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Congrès et symposiums

Publié le 29 fév 2016Lecture 8 min

Cardiomyopathie hypertrophique de l’adulte - Quels sont les examens essentiels ?

A. HAGÈGE, Département de cardiologie, Hôpital européen Georges Pompidou, Paris


JESFC
Les recommandations 2014 de la Société européenne de cardiologie(1) précisent quels sont les examens à réaliser pour le diagnostic et le suivi d’une cardiomyopathie hypertrophique (CMH), ainsi que les examens nécessaires aux orientations thérapeutiques. Si la CMH est le plus souvent due à des mutations sur des gènes codant pour des protéines du sarcomère cardiaque, il est indispensable d’éliminer les CMH non sarcomériques, essentiellement chez l’adulte amylose, maladie mitochondriale et maladie de Fabry, qui peuvent avoir des traitements spécifiques et qui représentent environ 10 % des cas.

Les examens toujours recommandés sont dits de classe I ; ceux qui devraient être le plus souvent envisagés sont dits de classe IIa ; ceux qui peuvent être éventuellement envisagés sont dits de classe IIb ; les examens non recommandés sont dits de classe III. On se limitera ici à la CMH de l’adulte de plus de 16 ans.   Examens essentiels au diagnostic   Diagnostic positif de CMH : le rôle essentiel de l’imagerie Le diagnostic de CMH est basé sur la présence d’une hypertrophie ventriculaire gauche (HVG) non expliquée uniquement par les conditions de charge ventriculaire. Un seuil ≥ 15 mm est exigé et ≥ 13 mm lors des enquêtes familiales chez les collatéraux du premier degré. C’est l’échocardiographie qui est privilégiée en première intention (recommandation de classe I), mais l’IRM cardiaque est recommandée lorsque le patient est peu échogène ou qu’il y a un doute diagnostique (classe I) et le scanner cardiaque en cas de contre-indication à l’IRM (classe IIa). L’IRM permet de plus de détecter la fibrose myocardique visualisée sous forme de rehaussement du signal sur les clichés tardifs après injection de gadolinium. Elle est présente chez environ 70 % des patients et absente en cas d’HVG physiologique, notamment chez l’athlète de haut niveau. Elle peut permettre d’autre part de détecter la présence d’une HVG non visualisée par échographie, notamment au niveau de la paroi antéro-latérale du ventricule gauche (jusqu’à 6 % des cas)(2), et peut donc être justifiée en cas de suspicion diagnostique (ECG) lorsque l’échographie revient normale.   Diagnostic des CMH non sarcomériques : ECG, imagerie et biologie • ECG Il est bien sûr systématique (classe I). L’existence d’un PR court, avec ou sans aspect de préexcitation, doit faire rechercher une maladie de Fabry, une maladie mitochondriale ou une maladie de surcharge ; un bloc atrio-ventriculaire complet, ayant éventuellement nécessité la pose d’un pacemaker définitif, doit faire rechercher une maladie de Fabry, une amylose, une maladie mitochondriale ou une mutation du gène PRKAG2 ; un QRS microvolté ou de voltage normal en dépit d’une HVG marquée est retrouvé dans 50 % des cas d’amylose AL, et dans 20 % des cas d’amylose à transthyrétine, sauvage (sénile) ou mutée (familiale). • Échocardiographie La découverte d’un épanchement péricardique modéré, d’un aspect scintillant du myocarde ventriculaire, d’une hypokinésie ventriculaire gauche, d’une HVG concentrique et symétrique, d’une HVG extrême, ou d’une association de l’HVG avec une hypertrophie ventriculaire droite doit faire évoquer des étiologies non sarcomériques, en premier lieu maladie de Fabry, maladie mitochondriale, amylose cardiaque, maladie de surcharge, etc. • IRM avec injection de gadolinium Elle a aussi intérêt pour le diagnostic différentiel, évoquant une amylose lorsque le rehaussement tardif est global sur toute l’épaisseur de la paroi ventriculaire, ou une maladie de Fabry lorsqu’il est limité à la région postéro-latérale du ventricule gauche. • Scintigraphie osseuse Lorsqu’elle met en évidence une fixation cardiaque exclusive, la scintigraphie osseuse (99mTc- DPD) a une grande spécificité pour le diagnostic d’amylose à transthyrétine, qu’elle soit sénile ou familiale (transmission autosomale dominante), et doit être envisagée (classe IIa) chez les hommes de plus de 65 ans, avec HVG concentrique, signes d’insuffisance cardiaque (40 % sont en classe III/IV), à fraction d’éjection modérément altérée (35-55 %)(3). • Biologie Des examens de laboratoire doivent être systématiquement réalisés lors de la découverte d’une CMH. Sont évocateurs d’une CMH non sarcomérique : - une atteinte de la fonction rénale avec protéinurie (maladie de Fabry, maladie mitochondriale ou amylose) ; - une élévation des ALAT et ASAT (maladies mitochondriales) ou des CPK (maladie de Danon) ; - une élévation de la glycémie (maladies mitochondriales) ; - une anomalie de l’électrophorèse des protides ou de l’immunoélectrophorèse, la présence d’une protéinurie, la présence de chaînes libres dans le plasma ou les urines (amylose AL) ; - un dosage effondré d’α-galactosidase A plasmatique ou intraleucocytaire (< 10 %) chez l’homme, spécifique de la maladie de Fabry. L’étude FOCUS, promue par la Société française de cardiologie et menée sur 392 patients avec CMH d’allure sarcomérique et suivis en milieu cardiologique, avait montré que, chez 1,8 % de la population masculine de plus de 40 ans, la CMH est en fait due à une maladie de Fabry, le diagnostic permettant la mise en route du traitement par enzymothérapie substitutive(3) ; - doivent être également dosés la troponine T et le NT-proBNP ou le BNP, dont l’élévation est prédictive du risque (morbidité et mortalité) cardiovasculaire(5-7).   Examens essentiels pour la prise en charge   Échocardiographie Doppler transthoracique de repos et d’effort Cet examen essentiel permet : • De dépister une obstruction intraventriculaire gauche (recommandation de classe I). Elle est considérée comme présente si ≥ 30 mmHg et comme cliniquement significative si ≥ 50 mmHg, pouvant alors faire éventuellement discuter (lorsque sous-aortique, due au SAM de la valve mitrale, chez les patients en stade NYHA III) une thérapeutique ablative. • De quantifier l’obstruction au repos et durant une manœuvre de Valsalva en position assise ou semi-assise ; lorsque le gradient reste < 50 mmHg, on doit tenter de provoquer un gradient ≥ 50 mmHg par une manoeuvre de passage de la position accroupie à la position debout. • Lorsque le gradient reste < 50 mmHg, une échographie d’effort devrait être réalisée par les sujets symptomatiques (classe IIa), voire asymptomatiques (classe IIb). • D’éliminer les gradients non liés à un SAM, dus à une membrane sous-aortique, à des anomalies de la valve mitrale (excès d’étoffe, de longueur, insertion directe de pilier mitral sur le corps du feuillet antérieur) ou à une obstruction médioventriculaire. • D’évaluer la fraction d’éjection ventriculaire gauche (FEVG) par la méthode de Simpson biplan. En cas de CMH, une FEVG < 50 % est considérée comme très altérée. • De préciser la forme du ventricule gauche. La présence d’un anévrisme apical par exemple, souvent mieux visible en IRM, permet d’orienter le traitement médical (bêtabloquants si troubles rythmiques, anticoagulants) comme le pronostic (il s’agit d’un critère mineur de mort subite). • D’évaluer la fonction diastolique du ventricule gauche (classe I) par l’étude du Doppler pulsé du flux transmitral diastolique, vélocités Doppler tissulaire à l’anneau mitral, Doppler pulsé du flux veineux pulmonaire, et mesures de la pression artérielle pulmonaire systolique et de la taille de l’oreillette gauche. • De quantifier 3 paramètres essentiels pour le calcul du risque de mort subite à 5 ans (recommandation de classe I) : - épaisseur maximale (en mm) du ventricule gauche en échographie, avec étude de tous les segments ventriculaires sur 3 coupes bidimensionnelles à la base, au niveau des piliers et à l’apex (alternativement le scanner cardiaque ou l’IRM peuvent être utilisés) ; - gradient maximal instantané sous-aortique (mmHg), de repos (même s’il est < 30 mmHg) et au Valsalva ; - diamètre antéro-postérieur de l’oreillette gauche (mm) sur la coupe parasternale grand axe du ventricule gauche. Cette équation de risque, qui inclut également l’âge, les antécédents familiaux de mort subite à un âge jeune, de syncope, de tachycardies ventriculaires non soutenues au Holter ECG de 48 heures, est disponible en ligne sur le site de l’ESC.   Holter ECG La pose d’un Holter ECG de 48 h est recommandée lors de l’évaluation initiale (classe I), à la recherche de troubles du rythme cardiaque.   L’IRM avec recherche de rehaussement tardif • Elle devrait être envisagée même en cas de CMH confirmée pour mieux évaluer l’anatomie, la fonction ventriculaire gauche ainsi que la présence et l’étendue de la fibrose intramyocardique (classe IIa). • Elle devrait être également envisagée en cas de suspicion d’anévrisme apical, d’hypertrophie apicale ou d’amylose (classe IIa). • Elle peut être aussi envisagée avant ablation septale ou myectomie (classe IIb).   Les tests génétiques • Ils sont recommandés en cas de maladie confirmée pour permettre le dépistage génétique en cascade chez les apparentés du premier degré (classe I). • Ils devraient être effectués seulement après une évaluation détaillée et précise en cas de diagnostic incertain (classe IIa), car la découverte dans ce cas de variants génétiques sans certitude de pathogénicité est fréquente. • Ils doivent être envisagés chez les enfants dès 10 ans, si ce diagnostic a un impact sur la prise en charge sur la vie de tous les jours, ou le dépistage clinique ultérieur (classe IIa), ce qui est le plus souvent le cas. • Lorsqu’ils sont négatifs chez le sujet index ou ne sont pas réalisés chez les apparentés, ECG et échographies devraient être répétés (classe IIa) : - tous les 6 à 12 mois en cas d’anomalie non diagnostique ; - tous les 1 à 2 ans entre 10 et 20 ans ; - tous les 2 à 5 ans chez l’adulte.   L’ECG d’effort avec si possible étude de la VO2 • Il devrait être envisagé lors de l’évaluation initiale (classe IIa), notamment pour quantifier la sévérité de l’intolérance à l’effort. • La mesure de la pression artérielle à l’effort est recommandée afin de rechercher une réponse tensionnelle anormale à l’effort (augmentation < 20 mmHg ou chute tensionnelle) considérée comme un élément pronostique péjoratif avant 40-50 ans (classe IIa). • Il devrait être réalisé avant ablation septale ou chirurgie (classe IIa).   Examens nécessaires dans des circonstances particulières   En cas de syncope ou palpitations inexpliquées En cas de syncope inexpliquée, devront être réalisés systématiquement (classe I), un ECG d’effort, une échocardiographie de repos et d’effort et un Holter ECG de 48 h. En cas de syncope inexpliquée récidivante, chez les patients à risque faible de mort subite, un Holter implantable doit être envisagé (classe IIa). L’exploration électrophysiologique n’est pas recommandée (classe III). En cas de palpitations, un Holter ECG de 48 h doit être systématique (classe I). Lorsque la cause n’est pas identifiée et que les palpitations persistent, un Holter implantable peut être envisagé (classe IIb).   Échocardiographie invasive L’échographie de contraste intracoronaire doit être réalisée chez tous les patients en transthoracique durant les procédures d’alcoolisation septale (classe I). L’échographie transoesophagienne : - devrait être envisagée en cas d’échogénicité insuffisante en transthoracique (classe IIa) ; - devrait être envisagée lorsque l’obstruction sous-aortique n’est possiblement pas due (ou uniquement) à un SAM de la valve mitrale (classe IIa) ; - devrait être envisagée avant ablation septale en cas de suspicion d’anomalie structurelle mitrale ou de fuite mitrale sévère (classe IIa) ; - est recommandée avant et pendant myectomie chirurgicale (classe I).   Autres tests invasifs L’exploration électrophysiologique est recommandée lorsque l’on souhaite faire l’ablation d’une tachycardie ventriculaire ou d’une voie de préexcitation (classe I) mais n’est pas recommandée pour la stratification du risque de mort subite (classe III). La coronarographie est recommandée en cas d’arrêt cardiaque récupéré, de tachycardie ventriculaire soutenue ou d’angor sévère (classe I) et devrait être aussi envisagée en cas de douleurs thoraciques d’effort typique ou avant ablation septale (classe IIa) ; dans ce dernier cas, le scanner coronaire devrait être aussi envisagé en lieu et place de la coronarographie (classe IIa). La biopsie myocardique peut être envisagée en cas de suspicion de maladie de surcharge ou infiltrative non confirmée par les autres examens (et notamment la génétique ou la biopsie d’un autre tissu) (classe IIb). Les examens essentiels au diagnostic et au suivi d’une CMH sont détaillés dans les tableaux 1 et 2 avec les niveaux correspondants de recommandation. 

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