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Congrès et symposiums

Publié le 31 mai 2014Lecture 5 min

L’exercice physique du quadragénaire, à prescrire ou à proscrire ?

M.-C. ILIOU*, L. MONASSIER** *Corentin Celton, AP-HP, Issy-les-Moulineaux **Laboratoire de neurobiologie et pharmacologie cardiovasculaire, EA 7296, Strasbourg

Printemps de la cardiologie

La mort subite du sportif en plein effort est un drame qui, en dehors de son aspect spectaculaire, pose de nombreuses questions à la fois physiopathologiques et pratiques. En effet, si, chez le sujet d’âge mûr, la cause principale est une occlusion coronarienne aiguë, les relations entre l'exercice et la vulnérabilité des plaques d'athérosclérose coronaire sont souvent controversées.

La compréhension des mécanismes sous-tendant le phénomène de rupture de plaque nécessite de connaître la constitution et l’histoire naturelle de la plaque d’athérome. Comme l’a rappelé J.-B. Michel, la plaque vulnérable est caractérisée par un cœur nécrotique entouré d’une chape fibreuse. La thrombose aiguë provient d’une rupture et d’une hémorragie au sein de la plaque elle-même. L’évolution de la structure intime de la plaque suit un modèle physiopathologique où le stress longitudinal lié au flux sanguin et à une conductance radiale unidirectionnelle de l’intima vers la média permet la pénétration de diverses molécules, de lipides et de protéases auquel répond une conductance cellulaire de l’adventice vers la média et l’intima. En effet, le processus complexe de formation de la plaque débute par une oxydation des lipides et des protéines déposées sur l’intima à la faveur de flux turbulents. Ces stries lipidiques deviennent ensuite fibrolipidiques et finalement des plaques d’athérosclérose. Les signaux convectifs partent de l’intima, impliquent la voie des récepteurs PPARg traversent la média en recrutant des cellules musculaires progénitrices qui prolifèrent et sont capables de migrer vers l’intima. En même temps, on observe une production de VEGF qui atteint l’adventice et provoque une angiogenèse sous la forme de microcapillaires immatures et donc fragiles. Cette fragilité est un élément majeur de l’évolution de la plaque car ces néoconduits peuvent saigner. Les saignements intra-plaque libèrent le contenu des éléments figurés du sang dont des cristaux de cholestérol provenant des membranes des globules rouges, du fer et des myéloper-oxydases qui provoquent une oxydation ainsi que de l’élastase, des métallopeptidases et de la plasmine à l’origine de phénomènes de protéolyse. Ce mécanisme entretient et majore la progression et la vulnérabilité de la plaque.   Comme l’a rappelé F. Carré, la pratique d’une activité physique régulière permet de réduire le risque global de mortalité cardiovasculaire. Néanmoins, au moment de la pratique, un exercice intense, de par ses contraintes hémodynamiques et neurohumorales, peut favoriser la rupture, l’hémorragie et/ou l’érosion d’une plaque d’athérome coronaire, sans que l’on puisse déterminer le facteur déclenchant « final » ni la détection des sujets à risque. Le risque de rupture de plaque est lié surtout aux exercices intenses, soit par rupture, soit par érosion de la plaque sans qu’il soit possible d’affirmer si un haltérophile est plus à risque qu’un marathonien. En effet, lors de la pratique d’une activité sportive, la consommation d’oxygène du myocarde peut être multipliée jusqu’à 10 fois le niveau de repos avec un triplement de la fréquence cardiaque et un doublement de la pression artérielle. Il est à noter que cette dernière augmente plus en cyclisme qu’en course à pied, pour ce qui concerne des sports d’endurance habituels. Pour G. Finet, l’augmentation de la pression artérielle, plus que l’accélération de la fréquence cardiaque pourrait être un des facteurs déclenchants de cette rupture en majorant brutalement les contraintes biomécaniques et rhéologiques sur la lésion. De plus, des modifications neurohormonales (augmentation des catécholamines, du cortisol, de la GH et du glucagon) sont généralement significatives pour des efforts supérieurs à 50 % de la VO2 max et de plus de 30 minutes. L’exercice physique pourrait donc contribuer à la rupture d’une plaque du fait des contraintes mécaniques majorées par une vasodilatation inadaptée, voire une vasoconstriction et des sollicitations mécaniques sur une plaque vulnérable ou instable. Finalement, la thrombose suivant la rupture peut être expliquée par un substrat thrombogénique (érosion ou rupture avec cœur nécrotique exposé au sang) ; les modifications hémodynamiques (flux rapide et forces de cisaillement élevées facilitant l’agrégation plaquettaire, les altérations hématologiques (thrombose favorisée par un sang riche en facteur tissulaire circulant et microparticules thrombotiques) et enfin un rôle des plaquettes et de la fibrine dans la constitution d’un thrombus solide. En pratique clinique, le risque de rupture semble tout de même faible si on se réfère aux statistiques disponibles, avec une incidence des syndromes coronariens aigus (SCA) pendant ou au décours d’un effort intense de l’ordre de 0,8 à 1 %. Toutefois, on ne peut exclure que certaines activités physiques intenses déclenchent des ruptures de plaque qui ne sont pas immédiatement cliniquement détectables mais enclenchent un processus, qui dans les jours ou semaines suivantes, sera révélé par un événement coronaire aigu. À l’inverse, l’accident coronarien observé au décours d’un effort physique peut très bien survenir sur une lésion en cours d’évolution, l’exercice ne faisant qu’accélérer un phénomène déjà enclenché. Cette constatation est étayée par le fait que près de 50 % du produit des thromboaspirations réalisées lors d’un SCA ne correspondent pas à un thrombus « frais ». Enfin, le pratiquant de l’exercice est un des éléments majeurs dans le déterminisme de ce type d’accident tant redouté. L’existence de facteurs de risque ou d’une pathologie athéromateuse, le type et l’intensité d’activité pratiquée, son histoire sportive passée et actuelle (en particulier le niveau d’entraînement) sont des éléments à prendre en compte dans l’évaluation du risque d’accident lors d’un exercice de haute intensité. Il convient de retenir les impacts défavorables du tabagisme, de la sédentarité et de l’intensité de l’effort inappropriée tant absolue que relative (intensité de l’effort par rapport au niveau d’entraînement).    En pratique   Le risque hypothétique d'une rupture de plaque ne doit en conséquence jamais dissuader la pratique d'une activité physique régulière et d'intensité adaptée et contrôlée, en particulier pour les patients coronariens compte tenu des bénéfices de l'entraînement, qui sont eux parfaitement démontrés.  Chez des sujets reprenant une activité physique soutenue après des années d’arrêt, on doit recommander une période de reconditionnement physique d’au moins deux mois avant d’envisager de mettre en route un programme d’entraînement visant à améliorer les performances.    D’après les présentations de J.-B. Michel, F. Carré et G. Finet, lors de la session « Exercice et rupture de plaque » Printemps de la Cardiologie, Strasbourg, 24 avril 2014

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