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Congrès et symposiums

Publié le 14 déc 2013Lecture 6 min

Dénervation rénale : futures et nouvelles indications

N. MENEVEAU, CHU Jean Minjoz, Besançon


Congrès francophone de cardiologie interventionnelle
Depuis les premières procédures réalisées aux États-Unis en 2008, la dénervation rénale est apparue comme une alternative thérapeutique prometteuse dans la prise en charge de l’hypertension artérielle résistante. Son bénéfice pourrait toutefois ne pas se limiter au seul traitement de l’hypertension artérielle.

De nombreuses pathologies cardiovasculaires sont associées à une stimulation sympathique centrale excessive (figure 1). L’insuffisance cardiaque, le diabète et l’hyperinsulinémie, les néphropathies chroniques, les arythmies et le syndrome d’apnée du sommeil pourraient bénéficier d’une réduction de l’activité nerveuse sympathique comme celle proposée par la dénervation qui cible les afférences sympathiques rénales.   Figure 1. Cibles potentielles de l’activation sympathique chronique.   Insuffisance cardiaque   L’activation du système nerveux sympathique a un impact pronostique bien établi chez les patients souffrant d’insuffisance cardiaque, et l’antagonisation de cette stimulation sympathique par les bêtabloqueurs permet de réduire significativement la morbi-mortalité cardiovasculaire. Dans une série de 46 patients avec hypertension résistante, la dénervation rénale a permis une réduction significative de la masse ventriculaire gauche associée à une réduction des pressions de remplissage et une amélioration de la fraction d’éjection échographique (figure 2A). Cette amélioration de la FEVG après dénervation rénale a été confirmée chez des patients avec fonction systolique sévèrement altérée en IRM (figure 2B). La procédure est, par ailleurs, bien tolérée au plan tensionnel, comme l’a montré l’étude pilote REACH. Dans un essai randomisé de petite taille ayant inclus 51 patients en stade III/IV de la NYHA, la dénervation rénale était associée à une amélioration significative de la FEVG à 12 mois (31 ± 14 % vs 25 ± 12 % ; p < 0,01), à une réduction des diamètres télédiastoliques et télésystoliques ventriculaires gauches et à une baisse des taux plasmatiques de NTpro-BNP. Aucun changement n’a été observé dans le groupe des patients recevant un traitement médical optimal. Une étude randomisée multicentrique est en cours (RE-ADAPTCHF) qui évalue les effets de la dénervation rénale chez des patients insuffisants cardiaques (stade II à III de la NYHA).   Figure 2. A. Impact de la dénervation rénale (DR) sur l’indice de masse VG. B. Impact de la dénervation rénale (DR) sur la FEVG chez des patients à fonction systolique altérée.   Dénervation rénale et métabolisme du glucose : diabète et insulino-résistance   L’activation du système nerveux sympathique participe à l’insulino-résistance et au syndrome métabolique associé à une obésité centrale et à un risque élevé de développer un diabète. L’élévation des résistances vasculaires, régulée par l’activité sympathique, génère une redistribution du flux sanguin des muscles striés (sensibles à l’insuline) vers les tissus splanchniques (insulino-résistants). Une étude pilote de 50 patients avec hypertension résistante a rapporté un impact positif de la dénervation rénale sur le métabolisme glucidique. À 3 mois, une baisse significative de la glycémie à jeun, de l’insulinémie, et des taux de peptides C était observée, à l’origine d’une amélioration significative de la sensibilité à l’insuline, alors que la prise en charge médicamenteuse ou hygiéno-diététique n’était pas modifiée (figure 3). Ces mêmes variables n’étaient pas modifiées dans le groupe contrôle. Une amélioration de l’équilibre du diabète était obtenue chez 19 % des patients après dénervation rénale (vs 0 % dans le groupe contrôle), alors qu’aucun patient du groupe dénervation n’a vu son diabète progresser (vs 22 % dans le groupe contrôle). Ces modifications du métabolisme glucidique ne semblent pas être corrélées au degré de baisse de la pression artérielle. L’impact clinique de cette amélioration du métabolisme glucidique chez des patients hypertendus avec désordres métaboliques à haut risque cardiovasculaire reste à déterminer. Des données préliminaires suggèrent que la dénervation rénale permette d’abaisser les chiffres de pression artérielle et d’améliorer également l’insulino-résistance observée dans le syndrome des ovaires polykystiques.   Figure 3. Dénervation rénale (DR) et métabolisme glucidique.   Les néphropathies chroniques   Les néphropathies chroniques sont associées à une activation sympathique importante, qui contribue à l’hypertension artérielle, elle-même responsable d’une progressive dégradation de la fonction rénale. La dénervation rénale pourrait constituer une éventuelle alternative thérapeutique dans ce contexte. Son efficacité chez des patients avec insuffisance rénale modérée à sévère (débit de filtration glomérulaire moyen à 31 ml/ min/1,73m2) a été évaluée dans une étude pilote de 15 patients avec hypertension artérielle résistante. Il n’y a pas eu de diminution du débit de filtration glomérulaire au décours de la procédure, malgré l’injection d’iode, et aucune dégradation de la fonction rénale n’est survenue au cours des 12 mois de suivi. L’efficacité de la dénervation rénale sur les chiffres tensionnels était superposable à celle observée chez les patients à fonction rénale normale. Dans une autre série de 88 patients, la dénervation rénale était associée à une réduction de la micro- et de la macro-albuminurie à 6 mois. Ces résultats viennent confirmer ceux de l’étude ENLIGHTN-1 qui ne montrait pas d’altération de la fonction rénale à 12 mois, en particulier du débit de filtration glomérulaire, mais une amélioration de la cystatine C. Ils confirment l’innocuité de la procédure de dénervation rénale et laissent présager d’un impact positif de la procédure sur la fonction rénale.   Effet antiarythmique   Le système nerveux autonome participe à la régulation de l’électrophysiologie cardiaque. La dénervation rénale est à l’origine d’une réduction de la fréquence cardiaque basale avec allongement de l’espace PR. Des cas de prise en charge d’orages rythmiques par dénervation rénale chez des patients insuffisants cardiaques sévères ont été rapportés dans la littérature. L’impact de la dénervation rénale chez des patients avec hypertension artérielle résistante et fibrillation atriale a été évalué dans une étude randomisée de petite taille (27 patients). Les patients étaient soumis à une ablation par radiofréquence associée ou non à une procédure de dénervation rénale. Le groupe de patients traités par dénervation rénale avait une réduction significative à 1 an des épisodes d’arythmie supraventriculaire (fibrillation atriale, flutter, tachycardie atriale) (figure 4).   Figure 4. Dénervation rénale (DR) et fibrillation atriale.   Syndrome d’apnée du sommeil   Il existe une relation très étroite entre syndrome d’apnée du sommeil et hypertension artérielle. La prévalence du syndrome d’apnée du sommeil est de 5 à 10 % dans la population générale, 35 % dans une population d’hypertendus et 60 % parmi les patients souffrant d’hypertension artérielle résistante. Le syndrome d’apnée du sommeil est la pathologie la plus fréquemment associée à l’hypertension artérielle, par l’intermédiaire de l’association hypoxie-hypercapnie responsable d’une activation du système sympathique. Dans un modèle expérimental animal, la dénervation rénale a montré qu’elle inhibait l’élévation tensionnelle enregistrée au décours d’une apnée, alors que les bêtabloquants n’ont aucune efficacité dans ce contexte. Dans une étude préliminaire ayant inclus 10 patients avec hypertension artérielle résistante et syndrome d’apnée du sommeil, la dénervation rénale était associée à une réduction de l’index apnée/hypopnée à 6 mois. Une amélioration significative de la sévérité des apnées, avec réduction de la désaturation artérielle en oxygène et du score d’Epworth, était observée chez 8 patients sur 10. L’amélioration était d’autant plus importante que le syndrome d’apnée du sommeil était sévère (index d’apnée/hypopnée > 30).   Dénervation pulmonaire et HTAP   Les barorécepteurs et fibres nerveuses sympathiques sont localisés à proximité des bifurcations des troncs artériels pulmonaires proximaux. Une étude non randomisée portant sur 21 patients avec hypertension artérielle pulmonaire a montré que les procédures de dénervation artérielle réalisées au niveau des bifurcations artérielles pulmonaires proximales et sur les ostia des artères pulmonaires droite et gauche, étaient associées à une réduction significative de la pression artérielle pulmonaire moyenne (de 55 ± 5 mmHg à 36 ± 5 mmHg ; p < 0,01) avec amélioration significative du test de marche de 6 minutes, et de la fonction systolique ventriculaire droite échographique.   Conclusion    Les résultats préliminaires de la dénervation rénale dans différentes pathologies cardiovasculaires, telles que l’insuffisance cardiaque, les troubles du métabolisme glucidique, les néphropathies chroniques, les arythmies auriculo-ventriculaires ou le syndrome d’apnée du sommeil, laissent à penser que le bénéfice de ce type de procédure pourrait s’étendre au-delà de la prise en charge de l’hypertension artérielle résistante. Il convient toutefois d’interpréter ces données préliminaires avec prudence, en attendant les résultats d’études prospectives de grande ampleur qui devraient nous permettre de disposer d’informations plus robustes à court terme. 

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