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Coronaires

Publié le 14 avr 2016Lecture 6 min

La FFR en pratique : ce que le clinicien doit comprendre

V. ROULE, R. SABATIER, F. BEYGUI, Service de cardiologie, CHU de Caen

Dans le cadre de lésions coronaires stables, de nombreuses études ont souligné l’importance de l’ischémie coronaire pour juger de l’intérêt d’un geste de revascularisation percutané ou par pontage. C’est dans ce cadre que la FFR (Fractional Flow Reserve) a connu un essor grandissant ces dernières années, en permettant d’évaluer le retentissement fonctionnel d’une lésion coronaire directement en salle de coronarographie.

En pratique courante, plus de 50 % des patients référés pour une angioplastie coronaire percutanée n’ont pas de test d’ischémie préalable. Ce chiffre qui peut sembler important est à tempérer par les recommandations dans l’angor stable qui stipulent qu’en cas de probabilité clinique > 85 % chez un patient symptomatique sous traitement médical, il n’y a pas lieu de faire un test d’ischémie avant d’adresser le patient en coronarographie. On comprend donc bien l’intérêt quotidien de la FFR en salle de cathétérisme.   Réalisation pratique de la FFR   La mesure de la FFR correspond à une mesure de gradient de pressions : FFR = Pd/Pa (avec Pd = pression distale en aval de la sténose et Pa = pression dans l’aorte ascendante) Ce rapport de pression correspond en hyperhémie maximale (et seulement à cette condition) au rapport de flux sanguin myocardique arrivant en aval de la sténose. Ainsi une FFR à 0,70 signifie que 70 % du flux sanguin myocardique théorique (en l’absence de sténose) arrive en aval de la sténose en hyperhémie maximale (figure 1). Il existe donc une norme de FFR à 1 pour tous les patients et toutes les artères coronaires. La pression est mesurée à l’aide d’un guide de FFR dédié avec un capteur de pression à son extrémité (figure 2). L’hyperhémie maximale est obtenue par injection intracoronaire de dérivés nitrés type dinitrate d’isosorbide (pour lever l’éventuelle part spastique coronaire) et d’adénosine (qui lève l’autorégulation de la microcirculation). Figure 1. Concept de la FFR. D’après Pijls. Pa = Pression aortique ; Pd = Pression distale ; Pv = Pression veineuse (considérée nulle en situation hémodynamique classique). Figure 2. Coronarographie montrant une atteinte monotronculaire avec sténose intermédiaire de la coronaire droite moyenne (estimée à 58 % en QCA) chez un patient asymptomatique en préopératoire de chirurgie d’AOMI à haut risque cardiovasculaire (A). Réalisation d’une FFR avec égalisation des pressions dans l’aorte, près de l’ostium de la CD (capteur de pression entouré en blanc) (B). Passage du guide FFR en aval de la sténose (C) et mesure de la FFR (D) avec courbe de pression aortique en rouge, courbe de pression distale en vert et rapport de pression à 0,87 donc FFR négative, la lésion relève du traitement médical.   Avec l’injection d’adénosine, il existe un risque de troubles conductifs type BAV complet, toujours transitoire du fait de la courte demi-vie de l’adénosine. Ces troubles sont habituellement stoppés en demandant au patient de tousser. En cas de mauvaise tolérance sur le plan rythmique, l’adénosine doit alors être administrée en IVSE. Cette technique est contre-indiquée en cas d’asthme (risque d’asthme aigu grave provoqué par l’adénosine). Elle est également à éviter en cas de lésion coronaire jugée difficilement franchissable par le guide de FFR (lésions anfractueuses calcifiées). Il s’agit d’une technique invasive. Le risque de complications dans les centres entraînés est estimé < 1 %. Les avantages de la FFR sont nombreux : accessible directement en salle de cathétérisme cardiaque, reproductible, rapide (< 10 minutes en moyenne pour une lésion testée), peu irradiante, surtout indépendante des changements de pression artérielle/fréquence cardiaque/FEVG ainsi que du patient (échogénicité) et de l’ECG (BBG, pacemaker). Cette technique est validée quelle que soit la formule coronaire (mono, bi- ou tritronculaire). Surtout, la FFR permet une analyse par segment, voire par centimètre de l’ischémie coronaire tandis que le test d’effort fait une analyse par patient et l’échographie dobutamine ou la scintigraphie par territoire. Les valeurs « normales » de la FFR ont été validées en regard des tests d’ischémie coronaire validés (comparaison au test d’effort couplé à l’échographie dobutamine et la scintigraphie myocardique). Ainsi une FFR < 0,75 objective une ischémie avec une sensibilité de 88 % et une spécificité de 100 %(1). Une FFR > 0,8 exclut une ischémie avec une valeur prédictive > 95 %. Les recommandations de l’ESC sur la revascularisation myocardique de 2014 ont accordé un grade IA pour l’angioplastie guidée par FFR en l’absence d’ischémie objectivée préalablement (avec une positivité retenue en cas de FFR ≤ 0,8). Non remboursée jusqu’alors, la mesure de la FFR vient d’obtenir un code CCAM et est maintenant remboursée.   L’importance de l’ischémie coronaire   L’étude COURAGE(2), publiée en 2007, a clairement marqué les esprits. Dans cette étude, des patients coronariens stables avec angor et au moins une sténose coronaire ≥ 70 % angiographiquement ont été randomisés entre traitement médical optimal seul versus traitement médical et angioplastie coronaire percutanée. Les résultats obtenus sur une médiane de 4,6 ans ne montrent pas de différence significative sur le risque de décès et infarctus du myocarde (IDM). Toutefois, une sous-étude scintigraphique a démontré que le pronostic des patients était lié à l’importance de l’ischémie coronaire et que l’angioplastie percutanée permettait de réduire davantage cette ischémie coronaire. Dans le même temps, l’étude DEFER(3) a montré que dans le cadre de lésions coronaires intermédiaires, une angioplastie n’apportait pas de bénéfices en termes de décès d’origine cardiaque et d’IDM si la FFR était ≥ 0,75. Dans ce cas précis, le risque de décès d’origine cardiaque ou d’IDM relatif à la lésion était < 1 %/an (et donc non diminué par le stenting de la lésion). Par la suite, l’étude FAME(4) a randomisé des patients bi- ou tritronculaires stables entre angioplastie guidée par l’angiographie versus guidée par la FFR (stent si FFR ≤ 0,8). Les lésions testées avaient une FFR ≤ 0,8 dans 2/3 des cas. Là encore, le critère combiné décès ou IDM était nettement en faveur du groupe FFR (réduction du risque relatif de 34 %). Plus récemment, l’étude FAME 2(5) a montré que les revascularisations urgentes étaient significativement diminuées dans le groupe guidé par FFR. L’ischémie coronaire objectivée en FFR a donc prouvé son importance en termes de morbi-mortalité dans la coronaropathie stable.   Applications pratiques   Les applications pratiques de la FFR sont donc, en l’absence d’ischémie documentée ou plus rarement en cas de discordance entre le test d’ischémie réalisé et l’angiographie coronaire, les lésions coronaires jugées intermédiaires ou équivoques angiographiquement. La FFR a été validée chez les patients tritronculaires et aussi sur les sténoses du tronc commun. Dans ce dernier cas, les discordances entre FFR et angiographie ne sont pas rares. Les lésions diffuses ou en tandem s’apprécient à l’aide d’un pull-back progressif (idéalement sous adénosine IVSE) pour juger au mieux des segments coupables. Dans les sténoses du TC, les discordances entre FFR et angioplastie ne sont pas rares. Il faut rappeler que la FFR n’est pas une technique valide pour les lésions instables, dans le cadre des syndromes coronariens aigus en particulier. Toutefois, elle peut aider à décider ou non d’une revascularisation des lésions associées à la lésion coupable. Certains recommandent alors de différer les mesures FFR de quelques jours afin qu’elle ne soit pas modifiée par l’éventuelle dysfonction endothéliale générée en phase aiguë. Dans le cadre préopératoire chez les patients tritronculaires, le fait de guider le type de revascularisation par la FFR est en cours d’évaluation avec en particulier l’étude FUTURE.     En pratique   La FFR est le rapport entre la pression distale en aval d’une sténose et la pression aortique en hyperhémie maximale (ce qui correspond par analogie au rapport de flux entre une artère sténosée et la même artère en l’absence de sténose au cours d’une vasodilatation maximale). Une FFR ≤ 0,80 traduit une lésion fonctionnellement significative. Cette technique est relativement rapide, simple et directement accessible en salle de cathétérisme. L’angioplastie percutanée de lésions stables guidée par la mesure de l’ischémie en FFR a montré son intérêt en termes de morbi-mortalité. La FFR permet une évaluation fonctionnelle des lésions intermédiaires, équivoques (tronc commun, bifurcation) et de guider la stratégie de revascularisation en particulier chez les malades tritronculaires. 

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