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Paramédical

Publié le 25 mar 2020Lecture 9 min

Pandémie Covid-19 et impact sur l’organisation paramédicale en cardiologie interventionnelle

Hervé FALTOT, Hôpital Albert Schweitzer, Colmar

Documentée en France à partir du 24 janvier 2020 et du recensement des trois premiers cas, la pandémie mondiale de Covid-19 a entraîné dès février une crise sanitaire sans précédent dans notre pays. Cette épidémie a conduit les établissements de santé à modifier la prise en charge des patients, souvent dans l’urgence, face à l’afflux des malades atteints du coronavirus. Le secteur de la cardiologie interventionnelle ne fut pas épargné et les différents centres concernés ont dû, à l’instar de toutes les autres activités hospitalières, s’adapter à une situation inédite et totalement inconnue.

Les équipes médicales et paramédicales des salles de cathétérisme ont très rapidement renforcé les unités dédiées Covid-19 ou de réanimation, dépassées dans certaines régions par la situation. La rédaction, elle aussi en urgence, de protocoles spécifiques à notre activité de cardiologie interventionnelle a permis de réduire le risque de contamination des patients et du personnel tout en assurant la sécurité des gestes interventionnels. Dans un contexte qui place les paramédicaux de salle de cathé en première ligne de la lutte contre le virus puisque étant en contact direct avec des patients étiquetés « suspects » voire « Covid + », il est alors légitime de se poser certaines questions. Quel circuit spécifique pour ces patients contaminés ? Quelles mesures prendre pour ne pas être à notre tour victime de ce virus, ô combien dangereux ? Dans quels cas faut-il porter un masque FFP2 ? Dans quels cas le masque chirurgical peut-il suffire à nous protéger ? De quels autres moyens de protection faut-il disposer en salle de cathétérisme ?   • Coronavirus ou SARS-COV-2 : Quels dangers et quels impacts pour notre activité ?  Le coronavirus, identifié en janvier 2020 en Chine, provoque une maladie nommée Covid-19 par l’Organisation Mondiale de la Santé. Sur son site internet dédié à la pandémie(1), le gouvernement rappelle les trois raisons qui animent la dangerosité de ce virus : Il est très contagieux, puisque chaque personne infectée va contaminer au moins 3 personnes en l’absence de mesures de protection. Il est contagieux avant d’être symptomatique, c’est-à-dire qu’une personne contaminée, qui ne ressent pas de symptômes peut contaminer d’autres personnes. Environ 15 % des cas constatés entraînent des complications et 5 % de ces dernières nécessitent une hospitalisation en réanimation. Le mode de transmission de la maladie se fait par gouttelettes (sécrétions projetées invisibles lors d’une discussion, d’éternuements ou de la toux). On considère donc qu’un contact étroit avec une personne malade est nécessaire pour transmettre la maladie : même lieu de vie, contact direct à moins d’un mètre lors d’une discussion, d’une toux, d’un éternuement ou en l’absence de mesures de protection. Un des autres vecteurs privilégiés de la transmission du virus est le contact des mains non lavées souillées par des gouttelettes. C’est donc pourquoi les gestes barrières (figure 1), les mesures de distanciation sociale et le confinement chez soi sont indispensables pour se protéger de la maladie. Figure 1. Les gestes barrières à adopter pour limiter la propagation du coronavirus. Ces reflexes, à acquérir pour tout un chacun, sont évidemment adoptés au sein de chaque établissement de santé. L’activité spécifique de cardiologie interventionnelle doit prendre en compte toutes ces problématiques de contamination, ce qui génère ainsi une refonte totale de son fonctionnement. En salle de cathé, il est indispensable de prendre toutes les mesures pour limiter les contacts et la propagation du virus, d’assurer une protection maximale pour le patient, mais aussi pour l’ensemble du personnel présent. • Les conseils du GACI(2) Suite au plan blanc déclenché en deux temps par le gouvernement (6 mars pour les régions Grand Est et Ile de France, puis le 13 mars avec un élargissement à toutes les structures hospitalières), les membres du bureau du Groupe Athérome Coronaire et Cardiologie Interventionnelle (GACI) ont adressé un courrier à tous les cardiologues interventionnels afin qu’ils « limitent » leur activité interventionnelle en reportant tout examen non urgent entre 2 et 3 mois et de tenir compte au cas par cas de la balance bénéfice-risque pour tout examen retenu. Il est important de tenir compte des ressources sur le plan anesthésique, cardiologique ainsi que de la disponibilité des USIC pour la prise en charge des patients cardiaques. L’âge des patients et leurs comorbidités seront également des paramètres importants à prendre en compte. Liste des examens retenus Syndrome coronaire aigu avec ou sans sus-décalage du segment ST ; Angor instable ; Angor stable (avec aggravation récente ou tests fonctionnels très positifs avec signe de gravité, suspicion d’atteinte proximale ou en cas de dysfonction ventriculaire du ventricule gauche) ; Indication de TAVI et/ou de MitraClip chez les patients très symptomatiques. Cette demande du GACI vise à réduire le risque de contamination des patients et du personnel, le taux d’occupation des services d’hospitalisation, à limiter les ressources d’anesthésistes, à ne pas utiliser les places de réanimation (qui pourraient être occupées par des patients dans les suites de complications liées aux gestes interventionnels), à libérer enfin un maximum de cardiologues face à l’afflux des patients, le tout dans un contexte de continuité des soins par l’assurance de prise en charge des urgences cardiologiques. • Concrètement, comment organiser cette activité en cas de pandémie ? Dans ce même courrier du 1er mars, les membres du bureau du GACI préconisent la mise en place dans les unités de cardiologie interventionnelle d’un circuit spécifiquement dédié aux patients porteurs du virus (circuit que l’on va alors appeler « Covid + »). Lorsque l’unité dispose au moins de deux salles de cathétérisme, il faut que l’une des deux soit dédiée « Covid + » pour laquelle sera disponible l’ensemble des moyens de protection pour le personnel oeuvrant dans cette salle. Cette salle sera dépourvue de toute armoire inutile et comprendra le strict minimum pour la réalisation de l’examen. Le personnel présent en salle sera lui aussi limité et habillé avec des équipements de protection spécifiques (encadré). En ce qui concerne les systèmes d’aération dans les salles de cathétérisme, il est, si c’est possible pour votre installation, opportun de basculer les systèmes en pression négative pour générer un flux d’air vers l’intérieur de la salle et ainsi d’éviter toute sortie d’air potentiellement « contaminé » vers l’extérieur(3). Le bionettoyage de l’ensemble des surfaces est essentiel, constituant l’une des clés pour limiter et enrayer la propogation du virus. Il permettra de diminuer le risque de transmission manuportée par l’intermédiaire des surfaces pouvant entrer en contact avec les mains des patients ou des soignants. Les salles de cathétérisme nécessiteront un nettoyage suivant les protocoles d’aseptisation spécifique au Covid-19 qui peuvent entraîner des retards prévisibles pour les procédures suivantes. Étant donné la nécessité d’aseptiser la salle de cathé à la suite des procédures des patients infectés, les examens pour les patients positifs ou suspects devraient être effectués à la fin du programme opératoire si possible. En période de pandémie, deux scénarios basés sur la contamination ou non du patient dictent sa prise en charge en salle de cathé. Le patient est suspect ou porteur Covid + Dès son accueil, le patient portant un masque chirurgical est pris en charge par un membre de l’équipe paramédicale qui porte charlotte à usage unique, masque FFP2 (figure 2), lunettes de protection, gants, tenue de bloc à usage unique revêtue d’une sur-blouse (à manches longues et à usage unique) par-dessus laquelle un tablier plastique (soins mouillants ou souillants), lui aussi à usage unique. Il est inutile de rappeler l’importance de la désinfection des mains par friction hydroalcoolique avec respect des 7 étapes de la friction, avant la mise en place des équipements de protection et après leur retrait. Lors de l’arrivée du patient, il faut s’assurer que l’accès à la salle de cathétérisme soit libre. L’équipe dédiée en charge du patient est constituée d’un cardiologue et de deux paramédicaux, idéalement trois selon l’état du patient. Le rôle de chacun doit être défini à l’avance : installation du patient par un ou deux personnels, monitoring et préparation de la voie d’abord. Si le champage n’est pas réalisé par le cardiologue mais par un paramédical aide-opérateur, ce dernier, avant de s’habiller stérilement, devra retirer ses équipements de protection avant de sortir de la salle de cathétérisme, en respectant les règles suivantes : retrait du tablier plastique et de la sur-blouse en les roulant sur leur face externe afin d’éviter de contaminer sa tenue professionnelle et de disperser dans l’air les particules présentes à leur surface, retrait des gants sans toucher la peau afin de ne pas se recontaminer les mains avec les particules présentes à la surface des gants(4), retrait de la charlotte, des lunettes de protection et du masque par les élastiques sans toucher le visage, élimination enfin de tous ces équipements de protection dans les DASRI (déchets d’activités de soins à risques infectieux) en double ensachage. Un autre paramédical, équipé lui aussi de toutes les protections nécessaires et situé derrière le poste de commande, en charge notamment de la traçabilité du matériel, évitera tout contact direct avec le patient et restera à la disposition de ses collègues en cas de complications ou dégradation du patient. Après l’examen, ce sont toujours les mêmes personnels présents en salle de cathétérisme qui seront en charge de la désinstallation du patient sur son brancard. Il est essentiel de réduire au maximum le temps entre la fin de l’examen et le retour du patient dans sa chambre, en évitant tout croisement avec d’autres patients au sein de l’unité de cardiologie interventionnelle. Les équipements seront retirés et jetés comme décrit précédemment, le bionettoyage sera fait dans les règles de l’art, avec un temps minimum de 20 minutes de séchage complet avant l’installation du prochain patient. N’hésitez pas à aérer votre pièce si cela est possible. Figure 2. Recommandations du port de masque respiratoire FFP2. À noter que pour le port de ce masque « canard », il est conseillé de vérifier son bon positionnement sur le visage en pinçant la barrette sur le nez et en positionnant les élastiques de maintien sur la charlotte. Il est aussi recommandé de réaliser un test fit check qui consiste à vérifier le bon plaquage du masque sur le visage à l’inspiration. Le patient est considéré non Covid Pas de précaution particulière ni pour le patient ni pour le personnel (port de masque chirurgical ; figure 3), même si en période de pandémie, certains centres recommandent que le patient porte un masque chirurgical. La question se pose néanmoins pour la prise en charge de ces patients qui, malgré des tests négatifs (qui peuvent aller jusqu’à 30 % d’erreurs), peuvent être potentiellement porteurs du virus. Ne faut-il pas alors prendre les mêmes précautions pour ces patients que pour ceux porteurs du virus ? La question reste ouverte, à la discrétion des directions des établissements. Figure 3. Recommandations du port de masque chirurgical. • Conclusion Apparu au mois de décembre 2019 dans la province d’Hubei, en Chine, le Covid-19 est responsable d’une crise sanitaire mondiale sans précédent. Hautement contagieux et plus létal que la grippe saisonnière, le virus s’est très vite répandu sur notre territoire, modifiant les organisations hospitalières devant l’afflux des patients dès le début du mois de mars. Les plateaux techniques de cardiologie interventionnelle ont très vite déprogrammé la quasi-totalité de leurs examens pour laisser le champ libre aux patients atteints de ce virus. Les personnels médicaux et paramédicaux ont dû adapter de nouvelles méthodes de prise en charge des patients, en limitant au maximum le risque de contamination. Retenons de cette mauvaise période la qualité des soignants à faire bloc, à rester solidaires face à l’ennemi, aussi virulent puisse-t-il être.

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