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Cardiologie générale

Publié le 15 déc 2016Lecture 3 min

Les études de vraie vie : une approche nécessaire et complémentaire aux études cliniques

L. FAUCHIER, CHU Trousseau, Tours

CNCF

Bien que les essais cliniques randomisés apportent des réponses majeures pour évaluer le bénéfice clinique de chaque thérapeutique, il existe des différences cliniques significatives entre les patients avec FA inclus dans les essais cliniques et les patients dits de « vraie vie », c’est-à-dire l’ensemble des patients vus en pratique clinique quotidienne avec une FA. Les résultats des essais randomisés pourraient ne pas être directement applicables à la pratique pour certains patients ou dans le contexte d’une organisation de soins différente de celle d’un essai clinique. Il est donc licite et nécessaire d’effectuer des analyses avec des registres de « la vie réelle » ou des bases de données à grande échelle. Ces données en conditions réelles de prescription sont devenues disponibles pour les AOD ces derniers mois avec leur utilisation croissante en routine.

Pour le dabigatran, une métaanalyse a étudié 348 750 patients (57 % sous warfarine, 40 % sous dabigatran 150 mg et 3 % sous dabigatran 110 mg) en soins courants, soit 20 fois la taille de la population de RE-LY(2). Les patients sous dabigatran-110 mg « en conditions réelles de prescription » ont tendance à être plus vieux que les patients de l’essai RE-LY. Comparé aux AVK, le dabigatran 150 mg était associé à un risque similaire d’AVC (hazard ratio [HR] = 0,92, p = 0,07) et un risque significativement plus faible de saignement intracrânien (HR = 0,44, p < 0,001). Cependant, les risques de saignements gastro-intestinaux étaient significativement plus élevés que ceux sous warfarine (HR = 1,23 ; p = 0,04), en particulier pour les patients plus âgés. Ces résultats sont donc cohérents avec ceux de l’essai RE-LY. D’autres analyses « du monde réel » indiquent que les patients avec initiation de warfarine ont un risque de saignement plus élevé comparativement à ceux initiant un traitement par dabigatran, et que les taux de saignement sont plus élevés dans les 90 premiers jours de traitement chez les personnes âgées ou avec insuffisance rénale, quel que soit l’anticoagulant oral. Dans le registre prospectif XANTUS chez 6 784 patients avec FA, le rivaroxaban était efficace et même plus sûr dans la vie réelle que pour les patients de l’étude ROCKET-AF(3). Alors que l’essai ROCKET-AF n’avait pas inclus de patients avec score CHADS à 0-1, XANTUS comprenait 13 % des patients avec un score CHA2DS2-VASc de 0 ou 1. L’incidence globale de saignement de 2,1 % par an dans XANTUS était notablement inférieure aux 3,6 % par an rapportés dans ROCKET-AF. Les complications hémorragiques associées au rivaroxaban ont été rapportées dans une métaanalyse de 9 études « de vraie vie » impliquant 51 533 patients(4). Les taux de saignement avec le rivaroxaban étaient comparables à ceux rapportés dans l’étude ROCKET-AF. Cependant, il existait une hétérogénéité des taux de saignements majeurs dans ces études, les définitions des saignements étant variables. Cela souligne aussi les faiblesses inhérentes aux études observationnelles ou rétrospectives, et l’ajustement toujours imparfait concernant les comorbidités sous-jacentes et les traitements associés. Des informations sur l’efficacité globale et la sécurité comparées des 3 anticoagulants oraux actuellement utilisables sont aussi disponibles. Dans l’étude nationale au Danemark impliquant 61 678 patients avec FA non valvulaire, il y avait 57 % de patients traités par warfarine, 21 % par dabigatran 150 mg, 20 % par rivaroxaban 20 mg et 10 % par apixaban 5 mg(5). Les caractéristiques initiales des patients étaient notablement différentes pour chacun des anticoagulants. Avec un an de suivi, par rapport à la warfarine, les taux d’AVC ischémiques étaient significativement plus faibles avec le rivaroxaban (HR = 0,83), alors qu’ils n’étaient pas significativement différents pour le dabigatran et l’apixaban. En contrepartie, les taux de saignement avec le rivaroxaban (5,3 %) étaient comparables à ceux sous warfarine (5 %), alors qu’ils étaient plus bas avec l’apixaban (2,3 %) et le dabigatran (2,4 %). Les auteurs concluent avec impartialité que les 3 AOD semblent être des alternatives sûres et efficaces à la warfarine en conditions réelles d’utilisation en cas de FA. Au cours des dernières années, différents grands registres et analyses ont donc confirmé le profil favorable des AOD comparés aux AVK pour les patients avec FA. Les bénéfices obtenus dans les études « de vraie vie » avec les AOD en termes de commodité, d'efficacité et de sécurité par rapport aux AVK paraissent au moins aussi importants que ceux observés dans les essais cliniques. Ceci confirme le bien-fondé des recommandations 2016 qui, en l’absence de contre-indication, mettent en avant les AOD pour la prévention de l’AVC en cas de FA. Malgré cela, les AOD ne sont pas utilisables chez tous les patients. Dans une étude belge à plus petite échelle, moins de la moitié des patients avec FA de la pratique quotidienne étaient éligibles à l’utilisation d'un des AOD(6). C'est donc la bonne sélection des patients pour chaque traitement, leur suivi approprié et la capacité à prévenir et à gérer les complications hémorragiques qui permettront d'optimiser l'utilisation des anticoagulants dans la FA.

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