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Congrès et symposiums

Publié le 14 oct 2016Lecture 5 min

Les points forts de l’ESC 2016 à Rome

D. ANGOULVANT, CHRU de Tours et Université François Rabelais

« Notre savoir scientifique se doit de progresser en posant des questions et en recherchant des réponses. » Ces quelques mots simples extraits du discours du Pape François prononcé à l’occasion de l’ESC 2016 à Rome résument assez bien la démarche de nos collègues chercheurs fondamentalistes et cliniciens venus présenter leurs résultats et partager leur expertise avec la communauté cardiovasculaire. Suivant ce format de questions-réponses, je vous propose d’aborder deux sujets de recherche translationnelle qui ont retenu mon attention à l’occasion du congrès.

Peut-on espérer intervenir sur la modulation épigénétique pour prévenir et traiter les maladies cardiovasculaires ? D’après les communications de L. Hein (Freiburg, Allemagne), S. Dimmeler (Frankfurt, Allemagne), S. Yla-Herttuala (Kuopio, Finlande) et L. De Windt (Maastricht, Pays-Bas) L’épigénétique intéresse les mécanismes qui modifient l’expression des gènes sans intervenir sur la séquence d’ADN. On y retrouve entre autres des phénomènes de méthylation (attache d’un groupement méthyl, CH3, sur l’ADN nucléaire) et de modification des histones (protéines autour desquelles l’ADN s’enroule). Ainsi sous l’effet de ces phénomènes certains gènes sont susceptibles d’être plus ou moins exprimés, modifiant le phénotype des cellules, des tissus et des organes. La régulation épigénétique est susceptible d’être modifiée en réponse à des stimuli environnementaux et à des molécules d’où l’intérêt de l’étudier pour développer de nouvelles stratégies thérapeutiques. Plusieurs sessions ont traité de régulation épigénétique amenant les éléments suivants à notre connaissance. Une hypométhylation (diminution de la densité des groupements CH3 sur la structure de l’ADN) est observé dans les cellules cardiaques dans divers phénotypes de cardiopathie ainsi que dans les cellules impliquées dans l’athérosclérose. Un parallèle est fait avec la physiopathologie des cellules tumorales qui présentent également des phénomènes d’hypo méthylation aboutissant à la réexpression de gènes fœtaux responsables de prolifération cellulaire. De la même façon, l’hypométhylation modifie l’expression de certains micro-ARN qui vont influencer ensuite l’expression ou la suppression de gènes impliqués dans le développement des cardiopathies et dans les capacités de régénérations du myocarde. Le développement d’agents pharmacologiques susceptibles de moduler la méthylation dans ces pathologies pourrait constituer une nouvelle voie thérapeutique à la fois dans les cardiopathies et dans la prévention de l’athérosclérose. Existe-t-il un avenir pour la thérapie cellulaire cardiaque ? Pas de révolution dans ce domaine qui a souvent déçu ces dernières années mais peut-être un nouvel espoir. Les hypothèses mécanistiques en la matière se sont diversifiées. On retrouve l’objectif initial de régénérer le myocarde pathologique en implantant des cellules cardiaques ou des progéniteurs de cellules cardiaques mais de nouveaux travaux y compris cliniques cherchent à implanter des cellules qui auront une action de type pharmacologique au sein du myocarde pathologique : des cellules délivrant dans le myocarde malade des facteurs de croissance et des cytokines pouvant réguler l’inflammation, le remodelage, la microvascularisation, etc. Deux études cliniques ont été présentées abordant ces deux types de stratégies. L’étude CHART-1 a testé l’injection endomyocardique de cellules cardiopoïétiques autologues chez des patients porteurs de cardiopathie ischémique sévère symptomatique (FEVG = 27 %, 78 % en classe NYHA III ou IV). Il s’agit de cellules souches mésenchymateuses, extraites de la moelle osseuse de patient, qui sont prétraitées in vitro par un cocktail de facteurs de croissance afin de stimuler leur différentiation vers un phénotype de cardiomyocytes. Ces cellules sont ensuite réinjectées dans le myocarde du patient dont elle proviennent (injection autologue). L’objectif ici était bien de régénérer le myocarde et d’obtenir un bénéfice clinique et fonctionnel incluant mortalité, décompensations cardiaques, qualité de vie, test de marche de 6 minutes, dilatation du VG et FEVG. La randomisation a produit un groupe de 120 patients recevant les cellules et un groupe contrôle de 151 patients ayant une procédure sham sans injection de cellules. Aucune différence significative n’était observée à 12 mois sur le critère majeur ou ses composants. Des analyses exploratoires réalisées secondairement sur différents sous-groupes de patients suggèrent que ceux ayant initialement une dilatation plus importante du VG et chez lesquels un nombre restreint de sites d’injection endomyocardique avaient été utilisés présentaient un bénéfice plus important sur des critères de qualité de vie et de performance au test de marche. Un nouvel échec pour l’hypothèse de régénération myocardique même si les auteurs identifient un potentiel sous-groupe d’intérêt. Une deuxième étude présentée dans la même session des hotlines apporte un vent nouveau dans ce domaine. Les chercheurs ont cette fois-ci testé la sécurité et l’efficacité d’une injection intraveineuse périphérique de cellules souches mésenchymateuses (1,5 million de cellules/kg) préalablement traitées in vitro pour mieux résister à l’ischémie, chez 22 patients porteurs de cardiopathie non ischémique sévère. Les cellules injectées étaient toutes issues d’un seul individu sain et, de ce fait, il s’agissait bien d’une injection de cellules allogéniques. L’étude était réalisée en simple aveugle avec crossover à 90 jours, l’injection contrôle étant composée de Ringer Lactate. Les cellules étant injectées dans une veine périphérique, c’est bien leur effet pharmacologique qui est testé avec l’hypothèse que ces cellules, une fois dans la circulation du receveur, vont en partie migrer préférentiellement vers les organes en souffrance comme le myocarde. Cette étude pilote a montré la faisabilité et la sécurité de cette stratégie nouvellement testée chez l’homme. Il n’y avait bien entendu pas la puissance nécessaire pour montrer un bénéfice clinique pertinent même si le test de marche de 6 minutes apparaissait significativement amélioré après injection de cellules. La portée de cette étude est plus importante qu’il n’y paraît. L’injection de cellules souches mésenchymateuses allogéniques n’est pas une première chez l’homme mais en cardiologie, elle ouvre la possibilité de mettre en oeuvre la thérapie cellulaire en phase aiguë (d’un IDM ou d’une décompensation cardiaque) et chez des patients ayant une qualité de moelle osseuse dégradée ne permettant pas de produire des cellules souches mésenchymateuses en nombre et en qualité requise (phénomène observé chez les patients âgés ayant des comorbidités). Ceci est rendu possible par les propriétés immunomodulatrices singulières des cellules souches mésenchymateuses et il est probable que dans les prochaines années, d’autres essais thérapeutiques de plus grande ampleur testent cette fois avec une puissance suffi sante l’efficacité de ce concept de « cellules souches médicaments » chez les patients.

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