis. En conclusion, devant une variation tensionnelle, la question de l’imputabilité des traitements/substances doit être systématiquement recherchée, notamment la prise de sympathomimétiques, d’AINS, de corticostéroïdes mais également de substances « naturelles » de type phytothérapie. HTA et sport D’après Ph. Sosner (Paris) Évaluation du patient hypertendu qui veut faire du sport Cet exposé concerne essentiellement le bilan à réaliser chez un sujet qui souhaite reprendre l’activité physique, mais n’intègre pas le suivi d’un sportif de haut niveau. La pratique d’une activité physique est réputée pour être associée à une augmentation « aiguë et transitoire » du risque d’événement cardiovasculaire. En fait, chez le jeune sportif cette augmentation est liée essentiellement aux morts subites qui sont en fait moins fréquentes chez les sportifs que dans la population générale mais qui surviennent à un âge plus jeune(9). En revanche, après 40 ans, l’augmentation du risque est liée plutôt à la maladie athéromateuse (elle-même favorisée par une HTA). Donc faut-il faire un bilan et si oui lequel chez un sujet qui souhaite se « mettre au sport » ? Dans le guide de la HAS sur la promotion de l’activité physique(10) le questionnaire, à destination du grand public, vise à déterminer les situations dans lesquelles un avis médical est recommandé chez un sujet qui souhaite se « mettre au sport ». Dans ce guide « être hypertendu » fait partie des situations où un avis médical est nécessaire. Le premier message important est qu’il ne faut pas manquer le moment où un sujet est motivé pour reprendre l’activité physique ; donc même si une évaluation du risque CV est nécessaire, la pratique d’une activité de faible intensité (i.e. jusqu’à l’essoufflement) peut être débutée sans attendre le RDV médical et doit être encouragée. Les activités d’intensité modérée et élevée seront débutées elles, après la réalisation du bilan. L’évaluation et le bilan plus approfondis vont dépendre ensuite à la fois du terrain et de l’activité sportive envisagée. Le bilan de l’hypertendu souhaitant reprendre une activité plus intense doit comprendre une évaluation du risque cardiovasculaire absolu (autres FDR CV), un bilan de retentissement de l’HTA, un électrocardiogramme de repos. Un autre message important avant la reprise du sport repose sur la nécessité du contrôle de la PA (de repos) évaluée sur des mesures ambulatoires de la PA. Il est important de se renseigner sur la ou les activités envisagées et de connaître les spécificités des différentes activités physiques, par exemple : lors de la pratique de la course à pied, la fréquence cardiaque (FC) augmente rapidement pour atteindre un plateau alors que la PA varie peu ; lors de la pratique du vélo, il y a une augmentation « parallèle » de la FC et de la PA qui dépendent de l’effort (plus importantes en montée) alors que la pratique de la musculation provoque une poussée de PA à chaque effort. L’indication de l’épreuve d’effort pour le dépistage d’une coronaropathie chez un patient asymptomatique voulant débuter un programme d’intensité élevée dépend de son niveau d’activité physique habituel et de son risque CV : chez l’inactif elle peut être réalisée à partir d’un risque CV modéré et est fortement recommandée chez les sujets à RCV élevé ; chez l’actif elle n’est recommandée que chez les sujets à risque CV élevé(10). En cas de test d’effort, le mieux est de réaliser le test avec l’ergomètre le plus adapté à l’activité envisagée (test sur tapis pour course à pied, sur vélo pour cyclisme)(11). Il est important de noter que l’épreuve d’effort comme tout examen de dépistage a ses limites, et notamment si ce test permet de détecter une sténose serrée avec une bonne probabilité, il ne permet pas de détecter une éventuelle plaque susceptible de se rompre… Un autre intérêt de l’épreuve d’effort est son utilisation pour la « programmatique de l’entraînement » lorsqu’elle est couplée à une mesure de la VO2 max. En résumé la base du bilan de l’hypertendu voulant reprendre le sport (de loisir) repose sur l’évaluation du risque CV, le contrôle de sa pression artérielle (de repos). Chez l’inactif une épreuve d’effort est souvent recommandée, chez l’actif ou le sportif régulier, elle est recommandée en fonction de l’intensité envisagée. Le suivi dépendra également du sport et du type de pratique : une consultation annuelle dédiée et une EE tous les 1 à 5 ans selon le risque CV en cas d’activité de « loisir » d’intensité modérée, une consultation annuelle et la réévaluation de l’intérêt d’une EE en cas de loisir intense ou de compétition. Enfin, il est utile de rappeler que l’inactivité physique tue plus que le tabagisme !(12) Spécificités du sportif hypertendu D’après F. Carré, Rennes Pour débuter l’exposé, il est bon de rappeler que la mesure de la PA doit être réalisée avec un brassard adapté à la musculature (réflexe souvent pris pour les sujets obèses mais peu chez les sujets « musclés »). De plus chez le sportif : – il faut éviter de mesurer la PA dans les 24 h qui suivent un effort intense ce dernier pouvant être suivi soit par une poussée tensionnelle, soit au contraire avoir un effet hypotenseur ; – éliminer une prise d’AINS (fréquente chez les sportifs) ; – penser à un éventuel dopage, en cas de survenue d’une HTA chez un jeune sportif (dans ce cas l’inversion du rythme avec perte du dipping à la MAPA est souvent un signe associé) ; – enfin l’HTA éventuelle doit être confirmée par une mesure ambulatoire (MAPA ou automesure). Les seuils de définitions de l’HTA étant les mêmes que chez les non-sportifs. En termes d’épidémiologie, le niveau de PA chez les sportifs ne diffère pas de celui des nonentraînés et contrairement aux idées reçues, il n’y a pas plus d’hypertendus chez les haltérophiles que dans les autres populations (même si leur niveau de PA est en moyenne un peu plus élevé surtout chez ceux qui ont plus de 10 h d’entraînement par semaine)(13). La prévalence de l’hypertension chez les sportifs est inversement corrélée au niveau de l’activité physique (elle n’est que de 3 % chez les sportifs de haut niveau. En revanche, l’HTA masquée semble plus fréquente chez les sportifs. Le bilan médical du sportif hypertendu comporte un bilan « classique » de l’hypertendu : examen clinique, ECG de repos, évaluation du risque CV, bilan de retentissement de l’HTA ; plus un bilan spécifique « sport » : une épreuve d’effort et une échographie cardiaque de repos ciblée : à noter que la pratique du sport entraîne une dilatation des cavités cardiaques mais pas d’HVG, donc en cas d’HVG cela marque une atteinte liée à l’HTA et non au sport. L’indication de l’épreuve d’effort dépend du risque CV et permet : – le dépistage de la maladie coronarienne ; – en théorie la recherche d’une arythmie cardiaque mais à noter que c’est un examen peu performant ; – d’obtenir des données de PA (avec quelques réserves dans la mesure où l’exercice réalisé pour le test est souvent très différent des efforts réalisés durant les activités physiques) ; – mais également d’évaluer la performance individuelle ce qui aide à guider l’entraînement. La réponse tensionnelle à l’effort diffère selon que l’effort est : – dynamique : effort au cours duquel on a une augmentation du pourcentage de consommation maximale d’oxygène individuelle (% VO2 max) : par exemple par ordre croissant : bowling, volley- ball, ski de fond, etc. ; – ou statique (= isométrique) effort au cours duquel on a une augmentation de la force maximale volontaire individuelle, les activités statiques entraînent une plus grande augmentation de la PAS : musculation, escalade, etc... À noter que la plupart des sports sont mixtes, nécessitant des efforts à la fois dynamiques et statiques, par exemple la boxe, le cyclisme avec côtes, ski de randonnée. La PA systolique maximale atteinte pendant un entraînement ne varie pas énormément entre les différents sports, par contre on note une différence hommes/femmes. Et les sportifs ayant une PA plus élevées à la fin de l’effort ont une masse ventriculaire gauche plus élevées(14). Pendant un exercice dynamique progressif, il y a une augmentation progressive et linéaire de la PAS en fonction de l’effort chez les normotendus comme chez les hypertendus, en d’autres termes, lorsque la PA de repos est plus élevée, la PAS au maximum de l’effort est plus élevée. Cette élévation ne doit pas faire peur ; au contraire une non-élévation de la PAS est inquiétante. Donc finalement, il ne faut pas se limiter à la valeur absolue de la PA durant l’effort mais plutôt interpréter sa cinétique(15). Pour repère, la PA atteinte pendant une EE est environ 201/ 105 mmHg chez les hommes et 190/105 mmHg chez les femmes. La formule de Rost et coll. permet de calculer une PAS maximale théorique en fonction de l’âge et de la puissance de l’exercice : PAS (mmHg) = 147 + 0,334* Puissance (Watts) + 0,31* âge (années)(16). Finalement, il faut retenir que l’HTA d’effort est seulement un marqueur de risque cardiovasculaire mais on ne traite que l’HTA de repos. Un autre élément souvent méconnu est qu’au cours d’un exercice dynamique prolongé, constant et modéré, la PA diminue et reste abaissée le temps que la vasodilatation, liée à l’exercice musculaire, se stabilise (phénomène non détecté par les épreuves d’effort qui demandent des efforts intenses car la vasodilatation est un phénomène progressif). En d’autres termes, il ne faut pas prendre son traitement antihypertenseur avant un marathon… Finalement quels sont les risques ? L’hypertension artérielle non équilibrée limite la performance aérobie en partie à cause de la postcharge élevée, surtout en cas d’HVG et/ou de dysfonction diastolique. L’entraînement améliore la VO2max de l’hypertendu. Le sport n’aggrave pas l’HVG due à l’HTA et peut améliorer la dysfonction diastolique. L’HTA n’est pas une cause directe de mort subite sur le terrain de sport mais il faut toujours éliminer une maladie coronaire significative. L’autorisation de pratique sportive doit être précédée par un bilan spécialisé adapté à l’ancienneté et à la gravité de l’HTA. La métaanalyse de Cornelissen et coll. rapporte que l’entraînement régulier permet une diminution de la PA : après 4 semaines d’entraînement les baisses moyennes de PAS/PAD sont de : -3,5/-2,5 mmHg pour l’endurance ; -1,8/-3,2 mmHg pour la musculation dynamique ; -5,5/-3,9 musculation statique. À noter, une « efficacité » moindre chez les femmes vs les hommes et 25 % de sujets sont « non répondeurs » à l’entraînement en ce qui concerne la PA(17). Enfin contrairement aux idées reçues, les activités « statiques » sont en fait plus « efficaces » sur la baisse de PA que les activités dynamiques. De même la pratique fractionnée (par exemple au tennis) donne les mêmes bénéfices sur la PA que l’entraînement continu. Concernant le traitement pharmacologique de l’hypertendu sportif, il correspond au schéma général classique. Il faut donc trouver le meilleur compromis entre efficacité tensionnelle et maintien du niveau de performance, seul garant d’une bonne observance chez l’hypertendu sportif. Les inhibiteurs du SRAA et les inhibiteurs calciques n’ont pas d’effet limitant sur la performance. À savoir que les bêtabloquants sont interdits en compétition et limitent la performance aérobie en cas d’entraînement important. Par ailleurs les diurétiques sont interdits en compétition dans la mesure où ils sont un produit masquant… Épidémiologie Automesure tensionnelle en France en 2019 : apport de l’étude Baromètre Santé D’après V. Olié (Saint-Maurice) Les recommandations françaises et internationales prônent l’utilisation de la mesure de la PA en dehors du cabinet médical pour confirmer le diagnostic d’HTA que ce soit par automesure tensionnelle (AMT) ou par mesure ambulatoire de la PA (MAPA), les valeurs mesurées de la PA en ambulatoire étant plus étroitement associées au risque cardiovasculaire que les valeurs mesurées en consultation. D’après les enquêtes FLAHS de ces dernières années, le recours à l’AMT a augmenté en France depuis le début des années 2000 avec un peu moins de la moitié des hypertendus qui possèdent un appareil, mais cette proportion semble stagner depuis 2012. Par ailleurs, si le recours à l’AMT devrait permettre d’améliorer la prise en charge des patients hypertendus, cela nécessite que le médecin accède à ces données. L’étude publiée dans le Baromètre Santé dont les résultats ont été présentés par V. Olié de Santé publique France, avait pour objectifs : – d’estimer la proportion d’hypertendus traités possédant un appareil d’automesure tensionnelle à domicile ; – d’estimer la proportion de patients qui transmettait les données à leur médecin ; – d’étudier les déterminants de la possession d’un appareil et de la transmission des données. Les différentes enquêtes « Baromètres Santé » sont des enquêtes menées en population générale, par téléphone, ayant pour objectif de décrire les comportements, attitudes et perceptions des Français en matière de santé. L’enquête présentée ici s’est déroulée de janvier à juin 2019 avec pour objectif d’interviewer 10 000 personnes à partir d’une base de sondage construite par Ipsos de manière aléatoire. La constitution de l’échantillon s’est faite en 2 étapes : par génération aléatoire de numéros de téléphone fixes ou mobiles puis par tirage d’un individu parmi des sujets éligibles âgés de 18 à 75 ans. Pendant 5 mois, 5 vagues mensuelles chacune d’environ 2 000 interviews ont été réalisées. Le taux de participation observé en 2019, sur la base des ménages contactés est de 44,9 % (44,5 % sur l’échantillon filaire et 45,2 % sur l’échantillon mobile). Afin d’assurer une complète représentativité de l’étude un redressement d’échantillon à ensuite eu lieu. L’échantillon a inclus 10 352 sujets (52 % de femmes) dont 17,6 % étaient hypertendus, 15,6 % hypertendus traités. Parmi les hypertendus, l’HTA était suivi par le médecin traitant dans 92 % des cas et par un spécialiste dans 47 % des cas. Parmi les hypertendus traités, 62,6 % des sujets affirmaient posséder un appareil d’AMT à domicile ; mais par contre, parmi les sujets possédant un appareil d’automesure, seul 56,3 % transmettait les informations de la PA prise à domicile à leur médecin. Les facteurs associés au fait de posséder un appareil d’AMT étaient : – l’âge (augmentation de la proportion avec l’âge) ; – un niveau d’éducation plus élevés ; – le fait d’être suivi par un spécialiste ; – le fait de rechercher des informations sur leur traitement sur le net. Les facteurs associés à plus « de transmission de leurs valeurs d’AMT à leur médecin » étaient : – le suivi par un spécialiste vs le médecin traitant ; – avoir des effets secondaires liés au traitement ; – rechercher des informations sur leur traitement sur le net. En conclusion, il semble qu’il y ait une meilleure efficacité de la promotion de l’automesure chez les hypertendus ayant un suivi avec un spécialiste vs ceux ayant un suivi exclusif par leur médecin traitant. Les facteurs âge et instruction peuvent être en rapport avec plus de possibilités financières ou avec plus d’intérêt porté à sa santé, il est rappelé que les appareils d’automesure tensionnelle ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale… Le recours à l’automesure atteint un niveau élevé en France avec plus de 60 % des hypertendus traités qui dispose d’un appareil à domicile. Cependant, la transmission des données au médecin traitant reste encore insuffisante et pourrait être améliorée, notamment auprès des médecins généralistes. Prévalence des désordres hypertensifs pendant la grossesse et le postpartum en France D’après V. Olié (Saint-Maurice) Les désordres hypertensifs de la grossesse et notamment la prééclampsie représentent une cause importante de morbi-mortalité maternelle. En effet, un tiers des naissances de grands prématurés sont liées à la survenue d’une prééclampsie. Par ailleurs, la prééclampsie est associée à une augmentation du risque de complications métaboliques, cardiovasculaires et rénales chez les femmes à court et long terme. Depuis quelques années, les données issues d’autres pays que la France rapportent une augmentation de la prévalence des désordres hypertensifs durant la grossesse, augmentation qui serait liée, d’une part, au recul de l’âge de la première grossesse : entre 1995 et 2016, le pourcentage de femmes âgées de plus de 35 ans lors de leur première grossesse est passé de 12,5 % à 21,3 %(18) ; et, d’autre part, à l’ augmentation de la prévalence du surpoids et de l’obésité chez les femmes (7,5 % de femmes obèse en 1995 vs 11,8 % en 2016). En France, il y a actuellement peu de données récentes sur la prévalence des désordres hypertensifs liés à la grossesse. Cet article résume les présentations de V. Olié de Santé publique France de 2 études réalisées sur une même cohorte issue des bases de données médico-administratives : les données du Système national des données de santé (SNDS). La première étude avait donc pour objectif de donner une estimation actuelle de la prévalence des désordres tensionnelles chez les femmes en âges de procréer en France et de l’incidence des prééclampsies, la seconde s’intéressait au risque cardiovasculaire et de décès à court terme chez les femmes présentant des désordres hypertensifs de la grossesse et du post-partum. Le SNDS regroupe les données de santé pour l’ensemble des assurés sociaux en France (soit 99 % de la population française). À partir d’un identifiant unique, elles permettent de lier les données individuelles de l’assurance maladie : informations sociodémographiques, consommation de soins : actes, consultation et traitement) ; aux données du PMSI et aux causes de décès. La population d’étude comprenait toutes les femmes ayant accouché au moins une fois entre 2010 et 2016 en France métropolitaine et dans les DROM (excepté Mayotte) et affiliées au régime général ou Section locale mutualiste (soit 90 % de la population féminine en âge de procréer). Le seul critère d’exclusion était l’accouchement sous X. Une extraction des traitements antihypertenseurs délivrés pendant la grossesse, le post-partum et dans l’année précédant la grossesse a été réalisée pour toutes les femmes de la cohorte. L’identification des différents désordres hypertensifs s’est faite selon les critères suivants : – une HTA chronique préexistante était définie par au moins 3 délivrances d’un traitement antihypertenseur à des dates différentes pendant l’année précédant la grossesse et jusqu’à 20 SA ; – une HTA chronique persistante pendant la grossesse était définie par la présence d’une HTA chronique ET une hospitalisation avec un diagnostic principal ou relié d’hypertension hors prééclampsie OU au moins une délivrance d’un traitement antihypertenseur entre la 20e SA et la 6e semaine de post-partum ; – une HTA gestationnelle était définie par au moins une délivrance d’un traitement antihypertenseur entre la 20e SA et la 6e semaine de post-partum ET aucune hospitalisation pour menace d’accouchement prématuré OU une hospitalisation avec un diagnostic principal ou relié d’HTA gestationnelle ; – une prééclampsie/éclampsie, HELLP Syndrome étaient définie par une hospitalisation avec un diagnostic principal ou relié de prééclampsie ou d’éclampsie ou HELLP syndrome entre la 20e SA et les 6 semaines de postpartum. La prééclampsie était considérée comme précoce si elle survenait avant 32 SA. Pour la période 2010-2016, la cohorte comprenait 3 786 510 femmes (et 4 991 308 accouchements). Concernant la prévalence des désordres hypertensifs (première présentation), les résultats présentés séparément chez les nullipares et chez les multipares, rapportent respectivement une prévalence de 8,9 % de désordres hypertensifs (quels que qu’ils soient) chez les nullipares et 6,9 % chez les multipares. À âge égal (prévalence standardisée sur la structure d’âge des femmes enceintes), les désordres hypertensifs sont plus fréquents chez les nullipares. Les prévalences standardisées des prééclampsies étaient de 3,1 % chez les nullipares et de 1,1 % chez les mulitipares. Les prééclampsies surviennent de manière précoce dans 13,5 % des cas chez les nullipares et 12 % chez les multipares. Chez les nullipares, les prééclampsies surviennent majoritairement après 32 SA (62 %), contre 17,2 % de prééclampsies précoces (avant 32 SA) et 20,7 % en post-partum. L’HTA gestationnelle est le désordre tensionnel préexistant, le plus fréquent avant un épisode de prééclampsie (22 %), 16,6 % des prééclampsies surviennent chez des hypertendues chroniques (HTA préexistantes à la grossesse), et 21,3 % suite à une HTA chronique persistante. Seuls 1,4 % des cas de prééclampsie, n’étaient pas précédés de désordre tensionnel (connu). En conclusion, ces données rapportent une prévalence de la prééclampsie de 2,1 % en France sur 2010-2016). En Europe, des données plus anciennes rapportaient une prévalence de 2,8 % en Norvège et 5,2 % en Suède(19). Aux États-Unis, la prévalence de la prééclampsie est comprise entre 2,6 % et 4 % selon les études qui n’utilisent pas toutes la même classification. En conclusion, les désordres hypertensifs impactent près de 8 % des grossesses en France, avec des prévalences plus élevées chez les nullipares et la prévalence des désordres hypertensifs augmentent de manière importante avec l’âge maternel (35 ans) et l’âge gestationnel. Dans un second temps et toujours sur la même population, les événements cardiovasculaires : syndrome coronarien aigu (SCA), accident vasculaire cérébral (AVC), embolie pulmonaire (EP), insuffisance cardiaque (IC), thrombose veineuse cérébrale (TVC), ainsi que les cas de décès survenant pendant la grossesse et le post-partum ont été identifiés à partir des données du PMSI afin de décrire le risque cardiovasculaire et de décès à court terme chez les femmes présentant des désordres hypertensifs de la grossesse et du post-partum (deuxième exposé). L’impact à court terme des désordres hypertensifs a été estimé par le calcul des rapports d’incidence de maladies cardiovasculaires entre les femmes présentant un désordre hypertensif et les femmes sans aucun désordre. Les 2 périodes « pendant » la grossesse et la période du post-partum, ont été considérées séparément. Les résultats montrent que l’HTA chronique (persistante ou non) est associée de manière significative à une augmentation du risque d’EP, d’AVC, de SCA et d’insuffisance cardiaque pendant la grossesse et le postpartum, ainsi qu’au risque de décès en post-partum. Les résultats sont à peu près similaires en cas d’HTA gestationnelle (avec en plus un risque augmenté de thrombose veineuse cérébrale). La prééclampsie (tardive ou précoce) est également associée à une augmentation de tous les événements cardiovasculaires et une augmentation des décès en post-partum, avec un doublement du risque CV après une prééclampsie précoce vs tardive. Par rapport aux données de la littérature, plusieurs études européennes ont rapporté une augmentation du risque d’EP chez les femmes prééclamptiques (IRR = 3-6 dans le post-partum, NS pendant la grossesse), par contre les résultats étaient plus controversés sur l’HTA chronique. Concernant l’infarctus du myocarde, il y a peu d’études et leurs résultats restent controversés pour la prééclampsie. En effet, certaines données rapportent que l’augmentation du risque d’infarctus serait plutôt liée à l’HTA chronique. Ces données peu décrites dans la littérature restent cependant descriptives et rapportent peutêtre des facteurs d’association et non de causalité, les désordres hypertensifs et les maladies cardiovasculaires partageant les mêmes facteurs de risque. Prise en charge de l’hypertension artérielle en France en 2015 : l’étude ESTEBAN L’étude ESTEBAN, dont les résultats avaient été présentés l’an passé a été menée entre 2014 et 2016 et avait rapporté que la prévalence de l’HTA en France était estimée à environ 30 % de la population adulte ne montrant aucune diminution de la prévalence depuis celle observée en 2006 dans l’enquête ENNS(20). Pour rappel, l’étude ESTEBAN est une enquête transversale constituant une source de données adaptée pour l’étude de la prise en charge de l’HTA en France grâce à : – un examen clinique de santé complet avec mesure de la PA ; – un appariement des données de l’enquête avec le Système national des données de santé (SNDS) permettant un recueil exhaustif de toutes les délivrances de traitement dans l’année précédant l’examen de santé ainsi que l’ensemble des dates et le nombre de consultations chez le médecin généraliste ou spécialiste dans l’année précédant l’examen de santé. Cette enquête a eu lieu en France métropolitaine, chez des adultes âgés de 18 à 74 ans. Les participants ont répondu à des questionnaires de santé et alimentaires et ont eu un examen de santé réalisé en centre d’examen de santé ou à domicile comprenant trois mesures de la PA de façon protocolisée. L’objectif de cette analyse ancillaire réalisée à partir des données d’ESTEBAN était de décrire la prise en charge des patients hypertendus traités pharmacologiquement. Les sujets étaient considérés comme hypertendus si leur examen retrouvait des valeurs de la PAS > 140 mmHg ou de la PAD > 90 mmHg ou s’ils avaient bénéficié d’une délivrance d’un traitement antihypertenseur (pour HTA) dans les 6 mois précédent l’examen de santé. L’observance a été évaluée à partir du pourcentage de jours couverts par un traitement luimême estimé à partir du nombre de boîtes délivrées, du nombre de comprimés par boîte et du nombre de classes du traitement pris (mono-, bi- ou trithérapie). Un sujet était considéré comme observant si la proportion de jours couverts dans les 6 mois précédant l’examen de santé est supérieure à 80 %. Les résultats de l’analyse rapportent qu’en moyenne les sujets hypertendus avaient 10,2 visites chez le médecin généraliste dans l’année qui précédait l’étude. Parmi les sujets hypertendus, 14 % avaient également recours à un cardiologue avec un nombre moyen de consultation de 1,8 par an. Concernant le niveau tensionnel des sujets hypertendus, parmi les hypertendus traités, seulement la moitié (49,6 %) avaient une PA inférieure à 140/90, 35,3 % avaient un niveau de PAS 140-159 et/ou PAD 90-99 (correspondant à une HTA grade 1) ; 9,9 % avaient un niveau de PAS 160-179 et/ou PAD 100-109 (correspondant à une HTA grade 2) et 5,2 % avaient un niveau de PAS > 180 et/ou PAD > 110 (correspondant à une HTA grade 3). À noter que chez les hypertendus non traités, 78 % avaient une HTA grade 1, 15 % une HTA grade 2 et 6,4 % une HTA grade 3. Concernant les thérapies antihypertensives, 62 % des hypertendus traités étaient sous monothérapie, 34 % sous bithérapie et 4 % seulement bénéficiaient d’une tri- ou d’une quadrithérapie. Par ordre décroissant, les classes les plus délivrées étaient les ARAII, les IEC, les bêtabloquants, les inhibiteurs calciques, et enfin les diurétiques. À noter que 19,5 % des sujets hypertendus traités avaient une monothérapie par bêtabloquant. La bithérapie la plus délivrée était l’association ARAII /diurétique suivie de l’association IEC/diurétique. Selon la définition suscitée, l’observance globale était de 33,6 % et, de manière inattendue, diminuaient selon les tranches d’âge de 43,3 % chez les 18-54 ans, à 36,4 % chez les 55-64 ans, et de 25,7 % chez les 65-74 ans. L’observance était moins bonne chez les femmes que chez les hommes chez les 55-64 ans et les 65-74 ans. La connaissance du statut hypertendu a également été étudiée rapportant une mauvaise connaissance de leur condition par les patients hypertendus. En effet, seulement 55 % des sujets hypertendus en avaient connaissance, cette donnée pour la France est faible et n’a pas progressé depuis 2006 contrairement aux autres pays (supérieure à 70 % Angleterre et au Portugal et supérieure à 80 % au Canada, en Allemagne et aux États-Unis). Pourtant 84 % des personnes de l’enquête déclarent avoir eu une mesure de la PA dans l’année précédant l’examen de santé. Plusieurs hypothèses sont donc à évoquer : – un problème de dépistage ? – un problème d’annonce du diagnostic ? – un problème de compréhension du diagnostic par les patients ? On peut émettre l’hypothèse que l’amélioration de la connaissance de son statut vis-à-vis de l’HTA permettrait d’augmenter de manière « mécanique » la proportion de patient traités et contrôlés. Par ailleurs, les autres résultats notables de cette enquête sont : – la prescription (encore) importante des bêtabloquants en monothérapie alors qu’ils ne sont plus recommandés en première intention ; – l’observance au traitement antihypertenseur très faible dans cette étude et très différente de ce qui est estimé dans les enquêtes déclaratives (FLAHS, Baromètre Santé) : laissant poser la question d’un biais de désirabilité sociale lors de l’évaluation de l’observance par questionnaire. En conclusion, la prise en charge de l’HTA en France n’a connu aucune amélioration au cours des 10 dernières années contrairement à la plupart des pays développés. La connaissance de leur statut d’hypertendu par les patients et l’observance aux traitements pourraient constituer des priorités dans l’amélioration de la prise en charge de l’hypertension artérielle en France.

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