publicité
Facebook Facebook Facebook Partager

Coronaires

Publié le 14 mar 2016Lecture 7 min

La thrombose de stent, un vieux souvenir ?

B. LATTUCA(1), T. CUISSET(2), G. LEMESLE(3), G. FINET(4), M. KERNÉIS(5), G. CAYLA(1), 1. Département de cardiologie, CHU Caremeau, Nîmes - 2. Service de cardiologie, CHU La Timone, Marseille - 3. Unité de Soins Intensifs Cardiologiques, CHU de Lille - 4.


JESFC
La thrombose de stent (TS) est définie par une occlusion artérielle au niveau d’un stent précédemment mis en place sans composante de resténose sévère évolutive ou de nouvelle rupture de plaque à distance pouvant expliquer un phénomène embolique. Les critères diagnostiques et de classification(1) sont représentés dans la figure 1. 

Figure 1. Définition des thromboses de stent selon les critères ARC (Academic Research Consortium). Bien que son incidence ait drastiquement diminué par la conjonction d’améliorations techniques et pharmacologiques ainsi que par une meilleure connaissance de son mécanisme, la TS reste un événement redouté de la cardiologie interventionnelle avec un pronostic qui reste sombre. Son incidence actuelle varie entre 0,5 et 1,5 % dans la première année qui suit l’implantation avec les stents de dernière génération. La TS est plus fréquemment observée dans le contexte de syndrome coronarien aigu en comparaison à l’angioplastie élective. Le mode de présentation le plus fréquent est celui de l’infarctus avec une masse thrombotique souvent importante et une mortalité de 20 à 40 % pour les TS précoces et de 5 à 10 % pour les TS tardives et très tardives retrouvées dans les registres observationnels(2).   La thrombose de stent, un mécanisme plurifactoriel   La TS reste un modèle de complication plurifactorielle(3) associant une composante mécanique liée au stent lui-même et à la procédure d’implantation, à l’environnement pharmacologique et tout particulièrement antithrombotique qui a évolué avec le temps et bien évidemment au contexte clinique et aux caractéristiques du patient. De nombreux facteurs de risque de TS ont été décrits(4-7) et sont représentés dans la figure 2. Au-delà de la lésion coronaire elle-même et sa complexité, le patient reste bien évidemment au centre de cette évaluation avec des facteurs de risque tels que le diabète, l’âge avancé, la dysfonction ventriculaire gauche, l’insuffisance rénale, le profil génétique ou encore l’adhérence au traitement antithrombotique dont l’arrêt prématuré ou la suspension sont reconnus comme vrais pourvoyeurs de TS. Figure 2. Mécanismes impliqués dans la thrombose de stent. La thrombose de stent, une simple histoire de traitement ?   De manière concomitante au développement et à l’amélioration des endoprothèses coronaires, la stratégie antithrombotique a vu de nombreuses révolutions (figure 3). Il est important de se rappeler que les toutes premières implantations ont été grevées de lourdes complications avec des taux de TS de près de 25 % alors que le traitement recommandé associait anti-vitamine K et aspirine(8). L’avènement de la double antiagrégation plaquettaire avec l’essor de la ticlopidine a permis de sauver en quelque sorte l’angioplastie percutanée avec une diminution nette des taux de TS en dessous de 4 %(9-12). L’évolution a ensuite été marquée par le développement de plusieurs inhibiteurs du récepteur plaquettaire P2Y12 avec tout d’abord avec le clopidogrel(13,14) dont de nombreuses limites ont été mises en évidence lors de son utilisation avec une variabilité de réponse et une résistance pharmacologique fréquente(15). De très nombreuses études ont fait un lien entre l’hyperactivité plaquettaire résiduelle sous clopidogrel et le risque de TS(16). L’utilisation de plus fortes doses de clopidogrel(17) et surtout le développement de nouvelles molécules telles que le prasugrel et le ticagrelor, tout particulièrement dans le contexte du syndrome coronarien aigu(18,19) ont tenté de pallier ces limites avec une réduction de 50 % de TS avec ces nouvelles molécules. L’ensemble de ces optimisations pharmacologiques a ainsi permis d’abaisser le taux de TS en dessous de la barre symbolique des 1 %. Figure 3. Évolution chronologique des taux de thrombose de stent en fonction de l’optimisation des stents et du traitement antithrombotique. La thrombose de stent, une histoire de mécanique ?   Malgré l’amélioration progressive de la stratégie antithrombotique associée à une compliance parfaite indispensable, la thrombose de stent n’a pas pu être éradiquée et reste corrélée à la procédure d’implantation elle-même. La lésion traitée joue un rôle central avec un risque accru en cas de lésion complexe impliquant tout particulièrement une bifurcation, une lésion longue, tortueuse ou calcifiée. D’autre part, la technique utilisée et le respect de la procédure semble jouer un rôle majeur pour limiter le risque de dissection, de fracture de stent ou de malapposition entraînant une thrombogénicité augmentée. Certains facteurs liés aux stents sont également modifiables et la composante mécanique de la TS est représentée dans la figure 4. La longueur totale du segment stenté, le nombre total de stents, le diamètre minimal du stent, mais aussi l’épaisseur des mailles sont des facteurs universellement reconnus de TS précoce ou tardive. La réduction de l’épaisseur de la maille a été incontestablement associée à une diminution de la survenue d’une thrombose aiguë mais l’apparition de fractures de stent sur des plateformes ayant moins de force radiale a été incriminée dans le développement des thromboses très tardives. Le développement de polymère biocompatible et résorbable est aussi associé à une réduction de la survenue des thromboses très tardives. De même, le zotarolimus et l’évérolimus sont associés à moins de TS tardives par rapport au sirolimus ou au paclitaxel( 20,21) tout comme l’utilisation de stents avec des polymères biodégradables(22). Ainsi, les endoprothèses actives de dernière génération s’accompagnent d’une réduction des TS très tardives par rapport aux stents nus. Figure 4. Composante mécanique de la thrombose de stent. Une réelle avancée avec les stents biorésorbables ?   Les stents biorésorbables ont été développés dans le but d’une récupération à long terme d’une fonction physiologique et anatomique de l’artère avec l’espoir d’une diminution de l’inflammation chronique et d’une disparition du risque de thrombose après biorésorption du scaffold (36 mois pour le stent ABSORB (Abbott Vascular). Les premières études randomisées et les premiers registres observationnels font état d’une efficacité comparable aux stents actifs à l’évérolimus mais d’un taux de TS discrètement plus élevé que les stents actifs dans la première année après l’implantation (figure 5). Les facteurs associés à une augmentation de la thrombose de scaffold sont les petits vaisseaux (< 2,5 mm) et les lésions complexes ou les bifurcations. La qualité de l’implantation avec i) le choix de la bonne taille du scaffold, ii) la prédilatation et iii) la postdilatation systématique, semble avoir un impact important sur la fréquence de ces thromboses. Les designs actuels des stents biorésorbables sont amenés à évoluer avec la réduction de l’épaisseur des mailles, l’augmentation de la vitesse de résorption et l’optimisation de la force radiale qui peuvent faire espérer des résultats sur la réduction des taux de TS. Figure 5. Représentation des taux de thrombose de stents biorésorbables. Les histogrammes représentent les taux de TS dans des populations de coronaropathie stable, de SCA et de patients tout-venant et les nombres au-dessus représentent le nombre de patients inclus dans chacune de ces études.  Quelle conduite à tenir en cas de thrombose de stent ?   La TS nécessite une prise en charge urgente avec la restauration d’un flux coronaire efficace et l’intensification du traitement antithrombotique. Le récent registre français PESTO publié par l’équipe de Clermont-Ferrand(23) confirme l’intérêt majeur de la réalisation d’une imagerie endocoronaire (OCT : Optical Coherence Tomography) dans les TS avec des anomalies très fréquemment retrouvées avec par ordre de fréquence une malapposition du stent, de nouvelles lésions athérosclérotiques évolutives, une mauvaise expansion du stent, une invagination coronaire, un défaut d’endothélialisation avec des mailles non recouvertes ou une hyperplasie intimale. Un autre fac teur majeur, et retrouvé dans toutes les études, concerne le traitement antiplaquettaire avec au premier plan l’arrêt prématuré du traitement d’origine médicale ou lié à une mauvaise compliance. Les nouveaux inhibiteurs du récepteur plaquettaire P2Y12 (prasugrel et ticagrelor) sont les traitements de première ligne après une TS du fait de leur meilleure efficacité et la durée de la bithérapie antiplaquettaire se doit d’être prolongée après un premier épisode de TS avec un minimum de 12 mois dont la poursuite au-delà sera évaluée de manière individualisée en fonction du risque hémorragique de chaque patient.   En pratique    Bien que peu fréquente, la thrombose de stent reste une complication grave. Il existe de nombreux facteurs de risque liés au patient, au traitement antithrombotique, à la procédure d’angioplastie, à la sélection des lésions et au stent lui-même. Les nouveaux inhibiteurs du récepteur plaquettaire P2Y12 diminuent par deux le risque de thrombose de stent par rapport au clopidogrel. Les stents actifs de dernière génération diminuent de 30 à 50 % le risque de thrombose en comparaison des stents nus ou des stents actifs de première génération. L’imagerie endocoronaire apporte des éléments cruciaux dans l’évaluation des mécanismes d’une thrombose de stent. Bien que prometteur au long terme, les stents biorésorbables n’ont pas encore montré de réduction de thrombose de stent mais de nombreuses améliorations techniques sont à venir.  

Attention, pour des raisons réglementaires ce site est réservé aux professionnels de santé.

pour voir la suite, inscrivez-vous gratuitement.

Si vous êtes déjà inscrit,
connectez vous :

Si vous n'êtes pas encore inscrit au site,
inscrivez-vous gratuitement :

Version PDF

Articles sur le même thème

  •  
  • 1 sur 81

Vidéo sur le même thème