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Congrès et symposiums

Publié le 01 mar 2020Lecture 7 min

Quelles indications pour le gilet défibrillateur portable ?

Michèle DEKER, Neuilly

La stratification du risque de mort rythmique est toujours d’actualité, pour deux raisons : on implante de nombreux défibrillateurs en prévention primaire, qui ne sont pas utilisés, d’où la nécessité d’améliorer la sélection des patients ; il existe des causes aiguës de haut risque de mort subite qui relèvent du gilet défibrillateur. La recherche d’outils permettant de qualifier le risque se poursuit mais aujourd’hui la définition du risque repose toujours sur les symptômes (dominés par la NYHA), la présentation initiale et la nature de la cardiopathie (ischémique venant en premier), la génétique (certaines laminopathies) et la fraction d’éjection (FE), auxquels se surajoutent les phénomènes aigus (IDM, décompensation cardiaque, etc.).

Comment stratifier le risque pour le patient ischémique ? La FE est plus performante que tous les autres marqueurs. Ainsi, dans l’étude MUST, la diminution de la FE est associée dès 35 % à une augmentation de la mortalité rythmique et à la mortalité toutes causes ; dès 20-25 % les courbes de mortalités rythmique et totale ont tendance à se séparer. Une erreur consisterait à ne considérer que le risque rythmique sans prendre en compte le risque de mortalité totale. Le meilleur exemple en est le post-infarctus où le risque de mort subite est 4- 6 fois supérieur dans le 1er mois. En fait, la mortalité rythmique masque la mortalité cardiovasculaire, ce qui explique la négativité des études. Ainsi, dans VALIANT, on dénombre 105 morts subites en post-IDM, dont la moitié sont non rythmiques, mais liées à des réinfarctus et à l’insuffisance cardiaque, l’autre moitié étant considérée d’origine rythmique mais pour bon nombre de cas due à une rupture cardiaque ; dans cette même étude seulement 20 % des morts sont de nature rythmique pendant le 1er mois, et un peu plus de la moitié entre le 1er et le 3emois. Une autre situation aiguë est la décompensation cardiaque, laquelle inclut des patients à risque rythmique, risque néanmoins plus faible que celui de mort par insuffisance cardiaque ; en raison du délai nécessaire à l’adaptation thérapeutique, l’indication du défibrillateur ne peut être prise qu’après un délai de 3 mois, pendant lesquels le risque rythmique existe, situation qui offre une bonne option pour le gilet défibrillateur. Dans le post-infarctus, une FE basse peut s’expliquer par la gravité de l’infarctus initial, par l’atteinte méconnue de plusieurs territoires coronaires. La revascularisation chez les patients SCA améliore, certes, la fonction cardiaque, mais il faut attendre que l’angioplastie ait produit son effet ; durant cette période transitoire, le risque rythmique existe. Apport des essais cliniques et des registres Sur le registre francilien qui compte plus de 31 000 arrêts cardiaques tout-venants, 26 000 sont des morts subites probables ou certaines ; 5 800 vont arriver vivants en réanimation et finalement 6 % sortiront vivants de l’hôpital. La maladie coronaire reste la cause principale des arrêts cardiaques (80 %), pour 2/3 de cause aiguë (stenting sans défibrillateur) et 1/3 de cause chronique (pas de stent mais défibrillateur). Dans l’étude MADIT II chez 1 200 patients avec un IDM ancien et une FE basse, le défibrillateur avait montré sa supériorité en termes de mortalité totale. Dans le groupe contrôle, le risque de décès est de 0,4 %/mois. Dans l’étude VALIANT, le risque varie de 1 à 2 %/mois pendant les premiers mois chez les patients avec FE basse. Le risque est donc environ 4 fois supérieur en présence d’un substrat aigu versus chronique, d’où l’intérêt du défibrillateur après un IDM chez les patients avec FE basse. Les études DINAMIT et IRIS ont donc bien montré une réduction de la mortalité subite, mais pas de différence sur la mortalité totale. L’implantation du défibrillateur ne permet pas de prévenir tous les décès en post-IDM, d’où la recommandation d’attendre 3 mois. C’est dans ce contexte qu’est arrivée la LifeVest qui associe des électrodes de détection et des électrodes de défibrillation qui vont pouvoir délivrer 5 chocs de 150 J ; le gilet est relié à un moniteur et le patient joue un rôle actif dans sa thérapie, en pouvant annuler un choc. En outre, un télésuivi est initialisé lors de remise du gilet au patient. Plusieurs registres colligent les observations des patients munis de la LifeVest. Les deux plus importants sont les registres nord-américain (2 000 patients) et allemand (6 000 patients), avec pour indications une ischémie myocardique dans un tiers des cas, une pathologie non ischémique dans la moitié. Dans ces deux registres, le port du gilet est considéré comme bon (22-23 h) ; l’adhérence au traitement augmente avec le suivi actif des patients ; l’incidence des thérapies inappropriées est très faible (<< 1 % car le patient reste acteur de son traitement). Durant les 2-3 premiers mois, 2 % de TV soutenues surviennent, dont la moitié s’interrompent spontanément ; il a environ 1-2 % de thérapies appropriées pour TV bien organisée ou FV provoquant le choc, le plus souvent efficace. Dans le registre français (de janvier 2017 à mars 2018), dans les indications post-explantation, attente de transplantation et maladie coronaire avec FE < 30 % (1 mois) ou après revascularisation et FE < 30 % (3 mois), au total 1 157 patients ont été inclus (61 ans, 17 % femmes, FE 25 %), avec un suivi médian de 2 mois. L’adhérence au traitement est de 23,4 h/j en moyenne de port du gilet. Le seul critère associé à une mauvaise adhérence au traitement est l’âge jeune. Le gilet est parfaitement bien vécu et ressenti comme sécurisant. Les résultats en termes de thérapies sont très similaires à ceux des autres registres : 3 % de TV/FV ; la moitié sont allés jusqu’au choc électrique (arrêt spontané dans la moitié des cas, sinon arrêt par le patient qui supportait bien l’arythmie) ; 50 % des événements sont survenus pendant les 30 premiers jours ; aucun patient choqué n’est mort ; < 1 % de chocs inappropriés. À la fin de la période de port du gilet défibrillateur, un patient sur deux a pu récupérer une FE suffisante pour ne pas être implanté. L’étude VEST a évalué l’effet du gilet défibrillateur en postinfarctus porté pendant 3 mois chez les patients avec FE < 35 % sur l’incidence de la mortalité subite et totale. Cette étude multicentrique randomisée a inclus 2 300 patients (75 % hommes, environ 60 ans, revascularisés et bien traités) dans les 7 jours post-IDM (1 500 dans le groupe d’intervention). La moitié des décès est de nature subite. Une réduction de 34 % de la mortalité subite (MS) a été observée dans le groupe gilet défibrillateur versus contrôle. Sur les 25 morts subites du groupe Life-Vest, 16 ne portaient pas le gilet défibrillateur ; en effet, dans cette étude, l’adhérence au port du gilet était mauvaise, de 14 h/j en moyenne ; 25 % des patients ne l’ont jamais porté dès le début, le reste des patients avaient un port de 22 h/j. La réduction de la mortalité totale est de 35 % (significative) ; la mortalité totale est deux fois supérieure à la mortalité subite (5 % et 3 % dans les groupes contrôle et LifeVest, respectivement). En comparant les patients adhérents du groupe d’intervention au groupe contrôle, la réduction de la mortalité totale et de la mortalité subite est significative. Cet essai manque néanmoins de puissance en raison du nombre insuffisant d’événements. Les investigateurs avaient, en effet, posé l’hypothèse que la mortalité subite représenterait 90 % de la mortalité post-infarctus, que 80 % des patients porteraient la LifeVest et qu’un choc délivré signifierait 1 mort évitée. En outre, les décès sont difficiles à adjudiquer car la mort subite n’est pas une cause mais un mode de décès, donc de nombreux événements ont été perdus, d’où un manque de puissance. À noter également que l’étude VEST n’a pas proposé la télésurveillance intégrée. On peut supposer que l’efficacité du gilet défibrillateur n’est pas entièrement due à la défibrillation mais qu’il augmente l’adhérence au traitement médical, d’où un impact sur la mortalité totale. Le parcours du patient Partant de l’expérience de l’USIC de la Pitié-Salpêtrière, Ies patients arrivent en service de soins intensifs de cardiologie via différents circuits (principalement les Samu, Smur, par les urgences ou par transfert intra- ou inter-hospitalier). Les Samu représentent une unité de soins intensifs mobile dotée de beaucoup de moyens diagnostiques et thérapeutiques, et permettent un parcours de soins privilégié, rapide et disponible 24/24 h. Les admissions en USIC sont pour 1/3 des SCA, 1/3 des insuffisances cardiaques, 40 % des pathologies rythmologiques. Ce sont des patients à haut risque de mortalité. L’indication du gilet défibrillateur peut être discutée chez un patient ayant une pathologie ischémique aiguë ou chronique aggravée, avec une espérance de vie de plus d’un an. C’est l’interne qui fait la première évaluation de la sévérité du malade et des besoins immédiats, instaure le traitement médical et réalise la première échographie. Une deuxième évaluation est réalisée au bout de quelques jours. L’échographie de sortie est déterminante pour la décision des traitements de suite. Parmi les patients ayant fait un IDM ST+, les trois quarts n’ont pas de séquelles, ont une FE > 40 % et peu de risque de mort subite. Quinze pour cent ont une FE < 35 % et sont à risque de mort subite. Ce sont ces derniers qui vont bénéficier d’une surveillance accrue et qui seront candidats au défibrillateur temporaire ou définitif. Ces patients sont adressés au bout de 7 jours en centre de réadaptation cardiaque qui mettra en place le traitement médical optimal. À la sortie du centre, le patient est réévalué et la décision d’implantation définitive est discutée à 3 mois. D’après un symposium Zoll avec la participation de D. Klug, E. Marijon, J. Silvain et R. Eschalier

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