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Congrès et symposiums

Publié le 14 déc 2013Lecture 7 min

La stimulation du barorécepteur carotidien : traitement du futur dans l’HTA résistante ?

A. FAVIER du NOYER, C. TOUBOUL, J. BLACHER, Université Paris Descartes, Unité HTA, Prévention et Thérapeutique Cardiovasculaire ; Centre de Diagnostic et Thérapeutique, Hôtel Dieu, AP-HP, Paris

CNCF

L’HTA : un enjeu majeur de santé publique   Considérée comme étant l’un des principaux facteurs de risque de survenue de maladies cardiovasculaires, l’hypertension artérielle est un enjeu majeur de santé publique. En France, 14 millions d’individus sont suivis pour une HTA et ce chiffre est en constante augmentation. Dix millions d’entre eux prennent un traitement antihypertenseur. Parmi ces patients, 5 à 10 % présentent une HTA résistante aux traitements médicamenteux. Les complications de l’HTA, potentiellement graves, incluent la survenue d’accidents vasculaires cérébraux, de maladies coronaires et d’insuffisance cardiaque. À l’heure actuelle, 9,4 millions de décès sont imputables aux complications de l’hypertension artérielle dans le monde(1).   Barorécepteurs carotidiens : mécanisme clé dans la régulation de la pression artérielle   Les mécanismes de régulation de la pression artérielle sont complexes. Parmi ces mécanismes, l’arc réflexe des barorécepteurs est essentiel dans la régulation à court terme de la pression artérielle. Ces récepteurs situés dans l’aorte et les artères carotides sont le point de départ de modifications réflexes du débit cardiaque et des résistances systémiques locales via l’activation du système nerveux autonome sympathique (stimulateur) et parasympathique (freinateur). Sensibles aux distensions et aux tensions exercées sur les parois des vaisseaux, les barorécepteurs détectent en continu les variations de pression artérielle. Les informations sont envoyées au niveau du tronc cérébral, centre régulateur de la pression artérielle, via le système nerveux autonome, qui agit à la fois sur la pression artérielle et sur la fréquence cardiaque (figure 1). Ce système de régulation permet une adaptation constante de la pression artérielle lors des changements d’activité (repos, effort) ou de position (debout, couché)(2).   Figure 1. Régulation de la pression artérielle par le barorécepteur carotidien.   De nouvelles voies de recherche dans le traitement de l’HTA   Malgré la disponibilité de médicaments antihypertenseurs efficaces, une proportion importante de la population hypertendue reste mal contrôlée. Pour ces patients présentant une HTA résistante, même si une meilleure observance pourrait dans de nombreux cas permettre d’obtenir des chiffres tensionnels satisfaisants, de nouvelles voies de recherche non médicamenteuses sont actuellement développées. Il s’agit de méthodes interventionnelles. La première technique procédurale à avoir été développée visait à diminuer l’activité du système nerveux sympathique par dénervation artérielle rénale(3). Une nouvelle technique, plus récente et visant à augmenter l’activité du système parasympathique via la stimulation du barorécepteur carotidien, semble elle aussi, prometteuse.   La stimulation du barorécepteur = « le pacemaker de l’HTA »   Le dispositif implanté sorte de « pacemaker de l’hypertension » est composé d’un boîtier relié à une électrode unilatérale qui sera implanté au niveau des barorécepteurs carotidiens. À l’heure actuelle, un seul dispositif est commercialisé. Il s’agit du Barostim NeoTM, appareil de 2e génération plus petit et comportant une seule sonde, en comparaison à son prédécesseur de 1re génération, le Barostim RheosTM. Ce dispositif est commercialisé par l’entreprise d’appareils médicaux CVRx, et a obtenu en août 2011 le marquage CE. Le Barostim NeoTM utilise une technologie brevetée par CVRx, élaborée pour stimuler par impulsions électriques les barorécepteurs, permettant ainsi d’activer le système naturel de régulation de la pression artérielle (figure 2). Un logiciel de programmation permettra de modifier les paramètres du stimulateur en fonction de la réponse tensionnelle du patient. Ainsi, les réglages suivant pourront être optimisés : amplitude d’implusion (6 ou 8 mA), durée d’implusion (62,5 à 250 μs) et fréquence d’implusion (20 ou 40 Hz). L’apposition d’un aimant sur le dispositif permettra d’inhiber temporairement le générateur d’implusion. L’implantation du dispositif pourra être réalisée sous anesthésie locale ou générale. Le boîtier, qui ressemble à un pacemaker, mesure 72 mm de haut, 50 mm de large et 14 mm d’épaisseur et pèse 60 g. Il est implanté au niveau sous-cutané, en avant du muscle grand pectoral. Le stimulateur ne sera activé que 2 semaines après son implantation en raison d’une phase de cicatrisation. La durée de vie de ce dispositif est estimée entre 3 à 5 ans.   Figure 2. Barostim NeoTM, le « pacemaker » de l’hypertension.   Indications et contre-indications de la stimulation du barorécepteur carotidien   La population-cible pour l’implantation de ce dispositif est celle des patients présentant une HTA résistante au traitement médical. C’est-à-dire ceux présentant des chiffres de PAS > 140 mmHg sous au moins trois classes d’antihypertenseurs à bonnes doses, comprenant un diurétique thiazidique. Dans l’attente d’une évaluation plus large de l’effet de cette procédure, il semble raisonnable de réduire ses indications à des niveaux manométriques plus élevés (par exemple, PAS > 160 mmHg sous une quadri-, voire une pentathérapie, comprenant un antagoniste de l’aldostérone. Les contre-indications à l’implantation de ces dispositifs sont la présence de malformation anatomique avec bifurcation carotidienne bilatérale au-dessus du niveau des deux mandibules, athérosclérose carotidienne > 50 % ou présence de plaques ulcérées carotidiennes, insuffisance du baroréflexe ou neuropathie autonome, et enfin brady - arythmies symptomatiques non régulées.   Des premiers résultats prometteurs   Dans le monde, plusieurs centaines de patients ont déjà été implantés aux États-Unis, au Canada et en Allemagne. Les résultats cliniques les plus importants dont on dispose proviennent de l’essai pivot du système RheosTM de 1re génération. Cette étude de phase III, multicentrique, a été menée en double aveugle chez 265 volontaires hypertendus non contrôlés et implantés par le stimulateur. L’objectif était d’évaluer l’efficacité et la sécurité de la stimulation à 6 et 12 mois. Les résultats ont été significatifs à la fois sur l’effet sur la pression artérielle, sur la persistance de cette réponse tensionnelle à 12 mois et sur la sécurité de la stimulation du barorécepteur, ainsi que du stimulateur(4). Une autre étude a objectivé une baisse de la pression à long terme après un suivi de 4 ans chez 322 patients présentant une HTA résistante. Il y avait 88 % de patients répondeurs à 4 ans, dont 55 % avaient atteint la PA cible, avec une diminution moyenne de 33 mmHg de la PAS(5). En France, un tel dispositif a été implanté pour la première fois aux Hospices civils de Lyon en juillet 2013, chez un patient âgé de 72 ans qui présentait une PA à 170/110 mmHg malgré la prise de 7 traitements antihypertenseurs. Chez ce patient, une baisse immédiate de la pression artérielle a pu être observée avec une chute de PAS de 170 à 120 mmHg pendant les essais réalisés lors de l’intervention. Lors de la 1re visite de contrôle à 24 heures, la PAS était de 155 mmHg.   La stimulation du barorécepteur : de nombreux avantages   Un meilleur contrôle tensionnel chez les patients présentant une hypertension artérielle résistante L’objectif principal de ces systèmes est d’obtenir un contrôle tensionnel satisfaisant chez des patients hypertendus résistants qui se trouvaient jusqu’alors dans une impasse thérapeutique. Un traitement réversible Ces procédures, non définitives, ne modifient pas et ne détruisent pas la structure du baroréflexe. La stimulation pourra donc être interrompue par l’activation de la fonction off du stimulateur. Une modulation de l’intensité antihypertensive Pour chaque patient, les modalités de stimulation pourront être adaptées de façon individuelle en fonction des chiffres tensionnels. Une stimulation continue Grâce à ces nouveaux dispositifs, la stimulation continue et automatique du barorécepteur, tant que celui-ci est fonctionnel, permet un contrôle de la pression artérielle sur tout le nycthémère et n’est plus dépendante de l’observance du patient. Face à cette nouvelle thérapie prometteuse, il faut savoir rester prudent. Des indications clairement définies Une évaluation précise de l’indication de l’implantation de ces dispositifs devra toujours être réalisée. La stimulation du barorécepteur ne devra en aucun cas se substituer à la prise de traitement antihypertenseur, mais sera proposée à une population de patients bien sélectionnés résistant à ces traitements. Les complications dues à une prise en charge procédurale Parmi les effets indésirables, outre les complications hémorragiques et infectieuses et le risque anesthésique consécutifs à ce type d’intervention, on notera le risque de survenue d’un AVC ou d’un AIT, de plaie artérielle mais également le risque d’hypotension ou de bradycardie par hyperstimulation. Un coût important Le coût de ces techniques innovantes devra clairement être évalué, car outre le prix du dispositif estimé à environ 20 000 €, il faudra prendre en compte le suivi et les réhospitalisations pour changement de boîtier tous les 3 à 5 ans. Cela devra être mis en balance avec le gain représenté par la diminution de traitement antihypertenseur, mais surtout la diminution des complications dues à l’HTA. L’intérêt médico-économique de ces dispositifs devrait être étudié.   L’avenir   Ainsi, cette thérapeutique innovante représente un nouvel espoir pour les patients chez lesquels des traitements médicamenteux ont montré leurs limites. De nouvelles études devraient permettre de confirmer les résultats sur les chiffres tensionnels, mais aussi peut-être sur la morbimortalité cardiovasculaire et rénale, tout en confirmant la sécurité de ces dispositifs sur de larges populations de patients. Enfin, il faudra aussi réaliser des études aux schémas complexes permettant d’évaluer les avantages et inconvénients comparés des différentes stratégies dorénavant disponibles dans l’HTA résistante, notamment l’escalade thérapeutique médicamenteuse réalisée dans des centres experts, la dénervation artérielle rénale et cette stimulation du baroréflexe carotidien.

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