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Insuffisance cardiaque

Publié le 27 nov 2007Lecture 7 min

HTAP fixée : quelles possibilités thérapeutiques ?

E. VERMÈS, hôpital Henri Mondor, Créteil


Les Journées de l'insuffisance cardiaque
L’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) se définit par une pression artérielle pulmonaire moyenne > à 25 mmHg au repos ou > 30 mmHg à l’exercice. À partir du moment où il existe une HTAP, il est essentiel de pouvoir évaluer la réversibilité de celle-ci avant l’inscription d’un patient sur liste de transplantation cardiaque. En effet, la non-réversibilité des résistances pulmonaires (RP) a une grande implication sur l’indication de greffe cardiaque puisqu’il est entendu que la persistance de RP > 5 UW ou d’un gradient transpulmonaire (GTP) > 15 mmHg après les épreuves de reversibilité est une contre-indication relative à la greffe cardiaque seule.

Définition et physiopathologie Dans l’insuffisance cardiaque, l’apparition d’une HTAP s’explique par la dysfonction du ventricule gauche. Celle-ci aboutit à une élévation des pressions télédiastoliques du ventricule gauche, à une augmentation des sécrétions de neuro-hormones et des cytokines, responsable d’une dysfonction de l’endothélium pulmonaire. Cette dysfonction va aboutir à une vasoconstruction pulmonaire ainsi qu’à un remodelage, qui vont expliquer l’hypertension artérielle pulmonaire, laquelle va être responsable d’une dysfonction systolique du ventricule droit(1). Il a été démontré que l’HTAP est un facteur pronostique dans l’insuffisance cardiaque(2). De plus, l’HTAP couplée à l’évaluation de la performance du ventricule droit a un apport pronostique additionnel. Dans l’étude de Ghio(3) portant sur 379 patients en insuffisance cardiaque, il a été bien démontré que le pronostic est d’autant plus sévère qu’il y a association HTAP et dysfonction droite. La fonction droite peut être préservée en dépit d’une HTAP car le développement d’une dysfonction droite en réponse à une élévation de la postcharge est dépendante du temps. Chez les patients en insuffisance cardiaque sans HTAP, l’évaluation de la fonction droite n’améliore pas la stratégie diagnostique. En revanche, en cas d’HTAP, le pronostic des patients est fortement lié à la performance ventriculaire droite. Il est essentiel d’évaluer l’HTAP chez les patients insuffisants cardiaques, particulièrement ceux avant la greffe cardiaque. En effet, l’HTAP participe encore aux échecs de la transplantation cardiaque. Dans le registre de l’ISHLT, 40 % des décès dans les premiers jours de la greffe sont liés à une défaillance du greffon qui inclut des défaillances ventriculaires droites et la survie après transplantation cardiaque est moins bonne lorsque les receveurs ont des résistances pulmonaires élevées(4). La défaillance ventriculaire droite apparaît lorsque la circulation se heurte à des résistances pulmonaires élevées. Le ventricule droit du donneur habitué à un gradient transpulmonaire normal et des résistances pulmonaires normales défaille quand soudainement il est confronté à une circulation pulmonaire à haute résistance du receveur. Il est donc essentiel d’évaluer correctement les pressions pulmonaires chez les candidats à la greffe.   Évaluation de l’HTAP chez les candidats à la greffe cardiaque C’est le cathétérisme cardiaque droit qui affirme le diagnostic d’HTAP en mesurant un en-semble de paramètres, dont deux permettent de définir précisément l’HTAP : - les résistances pulmonaires (RP) mesurées en unités Wood (UW) = - le gradient transpulmonaire : GTP = PAPm - Pcap. Le gradient transpulmonaire reflète la résistance de la circulation pulmonaire. Cette évaluation se fait en salle de cathétérisme avec des substances soit inotropes positives : dobutamine, enoximone (milrinone), soit vasodilatatrices : NO, nitroprusside de sodium, prostacycline, sildénafil. Il a été bien démontré dans l’étude de Murali(5) que les ino-tropes positifs et les vasodilatateurs augmentent tous le débit cardiaque et diminuent les résistances pulmonaires. Toutes ces drogues, à l’exception de la dobutamine, diminuent les pressions artérielles pulmonaires, les pressions systémiques ainsi que la pression capillaire. Sous dobutamine et enoximone, ce gradient est même augmenté, probablement en raison d’une augmentation du débit via la circulation pulmonaire, sans modification géométrique des vaisseaux. En revanche, seule la prostacycline diminue le gradient transpulmonaire par un effet direct sur le tonus vasculaire pulmonaire. Le problème est que les prostacyclines sont mal tolérées et chères, et l’administration au long cours des protacyclines a été associée à une mortalité accrue chez les patients insuffisants cardiaques sévères. La dobutamine et la milrinone sont les plus utilisés parmi les inotropes positifs. La milrinone a l’avantage d’être administrée en bolus avec un effet rapide dès la 5e minute. Dans l’étude de Panboukian(6), l’administration de milrinone à la dose de 50 µg/kg en bolus chez 19 patients avec RP ≥ 3 UW et GTP ≥ 12 mmHg a permis de diminuer les résistances pulmonaires de 32 %, la pression artérielle pulmonaire moyenne de 20 % et la pression capillaire de 26 % dès la 5e minute. En revanche, le gradient transpulmonaire diminue de 30 % dans le sous-groupe de patients ayant des RP ≥ 4 avec un GTP ≥ 15. La milrinone a dont un effet positif et vasodilatateur, surtout dans l’HTAP sévère. Sur ces 19 patients, 6 ont été transplantés, dont 3 avec une insuffisance cardiaque droite transitoire n’ayant nécessité aucune assistance droite. L’oxyde nitrique (NO) s’instaure par inhalation. C’est un puissant vasodilatateur du lit vasculaire pulmonaire ayant des effets mineurs sur la circulation systémique. Il peut être utile pour discriminer les patients nécessitant une double greffe cœur-poumon de ceux nécessitant une greffe cardiaque isolée. Dans l’étude d’Adatia(7), 6 patients ont été testées avec 80 ppm de NO en salle de cathétérisme. Le NO diminue les pressions artérielles pulmonaires moyenne de 71 à 59 mmHg, les RP de 14,9 à 7,6 UW et le GTP de 45 à 27 mmHg ; 4 patients ont été considérés comme ayant une HTAP réversible (GTP < 15 mmHg) et 2 ont été transplantés cardiaque seuls. Le sildénafil est un inhibiteur des phosphodiestérases 5. Il potentialise la vasodilatation, l’effet antiprolifératif et antiplaquettaire du NO en inhibant la dégradation du GMP cyclique. Il a pour l’instant encore été peu évalué dans la réversibilité des résistances pulmonaires. Dans l’étude de Gomez Sanchez(8) sur 7 patients ayant RP ≥ 2,5 et GTP ≥ 12, le sildénafil administré à 100 mg en sublingual, diminue rapidement le gradient transpulmonaire de 19 à 12 mmHg, la pression pulmonaire moyenne de 37 à 28 mmHg et les RP de 5,2 à 2,5 UW sans modifier les pressions capillaires sur le débit cardiaque. Définition et conséquences de l’HTAP fixée À l’issue de l’ensemble de ces tests (inotropes positifs et/ou vasodilatateurs), il est possible de définir la non-réversibilité de l’HTAP par : RP ≥ 4 UW, PAPs ≥ 60 mmHg et/ou GTP > 15 mmHg. Il est bien entendu qu’on ne peut parler de non-réversibilité des résistances pulmonaires que lorsque les inotropes positifs ou les vasodilatateurs ont été administrés 24 ou 48 h en soins intensifs. Cependant, avant de recourir à la double greffe cœur-poumon, il peut être intéressant d’utiliser certaines subtances ou certains systèmes d’assistance monoventriculaire gauche. Il existe maintenant dans la littérature quelques études qui font état de l’intérêt du sildénafil chez les patients ayant une HTAP fixée. Très récemment, Jabbourg(9) a évalué 6 patients avec des GTP ≥ 15mmHg après vasodilatateur. Le sildénafil a été administré à la dose de 25 à 50 mg x 3 par jour, avec un suivi de 68 ± 58 jours. Sur 6 patients, 4 ont pu diminuer le GTP (diminution moyenne de 4,5 ± 4,3 mmHg) et les RP ont diminué chez tous les patients en moyenne de 2 UW. Le débit cardiaque a très légèrement augmenté de 0,58 l/min. Sur 6 patients, 4 ont eu des GTP < 15 mmHg et 3 ont été transplantés cardiaques seuls avec succès. Il faut noter que cette étude est préliminaire et qu’elle porte sur un nombre faible de patients. Il y a également actuellement la possibilité de préparer le patient ayant une HTAP fixée à la greffe cardiaque seule en posant l’indication d’une assistance ventriculaire gauche. Dans l’étude de Zimpfer(10), sur 247 patients candidats à la greffe, 35 étaient considérés comme ayant une HTAP fixée, malgré les tests de réversibilité. Ils ont reçu une assistance monoventriculaire gauche de deux sortes : soit à débit pulsé (Novacor), soit à débit continu (Heartmate). Le cathétérisme droit a été réalisé 3 jours après la mise en place de l’assistance et à 6 semaines. Pour tous les patients, quel que soit le type d’assistance, il y a une modification de tous les paramètres dès le 3e jour avec une diminution significative des résistances pulmonaires (5,1 à 2,0 UW), de la pression artérielle pulmonaire systolique (63,2 à 26,7 mmHg), de la pression artérielle pulmonaire moyenne (440 à 18,4 mmHg) et de la pression capillaire (26,1 à 10,0 mmHg). Vingt-six patients (74 %) ont pu être transplantés, 4 % seulement ont nécessité un système d’assistance en post-greffe lié à une défaillance cardiaque droite, 9 patients (26 %) sont décédés sous assistance. Dans cette étude, il n’y a pas d’impact de l’assistance gauche sur la survie après la greffe avec des résultats identiques à 48 mois en termes de survie dans le groupe assistance gauche avant la greffe et dans le groupe sans assistance.   En pratique L’évaluation des pressions pulmonaires est essentielle chez les patients insuffisants cardiaques sévères. En cas de découverte d’une HTAP, il est essentiel de pouvoir tester la réversibilité des résistances pulmonaires sur 24 ou 48 h. Le sildénafil représente un espoir dans la préparation des patients à la greffe cardiaque seule chez ceux ayant une HTAP fixée. Il faut dans tous les cas essayer de discuter l’assistance mono gauche qui, dans des études récentes, montre une réversibilité des résistances pulmonaires. Bien évidemment, en cas de non-réversibilité, il y a une indication à une transplantation cœur-poumon. Il est de toute façon essentiel de pouvoir prendre en charge de façon maximale la défaillance cardiaque droite du greffon en cas d’HTAP du receveur.

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