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Coronaires

Publié le 31 déc 2014Lecture 4 min

Précocité masculine de la maladie coronarienne : la faute au chromosome Y !

J.-P. USDIN, Hôpital américain de Paris, Neuilly-sur-Seine

Une variante particulière du chromosome Y, l’haplotype I, fréquemment retrouvée dans la population de l’Europe du Nord serait responsable d’un risque accru de maladie coronarienne.
Du fait de sa singularité, le chromosome Y a peu varié depuis sa forme ancestrale. On répertorie chez l’homme 20 haplotypes désignés par une lettre de A (Adam/Ancestral) à T (le plus récent dans l’arbre phylogénétique). Suivant les régions du globe, tel ou tel haplogroupe est plus fréquemment recensé.

Une grande première   Une équipe australienne(1) s’est intéressée à l’association chromosome Y et maladie coronarienne, et plus particulièrement l’haplotype* « I » de l’ADN Y, fréquemment retrouvé dans la population britannique. « Why » DNA Y ? Les auteurs avancent les raisons principales suivantes : - le faible enjambement* avec son homologue X et par conséquent les faibles variations évolutives ; - le peu ou l’absence d’études concernant son rôle éventuel dans la maladie vasculaire. Or les hommes souffrent plus précocement que les femmes de la maladie coronaire ; - le chromosome Y est le véhicule, certes, de la différenciation sexuelle, mais il est aussi le porteur de gènes impliqués dans les réponses immunitaires et inflammatoires ; - il existe deux grandes familles d’haplotypes ADN-Y chez les sujets britanniques : l’haplotype « I » (16 %) et l’haplotype R1b2b2 (72 %).   F.J. Charchar et son équipe ont individualisé les porteurs « I » de l’ADN-Y parmi les sujets (n = 3 000) issus d’un répertoire et d’une étude britanniques : - le répertoire British Heart Fundation- Family Heart Study (BHFFHS) afin de comparer 810 hommes atteints d’une affection coronarienne certaine à 630 indemnes de la maladie ; - l’essai WOSCOPS(2) (prévention primaire de la maladie coronaire par une statine chez des patients souffrant d’une hypercholestérolémie) afin de confronter les sujets (masculins) qui ont souffert au cours de cette étude d’un accident coronaire, à ceux qui n’en ont pas développé au cours des 2 ans de l’essai.   Sur-risque coronarien de 50 % chez les sujets haplogroupe « I »   Les auteurs ont constaté que les sujets britanniques de l’haplogroupe « I » ont un risque coronarien plus important que ceux qui ne sont pas porteurs de marqueur génétique. C’est le cas pour les patients souffrant d’une affection cardiovasculaire, comparés à ceux ne souffrant pas d’affection cardiovasculaire dans le répertoire BHFFHS (Odds Ratio [OR] = 1,45). Il en est de même pour les patients coronariens à très haut risque vasculaire, comparés à ceux ayant le même très haut risque mais n’ayant pas souffert d’accident coronaire (OR = 1,56). Réunissant les résultats de ces deux études, les porteurs de l’haplotype « I » ont un risque supplémentaire de 50 % de développer la maladie coronaire.   Réponse exagérée à un stimulus inflammatoire pour l’haplotype « I »   La collaboration européenne Cardiogenics Study regroupe des patients ayant souffert d’un infarctus du myocarde et des sujets indemnes de cette affection. Les auteurs y ont sélectionné 255 sujets britanniques et se sont intéressés à la transcription de l’ARN messager au sein des macrophages sous l’effet d’un stimulus. Par rapport aux autres haplogroupes, les macrophages des sujets « I » ont transcrit une production d’ARN messagers exagérée vers la réponse inflammatoire et minorée vers la réponse immunitaire. Pour le second auteur de l’article(3), Lisa Bloomer, interviewée, l’haplotype « I » n’explique sûrement pas tout. En effet, la maladie coronarienne sévit bien évidemment chez des sujets n’ayant pas cette mutation. Notamment, 34 single-nucleotide polymorphisms* individualisés sur les autosomes sont aussi des candidats… et dans d’autres parties du monde… mais le chromosome Y semble déterminer une susceptibilité plus importante pour la maladie coronaire chez les Britanniques. Elle insiste aussi sur le caractère original de cette étude et les directions futures : - intérêt que l’on doit dorénavant porter à l’ADN-Y ; - piste éventuelle pour expliquer le déclenchement plus précoce de la maladie coronaire chez les hommes ; - relation possible entre le profil inflammatoire particulier des sujets de l’haplogroupe « I » et l’association avec l’athérome coronarien ; - un profil génétique programmé relatif à l’inflammation et la réponse immunitaire et les liens avec les affections du système immunitaire.   V. Miller, dans son éditorial(4), souligne l’importance de l’historique familial. Pour estimer le risque cardiovasculaire chez l’homme, peut-être est-il plus judicieux, dit-elle, de poser la question : « Est-ce que votre père a souffert d’une maladie cardiovasculaire avant 60 ans ? ». Des indices vers les racines génétiques de la maladie vasculaire athéromateuse et encore beaucoup de questions.      *Glossaire(5) • Haplotype : matériel génétique porté par un seul des deux chromosomes correspondant à un caractère précis, réunion de plusieurs gènes voisins les uns des autres et souvent impliqués dans une même fonction. • Single-Nucleotide-Polymorphism (SNP) ou variant mononucléotidique commun : définit deux gènes allèles sur le même locus contrôlant le caractère considéré. Ainsi deux phénotypes par exemple A et B définissent trois génotypes AA, AB et BB. • Enjambement (crossing-over) : échange de gènes entre les deux éléments d’une paire chromosomique. 

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