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Congrès et symposiums

Publié le 14 déc 2015Lecture 6 min

La revascularisation du patient tritronculaire - Quand confier le patient au chirurgien ?

L. BONELLO, M. LAINE, F. PAGANELLI, F. THUNY, Service de cardiologie, CHU de Marseille ; Aix-Marseille université


CNCF
La revascularisation percutanée a fait des progrès considérables au cours des 20 dernières années. Elle est aujourd’hui la première forme de revascularisation chez les patients présentant une coronaropathie stable ou instable. Les améliorations de la technique, du matériel et de l’environnement pharmacologique ont permis de réduire les thromboses de stent et les resténoses intrastent ce qui explique cet essor. Pour autant, la revascularisation du patient tritronculaire semble être sa dernière limite et la chirurgie de pontage y garde une place importante.

Faut-il revasculariser ?   Face à un patient coronarien présentant des lésions tritronculaires, la première question est de rechercher l’indication clinique de revascularisation(1). En effet, en dehors des patients instables l’ischémie détermine le bénéfice potentiel lié à la revascularisation. Un patient coronarien stable avec une ischémie < 10 % semble, sur la base des études COURAGE et BARI 2D, pouvoir être traité de façon médicale sans sur-risque d’infarctus ou de décès(2,3).   Le patient tritronculaire   Le patient tritronculaire représente la forme la plus sévère de la maladie coronaire et est associé au risque d’événements cardiovasculaires le plus élevé au cours du suivi. Il s’agit de patients chez lesquels les 3 lits épicardiques présentent au moins une lésion > 50 %(1). Pour autant, il existe au sein même de ce groupe de patients une grande hétérogénéité puisque les caractéristiques angiographiques varient, certains présentant des lésions courtes et simples quand d’autres présentent des lésions complexes qui peuvent aller jusqu’à une occlusion. Un score a été développé pour prendre en compte et évaluer la complexité de ces lésions : le score SYNTAX(1).   Modalités de revascularisation : comment choisir ?   Les dernières recommandations de l’ESC ont associé des cardiologues interventionnels, des cardiologues non interventionnels et des chirurgiens cardiaques. Elles proposent un algorithme simple permettant à la fois d’évaluer le risque d’événements mais aussi la technique la plus efficace dans la majorité des situations cliniques (tableau)(1). Malgré les progrès de l’angioplastie au cours des dernières décennies, la chirurgie de pontage reste le gold standard avec un niveau de recommandation I A chez les patients tritronculaires. Seuls les patients présentant un score SYNTAX le plus faible ≤ 22 peuvent bénéficier avec le même niveau de recommandation d’une angioplastie coronaire. Pour les patients avec un SYNTAX score > 22, l’angioplastie est déconseillée avec une recommandation de classe 3. Bases scientifiques   Ces recommandations démontrent que le patient tritronculaire représente une des limites actuelles de l’angioplastie coronaire malgré l’utilisation des stents actifs. Quelles sont les bases scientifiques de ces recommandations et sontelles solides ? Ces recommandations ont été émises suites au résultat de l’étude SYNTAX(4). Cette étude multicentrique prospective randomisée internationale est l’étude contemporaine portant sur la revascularisation du multitronculaire ayant inclus le plus de patients. Les patients étaient inclus après une réunion de concertation médico-chirurgicale (Heart team) confirmant l’indication de revascularisation et la possibilité de réaliser angioplastie ou chirurgie. Ils étaient alors randomisés pour une des deux techniques de revascularisation. Tout d’abord près d’un tiers des patients ont été inclus dans un registre car ils ne pouvaient être traités que par chirurgie d’après la réunion médico-chirugicale. Seuls les deux tiers des patients screenés ont donc pu voir l’angioplastie randomisée comparativement à la chirurgie. Au total, 1 800 patients ont été randomisés. Le suivi à 5 ans a été publié récemment(5). Les patients ayant bénéficié d’une chirurgie de pontage ont eu un meilleur pronostic avec un taux d’événements cardiovasculaires majeurs (ECVM) plus faible que le groupe angioplastie(5). Cette différence est particulièrement marquée chez les patients tritronculaires. En effet, si les ECVM y sont moins fréquents (24,2 vs 37,5 % ; p = 0,001), on note en particulier un risque de décès plus faible (9 2 vs 14,6 % ; p = 0,006). Seule une étude en sous-groupe en fonction du SYNTAX score permet d’isoler le sous-groupe de patients avec un score ≤ 22 comme équivalent aux pontages à 5 ans (p = 0,2)(5). Cette différence de survie sans événement est encore plus marquée chez les patients tritronculaires diabétiques (29 vs 46,5 % ; p = 0,001). Des résultats similaires sont fournis par les registres nordaméricains portant sur plusieurs dizaines de milliers de patients avec un bénéfice en termes de mortalité au pontage coronaire par rapport à l’angioplastie(6).   Pourquoi ce bénéfice au pontage ?   Les deux principales raisons à ce bénéfice sont : - le fait que l’on ne traite pas la lésion d’athérome évitant les récidives de complications sur cette zone qui représente le plus gros contingent d’événements au cours des 2 années qui suivent ; - et que l’on court-circuite une longue partie des coronaires limitant la surface vasculaire ou un événement athéro-thrombotique pourrait intervenir(7).   Prérequis chirurgicaux Cependant, pour obtenir un tel bénéfice, il existe un certain nombre de conditions. Tout d’abord, un centre est considéré comme expert en chirurgie cardiaque s’il réalise plus de 200 pontages par an. L’utilisation d’une revascularisation complète est indispensable et celle-ci doit être réalisée au maximum par des ponts artériels en particulier l’utilisation des deux artères mammaires internes, dont l’un d’entre eux branché sur l’interventriculaire antérieure(1).   Qui revasculariser par angioplastie ?   Comme nous l’avons vu plus haut, les patients ayant un score SYNTAX faible (≤ 22) peuvent bénéficier d’une revascularisation par angioplastie. En dehors de ces patients, un certain nombre présentent du fait de leur anatomie coronaire ou de comorbidités une contre-indication opératoire. Le nombre de patients non revascularisables par voie chirurgicale parmi les patients screenés dans SYNTAX était d’environ 10 %. Parmi les contre-indications opératoires potentielles on inclut notamment un antécédent de pontage, un âge physiologique élevé, une insuffisance respiratoire sévère, une aorte porcelaine, une espérance de vie limitée, un Euroscore prohibitif. L’urgence est aussi une situation où l’angioplastie va être préférée au pontage en particulier en cas de syndrome coronarien aigu avec sus-décalage persistant du segment ST ou sans susdécalage du segment ST considéré comme à très haut risque.   Perspectives   L’amélioration de la sélection des patients Rôle de La FFR Comme nous l’avons vu en introduction, l’existence d’une ischémie est un élément clé pour déterminer l’intérêt de la revascularisation. Ainsi l’utilisation de la FFR chez le patient considéré comme tritronculaire en se basant sur l’aspect angiographique permet de les reclasser et d’obtenir un score SYNTAX fonctionnel qui réduit d’environ 50 % les indications opératoires(8). Par ailleurs, cette technique permet aussi d’améliorer considérablement les résultats de l’angioplastie du patient multitronculaire(9).   Nouveau score Le développement du score SYNTAX 2 est en cours. Ce score inclut les paramètres principaux permettant d’évaluer le pronostic du multitronculaire revascularisé par pontage et par angioplastie. Il pourrait jouer un rôle clé à l’avenir lors de la discussion en Heart team en permettant de déterminer à titre individuel la meilleure stratégie pour un patient donné(10).   Amélioration de l’angioplastie Depuis SYNTAX, des progrès importants ont été réalisés dans l’angioplastie coronaire. Les stents actifs de deuxième génération ont permis de réduire encore le taux de réintervention et le risque de thrombose de stent(11). L’environnement pharmacologique avec les nouveaux antiagrégants plaquettaires et les données récentes sur la durée optimale de la bithérapie pourrait permettre de réduire encore significativement le taux d’événements cardiovasculaires(12).    En pratique   La chirurgie de pontage reste le gold standard de la revascularisation chez le patient tritronculaire avec un SYNTAX score > 22. Pour autant, l’utilisation du SYNTAX score II et de la FFR permet d’identifier au sein des patients, lesquels pourraient bénéficier de cette alternative efficace qu’est l’angioplastie avec les stents de dernière génération. 

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