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Diabéto-Cardio

Publié le 01 oct 2019Lecture 12 min

Dernières recommandations sur les tests d’effort

Dany-Michel M. MARCADET*, Bruno PAVY**, *Centre Cœur & Santé Bernoulli, Paris **Machecoul

Le GERS-P (Groupe Exercice Réadaptation Sport et Prévention de la Société française de Cardiologie) a jugé nécessaire d’entreprendre une mise à jour des recommandations concernant la pratique des tests d’effort en cardiologie, les précédentes datant de 1997(1), il devenait indispensable d’intégrer les nombreux travaux publiés depuis cette date(2). Ces nouvelles recommandations présentent de nombreuses nouveautés et permettent de préciser à la fois les conditions de réalisation des tests d’effort, leur interprétation et les nouvelles indications en cardiologie. Elles s’appliquent aussi à la mesure des gaz expirés, aux tests d’effort pratiqués en médecine nucléaire et aux échocardiogrammes d’effort. Elles sont téléchargeables sur le site du GERS-P (https://www.sfcardio.fr/recommandations-sfc).

Conditions de réalisation des tests d’effort Cette première partie est particulièrement importante, car elle concerne les conditions de sécurité, le local, le matériel et le personnel nécessaire pour la réalisation de cet examen. Le risque de survenue d’une complication cardiovasculaire pouvant engager le pronostic vital est exceptionnel, mais non nul. La réalisation d’une épreuve d’effort (EE), quelle que soit son indication, impose donc toujours des conditions techniques et de sécurité optimale. La structure d’accueil Elle doit disposer d’une unité de soins intensifs de cardiologie. Dans le cas contraire, il faudra alors mettre en place une série de mesures. • Création d’une salle de déchoquage spécifique, équipée du matériel nécessaire à une réanimation cardiaque (scope, défibrillateur, chariot d’urgence, matériel d’intubation et de ventilation), dans l’attente d’un transfert éventuel du patient. • Assurer l’accès des patients par voie de convention avec un autre établissement de santé possédant une unité de soins intensifs cardiologiques. Un protocole d’intervention et d’évacuation d’urgence doit être établi avec le SMUR ou le SAMU. La salle d’examen doit être suffisamment grande pour permettre une circulation aisée autour du patient. Elle doit disposer d’un téléphone, d’une source d’oxygène, d’un système d’aspiration des mucosités prêt à l’emploi, d’un chariot d’urgence avec défibrillateur et du matériel destiné à protéger le personnel des expositions au sang et autres liquides biologiques. Le matériel d’épreuve d’effort (tapis roulant, bicyclette ergométrique) doit être régulièrement étalonné. Le matériel médical de surveillance des EE doit être conforme aux normes en vigueur et comporter : un appareillage d’électrocardiographie (ECG) d’effort permettant d’enregistrer 12 dérivations, dont au moins trois de manière simultanée. Ce système doit permettre un monitorage visuel permanent de l’ECG pendant l’effort et la récupération. Les tracés ECG enregistrés doivent être de bonne qualité et sans artéfacts. Tout événement électrocardiographique doit être enregistrable. La réalisation de tracés informatisés moyennés avec possibilité d’impression de l’ECG en temps réel est fortement recommandée. On devra disposer d’un matériel adapté pour une mesure régulière de la pression artérielle. La présence d’un appareil d’analyse des échanges gazeux ou d’un échocardiographe est facultative. Le local devra enfin disposer du même matériel que celui de la salle d’urgence pour les structures qui ne possèdent pas de soins intensifs avec une fiche de conduite à tenir en cas de survenue d’une complication grave, réclamant une réanimation et/ou une évacuation d’urgence. Elle doit comprendre en particulier les algorithmes de réanimation cardiopulmonaire (RCP) et d’usage du défibrillateur, actualisés selon les recommandations en vigueur et doit inclure les numéros d’urgence (appel d’aide complémentaire, SAMU-SMUR). Ces numéros devront aussi être clairement affichés dans le local. L’épreuve d’effort cardiologique doit être menée sous la responsabilité d’un cardiologue familiarisé avec cet examen. Il est en particulier garant de la sécurité du patient. Il doit s’assurer de la qualité du local, du matériel utilisé et du niveau de compétence du personnel. Il est responsable de l’indication, de la vérification de l’absence de contre-indication et de l’information du sujet pour obtenir son consentement (fiche de consentement patient téléchargeable). Celle-ci est disponible sur : https://www.sfcardio.fr/information-et-consentement-du-patient-en-readaptation-cardiovasculaire-1/information-et-consentement-du-patient-en-readaptation-cardiovasculaire. Il doit assurer la surveillance en permanence de l’examen et intervenir immédiatement en cas de complication. Il devra enfin, faire respecter la prévention des risques infectieux. Ce cardiologue est obligatoirement assisté d’un collaborateur (médecin, infirmière, technicien de laboratoire) pendant la réalisation du test. Ce collaborateur doit être formé à la pratique de l’examen, mais aussi aux gestes d’urgence. La présence de deux personnes expérimentées est donc nécessaire, pendant le déroulement de l’EE, quel que soit le risque cardiovasculaire du sujet. Le cardiologue et le personnel doivent suivre régulièrement des mises à niveau pour l’actualisation des connaissances et maîtriser les gestes d’urgence(4). On considère deux grandes indications. La première indication reste le diagnostic et l’évaluation de l’insuffisance coronarienne. La deuxième c’est l’évaluation du pronostic, non seulement des cardiopathies ischémiques, mais aussi de la plupart des autres cardiopathies et ouvre donc le champ à des pathologies qui jusque-là étaient des contre-indications(5,6). Méthodologie La préparation du sujet et l’obtention du consentement sont particulièrement détaillés. Le choix de l’ergomètre, vélo ou tapis roulant, et le choix du protocole d’exercice sont aussi importants pour l’interprétation de l’examen, car la capacité physique, élément clé du pronostic, peut être largement modifiée par un protocole non adapté. Il faut adapter le protocole au patient et non l’inverse. Le sujet doit réaliser un exercice dynamique progressif et maximal ou limité par des symptômes, selon un mode triangulaire avec des paliers de durée constante (1 à 3 minutes), et d’intensité croissante. Un choix large de protocoles d’effort, basé sur une augmentation régulière de la charge correspondant de 1 à 3 Mets (1 Met = 3,5 ml O2/min/kg). Un incrément trop important de la charge ou des paliers trop longs peuvent respectivement surestimer ou sous-estimer la capacité physique. Les protocoles en « rampe » avec augmentation continue de la charge après une période d’échauffement sont recommandés en particulier pour la mesure des gaz expirés (EEVO 2)(6). L’individualisation de la rampe est simple à réaliser à partir de la puissance maximale théorique du sujet. Les critères d’arrêt de l’effort sont l’épuisement du sujet, l’observation de symptômes (cliniques, électrocardiographiques, tensionnels) ou l’apparition de complications. L’atteinte isolée de la fréquence cardiaque maximale théorique (FMT) ne doit plus être utilisée comme seul critère d’arrêt d’une EE. Lors d’une EE-VO2, l’observation d’un plateau de la consommation maximale d’O2 est le critère le plus utilisé, mais ce plateau est souvent absent chez les patients et les sujets âgés. L’effort sera alors considéré comme maximal si la valeur du quotient respiratoire (rapport VCO2/VO2 ou QR) ≥ 1,1 avant 50 ans, 1,05 entre 50 et 64 ans et 1 après 65 ans. L’interprétation diagnostique L’interprétation de l’EE en cardiologie ne doit plus se limiter à l’analyse de l’ECG pour le diagnostic de la maladie coronaire, elle doit être multivariée pour proposer un pronostic du risque individuel(7). Les modifications de la repolarisation Elles sont toujours au premier plan, sus ou sous-décalage de ST de plus de 1 mm, en intégrant l’index ST/FC pour plus de précision diagnostique(8). Les modifications des QRS sont précisées, essentiellement élargissement et déviations axiales(9,10). L’interprétation doit être bayésienne, c’està- dire qu’elle doit tenir compte de la probabilité de lésions coronaires en prétest. Cette probabilité est évaluée à partir de tables tenant compte de l’âge, du sexe, du type de douleur thoracique (non angineuse, atypique ou typique). Cette probabilité est précisée en fonction de l’existence de facteurs de risque. Les résultats de l’examen donnent donc une probabilité post-test en faveur de l’existence de lésions coronaires. On ne doit donc plus dire qu’un test est positif, négatif ou litigieux, mais répondre par une probabilité de lésions coronaires faible, intermédiaire ou forte(2). L’utilisation de scores pour évaluer cette probabilité est très pratique et permet d’avoir une conduite à tenir claire après la réalisation de l’examen pour proposer un examen complémentaire comme un test d’imagerie ou directement une coronarographie. L’étude de la fréquence cardiaque à l’effort est un élément nouveau à prendre en compte L’incompétence chronotrope est une accélération insuffisante de la FC pour le niveau d’effort réalisé(11,12). Il existe une insuffisance chronotrope lors-que la FC maximale atteinte est inférieure à 85 % de la FMT, ou inférieure à 80 % de la réserve chronotrope représenté par la formule suivante : FMT - FC repos. On ne parlera d’insuffisance chronotrope que si l’effort est considéré comme maximal sur les autres critères, puissance théorique atteinte, hyperventilation, QR > 1,1, épuisement musculaire. Bien entendu, les traitements, notamment bêtabloquants, seront pris en compte. La fréquence cardiaque de récupération est un autre élément indépendant à prendre en considération. Une récupération lente de la FC est un facteur de mauvais pronostic(13,14). L’évaluation du pronostic À côté du diagnostic de l’insuffisance coronarienne, l’évaluation pronostique a pris une place de plus en plus importante. Elle reste un élément clé pour la prise de décision dans beaucoup de cardiopathies. La capacité fonctionnelle individuelle Elle est reconnue comme le meilleur marqueur actuel d’espérance de vie, indépendamment de l’âge, du sexe, de l’origine ethnique et des pathologies associées(15). Elle correspond à la puissance aérobie maximale qu’un sujet peut développer. Lors d’une EE, elle peut être exprimée soit par la puissance développée en watts, soit par le double produit (PA systolique maximale x FC maximale), ou par la durée de l’exercice, soit enfin et c’est ce qui est recommandé en Mets. Lors d’un EE-VO2, elle est évaluée par le VO2 max exprimé en l/min, ou en Mets (ml/min/kg). Exprimée en valeur relative par rapport à la valeur théorique déterminée à partir de l’âge, du sexe, de la taille et parfois de l’activité physique pratiquée, la capacité fonctionnelle d’un patient permet de chiffrer un éventuel déficit par rapport à un sujet apparié sain de même niveau d’entraînement(5,17). Le profil d’élévation de la pression artérielle à côté de l’évolution de la fréquence cardiaque Autre élément important à intégrer dans les conclusions de l’examen : le premier était déjà évoqué dans les recommandations de 1997, la non-élévation, voire la chute de la pression artérielle à l’effort signe la sévérité de la cardiopathie(18). Cette évaluation est basée sur la capacité fonctionnelle idéalement évaluée par un test EE-VO2. Les paramètres principaux sont le pic de VO2, la pente VE/VCO2, la Pet CO2 et l’étude de la cinétique de l’O2 en récupération. Le pic de VO2 explore le système cardiovasculaire avec la capacité de transporter l’oxygène en périphérie, le système respiratoire et le système musculaire qui consommera d’autant plus d’oxygène qu’il est développé. Le pronostic sera encore plus précis si les données de la EE-VO2 sont associées aux paramètres déjà cités plus haut de la fréquence cardiaque à l’effort et en récupération, au profil tensionnel et par l’existence de complications au cours du test, trouble du rythme ou de la conduction(19). Nouvelles indications À part quelques indications de diagnostic de trouble du rythme ou de la conduction à l’effort, les nouvelles indications de l’EE ne concernent essentiellement que l’évaluation du pronostic. Parmi les nouvelles indications, en dehors de la maladie coronaire. On notera : L’insuffisance cardiaque L’insuffisance cardiaque tient la première place. Les critères de sévérité sont parfaitement identifiés. L’examen ne sera réalisé que lorsque l’insuffisance cardiaque est stabilisée. On utilisera une mesure directe de la VO2 plutôt qu’une estimation des Mets par un ECG d’effort simple. Le protocole doit absolument être adapté au patient en choisissant un incrément de 1 % Met par minute. Les principaux paramètres sont le pic de VO2, la VO2 au seuil, la pente VE/VCO2 (pathologique si > 34), la Pet CO2 (anormale si < 33 mmHg). D’autres paramètres ont démontré leur valeur pronostique ; la puissance circulatoire [PAS*pic VO2], la puissance ventilatoire [PAS*pente VE/VCO2], l’existence d’oscillations, la cinétique de la VO2 en récupération, l’insuffisance chronotrope et une fréquence de récupération trop élevée(20,21). Les pathologies valvulaires Dès qu’il existe une discordance entre les résultats de l’échographie et de l’examen clinique. L’intérêt du test d’effort est de rechercher une indication opératoire sur la tolérance à l’effort, de dépister des symptômes, d’observer des complications (trouble du rythme de la conduction ou de la repolarisation), et d’évaluer les valeurs du pic de VO2 et de la pente VE/VCO2(20,21). Le profil tensionnel est intéressant en cas d’obstacle à l’éjection du ventricule gauche. La cardiomyopathie hypertrophique Auparavant une contre-indication à l’ECG d’effort, le test est indiqué pour aider à la décision d’une alcoolisation septale, d’une myomectomie ou d’une greffe cardiaque. Le test peut être pratiqué sans diminuer la sécurité du patient. Dans cette indication, l’évolution de la pression artérielle à l’effort, l’apparition de troubles du rythme sont importants à considérer à côté des données de la mesure des gaz expirés(22). L’hypertension artérielle pulmonaire Elle aussi auparavant contreindiquée, l’étude de VE/VCO2 est particulièrement intéressante. Une élévation brutale traduit habituellement l’existence d’un shunt droit-gauche. La pente VE/VCO2 est élevée lorsque l’HTAP est sévère alors que le pic de VO2 diminue(23). L’évaluation des troubles du rythme et de la conduction L’EE permet de préciser les circonstances de déclenchement et la sévérité du trouble : extrasystoles ventriculaires fréquentes, polymorphes, polyphasiques, précoces survenant à l’effort et en récupération immédiate. Arythmies supraventriculaires déclenchées par l’effort ou en récupération immédiate. On l’utilise aussi pour le réglage des stimulateurs et des défibrillateurs implantés(24,25). Autres situations Les autres recommandations précisent la place de l’ECG d’effort dans différentes populations ou dans différentes situations en précisant à chaque fois sa valeur diagnostique et pronostique. Chez les sujets asymptomatiques ou dans le cadre de professions particulières, chez les pilotes d’avion par exemple, le sportif, la femme et le sujet âgé. Chez l’enfant, ou la VO2 prend là encore une place importante pour l’évaluation des cardiopathies congénitales et l’appréciation des résultats de la cure chirurgicale(26,27). Chez le diabétique, dans l’artérite des membres inférieurs et dans l’hypertension artérielle, chez les patients à qui une réadaptation cardiaque est prescrite ou dans le cadre de la reprise du sport chez l’adulte(20). Ces nouvelles recommandations sont considérablement différentes de celles de 1997 et précisent la place de cet examen dans l’arsenal des examens complémentaires mis à la disposition des cardiologues. Une meilleure valeur diagnostique dans l’insuffisance coronarienne, une grande valeur pronostique, quelle que soit la pathologie sous-jacente a étendu ses indications pratiquement à l’ensemble des maladies cardiovasculaires. En pratique Les points importants dans les nouvelles recommandations de la SFC sur les tests d’effort en cardiologie. 1. Dans le diagnostic de l’insuffisance coronarienne • l’angor, les modifications de ST et le ST/FC index restent les premiers signes en faveur d’une ischémie myocardique ; • l’Interprétation doit être multivariée ; • intégrer l’insuffisance chronotrope et la fréquence cardiaque de récupération ; • les modifications de QRS (élargissement, déviations axiales) ; • utiliser les scores intégrant les facteurs de risque, l’histoire clinique, l’âge, le sexe, le taux de lipides, le tabagisme, l’hypertension artérielle. 2. Dans l’évaluation du pronostic • évaluation de la capacité physique en Mets (de préférence en utilisant la mesure des gaz expirés [une capacité < 5 Mets est de mauvais pronostic]) ; • le pic de VO2, la VO2 au seuil et la pente VE/VCO2 sont les paramètres principaux de l’évaluation du pronostic (à comparer aux théoriques) ; • faible élévation, voire chute de la pression artérielle à l’effort ; • insuffisance chronotrope et/ou fréquence cardiaque de récupération trop élevée ; • troubles du rythme ou de la conduction apparaissant à l’effort ou en récupération immédiate. 3. Dans les indications En dehors de l’insuffisance coronarienne, pratiquement toutes les cardiopathies chroniques stables peuvent être évaluées : • insuffisance cardiaque ; • cardiopathies valvulaires lorsqu’il existe une discordance entre les données cliniques et l’échocardiographie ; • l’hypertension artérielle pulmonaire ; • les cardiomyopathies hypertrophiques ; • les cardiopathies congénitales ; • les troubles du rythme et de la conduction.

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